temporalité du rp : 5 juin 1954
personnages concernés : @augustus parkinson & @agatha trelawney
trigger warnings : vulgarité, ivresse, érotisme, nsfw
intervention autorisée du mj : [ ] oui [X] non (cochez la case correspondant à votre choix)
autre(s) : /

IN FOR THE KILL - 2021-2022

5 juin 1954

8:53
Ton être entier hurle. Ton reflet dans le miroir, les yeux rougis par les larmes, les lèvres tremblotantes, tu te fixes. « Regarde ce que ça me fait. » Tu ne comprends pas. Et tu as horreur de ne pas comprendre. Enlèvement ? Meurtre ? Fuite ? Comment peux-tu survire à un tel mystère ? La disparition qui entoure ta sœur depuis plusieurs semaines te consume petit à petit. Les os rongés par l’inquiétude. Les tragédies se succèdent, mais c’est peut-être celle que tu as le plus de mal à encaisser. Au fond de toi, le sentiment qu’Edna n’a pas disparue par hasard. Elle est partie volontairement. Elle a foutu le camp. Tu pourrais le comprendre. Partir sans explication te semble pourtant inconcevable. Pas à toi. Son double. Pourtant dans tes tripes, tu le sens, elle va bien. Ou alors tu te ments très bien.

Tu te retournes, saisissant la tasse de thé déjà refroidie. Tu bois une gorgée de ce thé anglais que tu apprécies tant. Sans quitter ton reflet. La tasse vidée, tu t’appliques à jeter quelques sorts pour t’embellir. Tu es rapide, à force d’y avoir recours. Tu masques la tristesse de tes traits. Tes yeux encore empreints des larmes resteront malheureusement ainsi jusqu’à ton arrivée à la radio. Le monde continue d’avancer, te défiant de continuer à vivre. Malgré le tourbillon qui a chamboulé ta vie. Ça fait plusieurs jours que tes collègues n’osent plus te demander de nouvelles ni prononcer son nom. Ils ont compris eux, qu’elle ne reviendra jamais. Alors, toi, tu essayes de sourire à leurs blagues parfois douteuses, tu surenchéris aussi, parce que s’il y a une chose dont tu as horreur c’est d’être transparente. Accablée ou pas.


23:13
« Tu t’es vue quand t’as bu ? » Le reflet, encore. Cette fois la gamine qui te fait face est méconnaissable, ses yeux de biche remplacés par des fentes à peine visibles. L’alcool, c’est pas si cool que ça. T’as déjà le crâne qui cogne. Un peu, mais pas assez. T’as déjà l’impression que la pièce tangue. Un peu, mais pas assez. T’avais envie de pisser, mais te laver les mains en te regardant le miroir devient un véritable exploit. Tu retournes vers le comptoir en longeant le mur, au cas où. Ta main t’aide à te rattraper, parfois. T’aurais pas dû mettre des talons, c’était dangereux. Tu reprends ta place, te hissant sur le tabouret avec difficulté. Une fois que t’es dessus, tout s’éclaircit. Surtout la gueule d’ange du barman. Tu lui fais un petit signe, mais il ne te voit pas. Il fait exprès ce con-là ! T’es pas vulgaire d’ordinaire, t’as même horreur de ça. Tu ne réfléchis plus. Les pensées quittent ton cerveau avant même que t’aies le temps de les rattraper. Peut-être qu’il te faudrait une petite pause ? Histoire de remettre quelques idées au clair. Tes coudes posés sur le bar, les doigts sur les tempes. Tu réfléchis. A la vitesse d’un escargot asthmatique. Les minutes s’écoulent. Ça va un peu mieux. Tu te redresses. En fait, non. Tu vas gentiment rester assise là encore un peu. L’endroit ne désemplit pas, au contraire. Des âmes solitaires, comme toi. Tu ne supportes pas la solitude. Ou alors, elle ne te supporte pas ? T’sais plus. Alors oui, parfois tu vas toquer à la porte d’amis, mais t’es dans un état tellement pitoyable aujourd’hui qu’il ne valait mieux pas. Demain c’est ton anniversaire. Le premier que tu vas fêter sans Edna et ça fait si mal que t’as envie de reprendre un Gin Tonic.

Le barman est trop occupé. « C’est bien ma veine ! » Alors tu attends encore un peu. Maintenant que ça ballotte moins, tu jettes un regard à l’endroit. Tes yeux s’arrêtent sur un blondinet bouclé, il est plus âgé, mais mâter son sourire en coin et son regard lubrique te fait une drôle de sensation dans le bas du ventre. C’est jamais toi qui fais le premier pas, alors tu ne fais que le regarder, pour le moment. Tu sais pas vraiment si t’as envie qu’il s’approche ou si tu préfères rester tranquillement là à décuver un peu.

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Les yeux clos. Le regard est vide, aussi vide que les couloirs, aussi vide que les bureaux du département de la Coopération Magique Internationale, petit royaume sur lequel son auguste majesté règne avec la rigueur nécessaire. Mauvais chef, lubrique et imbu de lui-même ce sont les mots de la dernière remerciée du service. Dix ans de sa vie à gratter les parchemins au sein du bureau des lois magiques internationales pour finir échouer sur le bord d’un chemin pour une incompatibilité de caractère. « Incompatibilité de caractère » c’est la formule officielle, celle dont tu as paraphé le document de fin de contrat. La réalité est ce refus de donner de sa personne. De ta plus belle écriture tracée avec une plume hors de prix et un sourire sur le visage, tu as achevé sa vie professionnelle avec la tristesse d’une louve voyant son louveteau s’égarer. C’est surtout ses deux petites fesses dessinées dans des tenues toujours plaisantes que tu viendras à regretter. Parce qu’une gratte-papier se remplacera toujours plus facilement qu’un joli derrière. Tu frottes un peu ces deux perles qui servent à ton cerveau dans l’interprétation visuelle de l’extérieur. Il est pas loin de vingt-deux heures trente déjà et des tas de dossiers qui viennent encore polluer la rigueur d’un bureau de noyer parfaitement ordonné. Il y a des documents à signer, des missions à assigner, des rapports à vérifier… Jamais ne s’arrête l’ire infernale des directeurs. Ceux que l’on pense toujours dans les caricatures comme des champions de la sieste rapide ou comme des experts en tests de magasines sont en réalité les moteurs rutilants d’une société en marche. De fiers combattants que l’on se doit de récompenser avec d’astronomiques salaires et surtout d’un immense plaisir visuel. Quelques créatures de rêve à supplanter aux autres pensées.

Echu pour le lendemain ce rapport immense concernant des idées germées depuis trop longtemps par la maladie encéphalique qui creuse son chemin comme un immense ver des glaces sous ta calotte cérébrale. Cette maladie n’est point maligne, pas même menaçante mais s’empresse de ruiner chaque instant de chaque journée : l’obsession est chevillée à ton crâne avec cette insistance toute magique. Tu refermes avec véhémence le troisième classeur contenant les dernières informations enregistrées sur le « flux d’importation des épices sorcières et l’impact économique sur les territoires francophones de telles importations ». Le Ministère de la Magie aime les chiffres, il est vu dans ton esprit comme une bête immonde, gargantuesque, qui n’est même plus capable de se mettre en marche pour chasser sa nourriture favorite (les statistiques inutiles) et qu’il faut donc nourrir de cabinets d’études en comités de réflexion.
Un œil jeté vers la pendule en face du bureau. Vingt-trois heures déjà. Il serait temps de rentrer se lover dans les bras d’Emma. Temps de la décontenancer dans de grands et amples mouvements de bête pour qu’elle s’y accroche aux rideaux qu’elle tenait tant à faire installer dans la chambre maritale. Mais cette envie est balayée en vitesse par le souvenir de ses moues ravagées. Elle n’offrira rien d’autre à sa majesté Parkinson que le déplaisir d’une énième remontrance, elle ne donnera rien d’autre à écouter que des lamentations féminines plus ennuyantes à tes oreilles que les rapports globaux lus ce soir. Elle parmi toutes les autres avait cette fonction plus salutaire encore à se rapprocher de la folie sans jamais y pénétrer pleinement. Rester à la frontière de la conscience et de l’inconscience pour empoisonner chaque fragment. Les femmes, de toutes façons, avaient ce goût inutile du drame et de la faroucherie. Elles étaient de viles tentatrices qui faisaient mourir les envies sur l’autel des migraines et de maladies à faire hurler de rire Molière et son Malade imaginaire en personne.
Alors c’était ainsi que mourrait le mariage ? Ainsi que mourrait le sentimentalisme presque lâche des jours heureux ? Le Grand Soir n’avait rien de cette belle révolution vantée, rien de cette maestria littéraire. Le Grand Soir était une grande mort, l’inverse réciproque de l’orgasme et de la jouissance.

C’était ainsi que venait à choir les frontières de l’Homme sur l’animal. Ainsi que venait à s’écraser sur des rochers en piquet les coques les plus solides. Titanic en recommencement dans le myocarde. Pour cette raison et pour celle d’absorber un litre ou deux d’une bière de sans-le-sou que le troquet choisi n’est pas l’un de ces bars à la mode où fonctionnaires et haut-fonctionnaires du Ministère se réunissent en général après des séquences infernales pour décompresser. Non, ce soir, c’est l’anonymat du prédateur en chasse qui prime sur tout le reste.
Installé à une table dans le fond de l’endroit avec vue sur le comptoir. Position idéale pour masquer aux yeux étrangers le dos si facilement transperçable d’un ou deux coups de poignard, c’est bien l’apanage des paranoïaques que de se méfier de tous et tout le temps. Tu as toujours cette impression vive qu’on pourrait vouloir ta mort pour une raison ou une autre : politicien sur le devant de la scène qui commence à creuser son bout de chemin aux yeux du grand public, mari trompé qui se rend compte que sa femme s’est épanouie au lit avec un grand duc aux allures de chacal ou tout simplement pour qu’on déleste ta célèbre personne de sa bourse bien remplie. Être riche, beau et célèbre est une vie complexe que tu ne souhaites à personne. C’est une blonde qui attire ton attention. Parce qu’il semblerait qu’elle soit presque prête à cueillir. Une fragile petite créature juchée sur ses talons qui manifestement ne sait pas boire sans s’enivrer. Elle te regarde d’ailleurs, avec ce petit sourire en coin qui veut tant en dire dans ton esprit capable de lire et de parler sept langues : six officielles ; l’autre étant le langage féminin. Elle a ce petit air de fragilité que tu aimes ramasser et briser avec violence. Elle est une petite blonde bien malchanceuse, sans doute, d’avoir eu l’outrecuidance de sourire. Parce que voilà que ton illustre majesté s’est levée. Le corps est une arme par destination qui s’élance à l’allure du condor fondant sur le pigeon. Tu tires le haut tabouret à son coté le plus direct avant même d’ouvrir la bouche. « Bonsoir mademoiselle. Vos regards sont un aimant trop puissant pour qu’on y résiste. » Un sourire qui déforme tes lèvres. Chien en chasse ; animal en rut. « Puis-je vous offrir le prochain poison qui coulera dans votre délicieuse petite glotte ? » Avant que n’y coule un fluide d’une autre consistance manques-tu d’ajouter. Ce sourire dont tu ne sembles pouvoir te défaire et qui, de mémoire d’humain, n’a jamais apporté que de mauvais présages pour son destinataire.

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5 juin 1954

Tu réfléchis. T’en es presque à te demander pourquoi tu es venue. La solitude est un mal trop lourd pour tes frêles épaules, tu ne t’y feras jamais. Quand t’es dans ton canapé, tu te demandes ce que font les autres. Tes sœurs, ta mère, tes amis. Tu les passes en revue en te disant que tu serais bien plus heureuse avec l’un d’eux à tes côtés. C’est pour ça que tu es restée avec Anna. Malgré tout ce que vous avez traversé, elle reste l’un des piliers de ta vie. Celui qui ne bouge pas. Vague, vent, rien ne le fait osciller. Pour le moment. Ça te fait un mal de chien d’imaginer qu’elle partira un jour. Oh et tu le sais, elle partira. Un beau matin, elle se réveillera en se demandant pourquoi elle a perdu toutes ces années avec une fille comme toi. Certes l’amour était présent au début. Deux tourterelles qui faisaient tourner les têtes partout où elles allaient. Deux bonbons sucrés qui cachaient des cœurs acidulés. C’était beau cette époque. Tu vibrais pour elle. Puis ça s’est arrêté. D’un coup d’un seul. Comme si le karma s’était réveillé et avait décidé de t’enlever le petit cocon de bonheur que tu avais mis tant de mal à créer. Tu n’avais pas aidé la situation évidemment. Ce n’était pas en courant te réfugier chez Ephy qu’il fallait espérer qu’Anna te court après. T’es pas une menteuse Agatha, alors tu lui as tout dit. Tu lui as toujours tout dit. C’est bien d’être franche, mais il faut avoir le courage d’assumer aussi. Alors Anna est un piler, un très joli pilier d’ailleurs, mais c’est tout. Une copine qui réchauffe ton lit glacial, une amie qui comble ton immense baignoire, une fille avec qui tu peux rire un verre de blanc à la main, mais c’est tout. L’amour s’est envolé, il s’est barré tellement loin que tu sais que jamais il ne reviendra. Tu te demandes parfois si tu es encore capable d’aimer.

Les malheurs ont commencé lorsque cette histoire s’est étiolée. Puis tu as perdu ton père, ensuite ton beau-frère et voilà que ta sœur a disparu. On peut dire que toutes ces histoires mises bout à bout ressemblent à un mauvais roman, pourtant c’est ta vie. Si tu te demandais pourquoi tu avais atterri dans ce bar, tu viens de trouver la réponse.

Ça cogne un peu là-haut, dans ce crâne submergé par l’anxiété. Ça ne t’aide pas de te remémorer toutes ces tragédies. Demain, tu auras 33 ans. Edna ne sera pas là pour t’aider à souffler les bougies et ça te fait aussi un mal de chien.

Tu rumines, fixant le sous-bock à l’effigie du bar. Tu sens une présence. C’est le gars que t’as pas arrêté de fixer. Tu le trouvais beau de loin. Il est encore plus beau quand ses deux billes bleues te toisent. Tu sens la connerie arriver. Ce ne sera pas la première, mais tu ne sais pas pourquoi tu penses que tu te souviendras longtemps de celle-là.  « Bonsoir. » Tu le fixes un peu, t’es pas très physionomiste, mais ce gars-là tu penses déjà l’avoir vu. « Agatha. » Lâches-tu en lui tendant la main, espérant qu’il te donne son nom. Il te propose à boire. « T’as tout compris, toi ». Tu sais que tu devrais dire non, rentrer chez toi et être une fille sage. Si ça n’était déjà pas ton cas il y a dix ans, ça l’est encore moins maintenant alors que toute la stabilité de ta vie semble s’être barrée. Puis, tu as repris un peu la forme, en restant sagement assise quelques minutes et c’est vrai que ta gorge en redemande ou alors c’est plutôt ta tête, tu ne sais pas trop. Il dit que ta glotte est « délicieuse » ça te fait pouffer. « Je vois que vous êtes un fin observateur... » Tu regardes brièvement autour de toi, pour t’inspirer un peu. Le changement fait toujours du bien. « Ce sera un Manhattan pour moi. » C’est un peu ce que tu recherchais ce soir, une bouffée d’air frais. Tu as des amis, certains auraient été ravis de te consoler ce soir, mais t’as pas envie de t’échouer dans tes bras qui connaissent toute ta vie. T’as envie d’être quelqu’un d’autre ce soir. Le type semble pouvoir combler cette attente. « Vous venez souvent ici ? »

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Tomber de charybde en scylla. Fuir les affres d’un mariage monotone pour se retrouver dans quelques histoires bien senties. Plutôt partager le malheur d’inconnues que son malheur à elle. Parce que ceux des autres est bien plus entendable, il sonne à tes oreilles comme de lointaines et profondes histoires chuchotées. On pourrait ne pas en croire certaines, on pourrait juger qu’elles sont falsifiées et qu’elles ne représentent rien, en réalité, que l’expression créative d’un cerveau fulgurant à sa vitesse maximale. Les pleurs et les lamentations de ces jeunes femmes ont un avantage à la saveur magnifique : aucunes de ces lamentations n’incluent ta propre personne. Les tourments d’Emma, eux, ont une saveur plus rance sur le palais. On pourrait presque croire qu’ils rendent allergiques ta présence même puisque des années désormais que fuyant tes responsabilités maritales, tu ne prends même plus le temps d’écouter. Se comporter ainsi est sans doute une forme d’amateurisme sentimental. Du moins c’est ce que père n’arrête pas de répéter lorsque l’idée d’évoquer des sentiments avec lui est prise. C’est une manière comme une autre de décharger ces lourdes épaules d’un fardeau trop lourd à porter pour un seul homme. Généralement une idée regrettée lorsqu’il appose son lourd jugement de sa voix de stentor. Le courant entre Emma et lui est bien plus électrique que celui qui circule entre la blonde et toi-même. Si le lit a été un exceptionnel terrain de jeu pendant des années entières à découvrir à chaque fois chaque parcelle de ce corps nu comme si c’était la première fois, à se noyer dans ses yeux les plus écartés sous les assauts brutaux, à prendre le monumental plaisir de chevaucher son petit corps frêle, à dévaler la piste courant de sa tête renversée à son intimité la plus secrète, ces sensations se sont fanées. Fanées parce qu’Octave n’était point suffisant, fanées parce que tu as pris des responsabilités obligeant ton être à se détendre de plus en plus souvent. Comme un être cruel voulant faire régner la terreur sur les basfonds de la jeune femme. Fanées aussi les paroles jetées chaque matin et chaque soir, fanés les baisers sur le front et puis fanées aussi les mains tendues, tenues, pressées. Fanés les bouquets ramenés de moins en moins souvent et fanés les idéaux passéistes.
Augustus, tu étais né à nouveau dans cette version bien plus froide et solide. Tu étais né de la douceur, re-né de la violence maritale. Plus rien aujourd’hui ne pouvait dominer cette immonde bête qui s’était dressée sur le chemin des mortels et des immortels. Plus rien aujourd’hui ne pouvait plus arrêter cette infernale destinée qui croiserait le fer avec les Ministres et les basfonds, plus rien ne pourrait plus conjurer Augustus Parkinson de se ranger pour mener sa vie discrète d’autrefois. Avec les responsabilités cette sensation de toute puissance, avec le père, glissant le froid à l’oreille puis le chaud aux esgourdes deux secondes plus tard, cette formation sauvage et violente pour grapiller ta place. Pas celle dont la naissance avait condamné ton être : derrière Mona, femme mais première-née. Non. Celle dont tu pouvais revendiquer l’existence : Augustus Parkinson, maître de son destin ; capitaine de son âme. C’était cette toute puissance Augustus qui menait ta conduite vers ces territoires inconnus. Cette toute puissance de se sentir toujours là où il le fallait quand il le fallait. L’ichor coulant dans tes veines comme passeport à ta rayonnante destinée ; ton nom brodé en lettres d’or au frontispice de toutes les bouches tordues et admiratives comme blanc-seing aux plus viles attentes.

Tu sers sa petite main, prenant bien le temps d’attraper ses petits doigts pour les piéger dans la tienne. Sa paume est chaude d’avoir frottée contre le bois sombre du bar. Sa paume est intrigante. Tu as cette obsession curieuse pour les mains. Tu as cette obsession curieuse en réalité pour le corps féminin et les courbes dévoilées. Tu as cet appétit qui grossit et cette envie de nourrir l’immondice qui se terre dans l’estomac. « Bonsoir Agatha… Je m’appelle John. John Straub. » Jettes-tu avec un sourire. Pour une fois que ce maudit nom d’emprunt sert à quelque chose il faut que ce soit pour gouter aux plaisirs de la chair incognito. C’est une classe internationale que tu offres à l’impétueuse blonde. Son affront le plus ultime étant ce regard d’allumeuse qu’elle tend depuis tantôt à tout le bar. Que la douceur de ses traits fait monter en toi cette envie de brutalité. Le loup est dans la bergerie ; les brebis dans la tanière du loup. « Je plaide coupable ! » Ris-tu à sa remarque. Coupable d’observer ? Coupable de vouloir dévorer ce petit bout de viande fraiche ? Sans doute les deux. Chacal. Tu acquises à sa commande avant de claquer les doigts devant le serveur qui semble démuni que les commandes s’enchainent. Heureusement qu’il n’a pas eu l’idée de travailler au Ministère… Un incapable pareil aurait pu tenir quelques heures dans tout service. Tout au plus… Son physique ne lui sauvant pas même sa place. Loin du cœur et surtout loin, très très loin des yeux. « Un Manhattan pour madame. Et un Arnold Palmer pour moi. » Tu glisses sur le comptoir pour qu’elle n’entende pas. Mouvement subtil du bassin et faisant mine de fouiller ta poche à la recherche de quelques galions. Le bruit ambiant couvre ta voix.   « Double-dose sur les alcools composant sa boisson. » Murmures-tu à ton nouveau complice en lui glissant quelques pièces sur le court morceau de bois vous séparant encore. Puis tu retrouves ta position initiale. Quant à toi, Augustus, si habitué à la délicieuse morsure du Pur-Feu te voilà à commander la boisson du sexe faible. Mais il faut garder les idées claires pour espérer pénétrer les siennes. « Oh non… Je n’ai pas pour habitude de fréquenter des endroits si… Pittoresques ? » Penses-tu à voix haute en haussant les épaules.  Mentir serait une hérésie tant le barman pourrait dénoncer ton stratagème en quelques secondes. Les meilleurs mensonges sont toujours teintés d’une part de la vérité, c’est ainsi qu’ils tiennent. Qu’on demande donc à ta vie sentimentale son avis. « Et vous Agatha ? Qu’est-ce qui mène une si jolie jeune femme à être seule un samedi soir ? » Tu tires la chaise haute à son côté pour y choir de tout ton être. Un sourire toujours sur le visage. « Ne me dites pas que votre moitié est ce stéréotype du goujat qui préfère la chaleur d’un divan à cette ambiance ? » Dis-tu en pointant le doigt vers un petit groupe lancé dans des jeux à boire et tapant sur les tables avec la violence de babouins en rut. Décidemment la nuit sera pleine de surprises, c’est certain.

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S’échouer. Les corps mêlés. Les problèmes oubliés. C’est ça que t’es venue chercher. Une parenthèse gourmande à cette existence devenue si difficile. Tu te réveilles en souriant et d’un coup chaque souvenir douloureux refait surface. Tu te prends un tsunami de merde dans la gueule, chaque putain de matin. Tu n’en peux plus. Tu fais semblant d’aller bien parce que ton entourage va encore moins bien que toi. T’es l’épaule sur laquelle on pleure parce que tu parais solide. Mais t’es fragile Agatha. Et tu en prends encore plus conscience quand tes doigts caressent les siens. Sa paume chaude qui rencontre la tienne. Sa poignée de main ferme qui se confronte à ta délicatesse. John Straub. Tes lèvres s’étirent en un sourire, ça lui va bien mais tu sais pas pourquoi tu y crois moyen. C’est peut-être toi qui es idiote, à donner ton vrai prénom au premier venu. Faut dire que t’as pas forcément l’habitude de rencontrer des gens dans un bar. En général, tu préfères la compagnie de gens qui te connaissent déjà. Certes, ça t’arrive parfois, les coups d’un soir qui te permettent de disparaitre presque aussi vite que la rencontre a survenue. C’est ce dont t’avais besoin ce soir, parce que t’en a marre de raconter que tu vas bien à certains. T’en as aussi marre d’avouer à d’autres que tu ne vas pas bien.

Le type, John donc, commande vos boissons. Tu le vois discuter un brin avec le barman ce qui te fait lui demander s’il vient souvent ici. Tu as cru que c’était toi qui l’avais remarqué à l’autre bout de la salle, mais c’est peut-être l’inverse finalement. Il traite l’endroit de « pittoresque », il parle bien, t’espères que ses autres compétences sont aussi éclatantes. Ensuite, il te demande ce qui t’amène ici. « La même chose que vous, je pense. » Tu lui fais un clin d’œil et reprends. « J’essaye de tromper la solitude et le calme. » Une bonne chose de faite puisque tu es en bonne compagnie, à priori et qu’un groupe d’hommes semble chargé de vous tenir éveillés tellement il est bruyant. Tu rigoles lorsqu’il les pointe du doigt. « Je n’ai pas qu’une moitié. J’en ai plusieurs ! »  Tu pouffes. T’essayes de lui répondre sans lui donner de détails. T’essayes de lui faire croire que ta vie ne ressemble pas au naufrage du Titanic. Tu lui montres la plus belle partie de l’iceberg, c’est tout ce qu’il a à connaitre de toi. On dépose vos boissons sur le comptoir. Tu trempes tes lèvres dans le Manhattan, t’as pas spécialement l’habitude d’en boire, mais ça t’envoie directement un choc au cerveau. Chargé. « Et vous ? Votre femme, parce que vous en avez forcément une, est d’un ennui mortel je présume ? » Un homme de son âge, avec autant de charisme et qui dégage autant d’assurance est forcément marié. T’espères juste que sa femme est dans les mêmes délires que lui.

Il n’est qu’à quelques centimètres de toi. Terriblement classe dans son costume qui lui va à merveille. Tu t’amuses à imaginer à quoi il ressemble nu et t’as une furieuse envie de le découvrir pour de vrai. Tu reprends une gorgée. Tu réfléchis. Tu le scrutes pendant quelques secondes, t’essayes de te souvenir où est-ce que tu aurais pu déjà l’avoir vu. Puis tu te dis qu’au final ça n’est pas ton problème, parce que toi tu n’as rien à cacher à ce niveau-là, t’es libre comme l’air. Tu fais un quart de tour sur ton tabouret, ça tangue. T’as même renversé quelques gouttes de ta boisson sur la petite robe noire que tu portes. Tu te stabilises puis lui demandes.« Ça vous dirait d’aller dans un endroit plus calme ? » Tu penses à ta petite maison à quelques rues d’ici. T’espères juste que ce type n’est pas du genre bizarre et tu te promets de garder ta baguette à proximité au cas où.  

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« Qu’est-ce que l’on obtient quand on mélange le Pouvoir et pouvoir ? » C’était une question que le paternel avait posé de sa voix la plus claire lorsque tu avais douze ou treize ans. Impossible de se souvenir avec exactitude du moment mais c’était au début de l’adolescence, au sortir de l’enfance. Il s’était assis sur son fauteuil, celui qu’il utilisait toujours pour t’instruire de choses et d’autres. Tantôt de la responsabilité d’un sang-pur face à la chute de la civilisation sorcière tantôt sur des questions plus personnelles et intrinsèques. Elles ne concernaient parfois que le fondement de la constitution de ce qui faisait un homme.  Profondément, tu avais l’amour de ces discussions parce qu’elles permettaient à ton jeune cerveau encore en formation de s’abreuver à la source.
C’était une question en suspens, une question où la réponse n’avait jamais été très claire. N’avait jamais été donné même. Il s’était contenté d’ouvrir ses deux fines lèvres et de fixer de ses yeux profonds ton petit être en train de dévorer son verre de jus de citrouille avec l’appétit d’un ogre. « Tu comprendras, Augustus, tu comprendras un jour. » Puis il s’était replongé tout entier dans la lecture qu’il dévorait alors.

Et c’était une torture que de tâcher d’y trouver une réponse. Aujourd’hui même que le Pouvoir n’était plus une porte fermée mais plutôt une route sur laquelle tu circulais. Aujourd’hui même que pouvoir n’était plus une option mais une philosophie de vie, cette question venait toujours à étreindre tes songes et tes moments d’introspection. Nul doute qu’en mélangeant le Pouvoir et le pouvoir, on se retrouvait dans des situations comme celles de ce soir. Parce que c’était le Pouvoir qui coulait en toi qui autorisait que tu te comportes ainsi… Et c’était de pouvoir le faire qui rendait cet instant autrement plus excitant que tout le reste. « J’aime quand les planètes s’alignent ainsi. » Réponds-tu en mimant son clin d’œil. A croquer. Elle est à croquer et tu voudrais bien la glisser sous tes dents. « La tristesse vient de la solitude du cœur disait Montesquieu. Et j’en partage l’analyse. Il n’y a rien de pire que la solitude. » Approuves-tu d’un signe de tête. A quoi joues-tu ? Citer Montesquieu, cet auteur classique mais moldu dans un bar de cet acabit ? Les débiles qui servent et les débiles qui boivent pourraient bien décider de sortir les fourches pour te repousser vers les faubourgs bourgeois dont tu es issu. Quand citer des auteurs devient un crime, la crise de régime n’est pas loin. Le groupe est bruyant, bien trop bruyant. Ils s’amusent à boire et à brailler. Aussi tu marques une moue étonnée lorsqu’elle s’exprime. Parce qu’il semble avoir entendu qu’elle partage sa couche avec d’autres moitiés. Intéressant… La tâche devrait être moins ardue que prévu penses-tu. « Je vois que vous profitez des bons côtés de la vie, Agatha. C’est une très bonne chose. Que les rustres m’enquiquinent à ne voir que l’amour par le prisme de la fidélité. » Hypocrite ce sourire qui s’affiche sur tes lèvres. Parce que si Emma venait à se montrer avec les jeunes hommes comme tu pouvais l’être avec les jeunes femmes, il n’y aurait pas de pardon possible. Il n’y aurait pas même de procès ni d’enquête parce qu’elle pourrait disparaitre de la surface de la terre. Voilà le résultat de l’addition du Pouvoir et de pouvoir réfléchis tu en avalant une gorgée d’Arnold Palmer. La limonade picote la bouche tandis que le thé glacé rend le palais délicat et sucré. C’est un divin mélange qui ne vaut pas le Whisky Pur Feu que tu gardes à la maison mais c’est tout de même agréable pour ne pas s’enivrer. Les moyens que tu possèdes en bas doivent être opérationnels. C’est la règle fixée. « Oh vous savez… » Tu prends une mine renfrognée. La commissure des lèvres se meut presque en une moue ravagée. Tu passes une main dans tes cheveux et pose l’autre sur le comptoir. « Ma femme n’est plus de ce monde ma jeune amie… Une dragoncelle foudroyante il y a quelques années de cela… » Jouer au veuf épleuré est un moyen certain d’attendrir même les cœurs les plus fermés. C’est un moyen d’arriver aux immondes fins qui sont les tiennes. « Je n’ai jamais retiré l’alliance pour ne pas vexer ma belle-famille… » Dis-tu en agitant la main où trône l’anneau scellant l’union maritale. Goujaterie sur goujaterie. Rien n’est épargné à la belle blonde assise devant toi. Ta main dans ses cheveux et ton nez sur la nuque. Voilà bien les seules envies qui traversent ton corps. Oh… Quoique d’autres viennent s’y ajouter. Plus basses et plus viles.

Elle renverse quelques gouttes sur sa petite robe. Pas véritablement grave… Il n’y a pas besoin de robe pour les réjouissances annoncées. Le groupe est toujours aussi bruyant et l’envie est terrible de fumer un peu la pipe. Elle s’est tournée vers toi, sa petite silhouette charmante invitant aux plus beaux émois. Sa petite poitrine qui a dansé lorsqu’elle s’est retournée est merveilleuse. Un sourire s’étend sur ton visage lorsqu’elle propose l’invitation. Parce qu’elle est en chasse aussi. L’endroit plus calme est une destination pleine de promesses. Promesses qu’il ne faut trahir sous aucun prétexte à contrario d’un mariage englué. « Oh… Mais je ne rêve que d’un endroit calme… J’ai toujours eu en horreur les endroits trop bruyants. » Ton petit sourire s’étire encore lorsque tu poses la main sur son épaule. « Chez moi c’est impossible… J’héberge mon frère en ce moment… Et comme je n’ai qu’une seule chambre… » Tu n’as honte de rien, c’est même à cela que l’on reconnait Augustus Parkinson. Tu prends les devants encore une fois en murmurant à son oreille. « Allons chez toi… J’ai très envie d’un calme ardent. » Puis la main glisse sur son dos comme pour l’inviter à se lever.

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Toi aussi. Parce que tout semble facile ce soir. Tu es tombé sur le beau gosse directement, sans passer par la case « gros lourd » à laquelle tu as souvent à faire quand tu viens au bar. Parfois, ça te fait rire, parce que t’as l’impression d’être un peu exceptionnelle quand plusieurs gars viennent te draguer d’affilée. Parfois, ça te fait clairement chier, parce qu’il y en a qui se montrent beaucoup trop insistant. Tu as l’alcool qui floute légèrement tes pensées. Tu es au ralenti, mais tu as l’air d’être entre de bonnes mains, ça te rassure un peu. « Moi aussi et c’est plutôt rare, surtout dans un endroit comme celui-ci. » Ton regard fait le tour de la pièce où la majorité des groupes sont bien trop éméchés. John cite du Montesquieu et tu ne peux t’empêcher de sourire. « C’est bien vrai. » C’est ce que tu penses, c’est ce dont tu as horreur et pourtant, tu y sembles forcée. Ne pas trouver ta moitié et errer sans fin pour avoir un peu de compagnie. Il parle de fidélité comme si c’était complètement démodé. Tu ris, parce qu’il a tout intérêt à ce que tu vois les choses de la même façon que lui. En vrai, tu crois à la fidélité lorsqu’elle est brandie sous la bannière de l’amour. « Je n’ai surtout pas encore rencontré la personne qui m’y fera croire, je pense. » Tu es une menteuse, parce que pendant trois années, tu n’avais vu qu’à travers Anna. Parfois, ça avait été compliqué, mais tu n’avais jamais cédé, jusqu’à cette dispute fatidique où tu avais baissé ta garde pour aller te réconforter dans les bras d’Ephy.

Tu as répondu à sa question, il se doit de répondre à la tienne. Son visage change alors qu’il explique que sa femme est décédée quelques années auparavant. Tu le sondes, mais tu n’es pas certaine que tous tes sens soient en éveil avec tout l’alcool que tu as ingurgité. Il te montre son alliance, un soi-disant hommage à cette pauvre femme qui aurait péri. Tu n’aimes pas être prise pour idiote, alors au cas où tu te penches vers lui et murmures. « Soyons clairs, John, dans l’état actuel des choses, je m’en fiche complètement que ça soit vrai ou pas. » Puis tu reprends ta place, un sourire en coin qui illumine ton visage.

Contre toute attente, tu lui proposes de changer de lieu. C’est plutôt rare que ça vienne de toi, mais tu ne sais pas pourquoi son aura t’attire particulièrement. Un frisson te parcourt lorsqu’il pose sa main sur ton épaule. Il te sert une parfaite excuse pour ne pas t’accueillir chez lui. Ça tombe bien, tu es plutôt rassurée à l’idée de l’emmener chez toi. En général, les psychopathes ont plutôt tendance à entrainer leurs futures victimes sur le lieu de leur choix. Son oreille murmure, alors que sa main glisse le long de ton dos et tu frémis d’impatience. Tu poses ton verre sur le comptoir et te lèves un peu trop brusquement, la pièce tangue. « Allons-y ! »

Tu avances jusqu’à la sortie, très concentrée sur chaque pas pour ne pas trébucher. Une fois dehors, l’air frais ravive un peu tes sens. Tu lui tends la main. « Tu me suis ? » Tu transplanes juste devant ton domicile. Quelques marches vous séparent de la porte blanche que tu ouvres d’un coup de baguette. « Bienvenue chez moi ! » Cette maison, c’est ta fierté personnelle, parce qu’elle n’appartient qu’à toi et elle ne ressemble qu’à toi. Il y a encore des livres posés sur la table baisse du salon accompagné d’une tasse vide, qu’on peut apercevoir de la petite entrée. Ton regard se recentre sur John, ses deux billes bleues semblent te pénétrer et tu détournes le regard, gênée par tant de profondeur. « Je vais enlever ça, parce que j’en peux plus. » Tes talons n’ont fait que te déstabiliser depuis le début de la soirée. Alors que tu commences à les retirer, tu trébuches et atterrie sur lui. Ta poitrine contre son torse. Ta main s’est rattrapée à son épaule. Un faible chuchotement sort de ta bouche. « Désolée. » T’es pas si désolée que ça, Agatha. Une seconde suspendue, pincement dans les entrailles, tes yeux ancrés dans les siens. Brusquement, tu rapproches tes lèvres des siennes. La tiédeur de ta langue vient titiller la sienne, alors que tu glisses tes mains dans son dos.

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Tu tournes en rond. Vie cyclique. La solitude que tu fuis revient t’écraser à chaque fois. Même rengaine qui tourne en boucle dans ta tête. Plus rien ne soulage ta peine. Edna est partie et elle a pris ton sourire avec elle. La tristesse laissant des marques sur ta peau. Ta mine d’ordinaire chaleureuse transformée. Faux-semblants, faux sourires. Des hochements de tête à ceux qui veulent savoir comme tu te portes. Question posée par véritable intérêt ou par simple curiosité, tu n’y réponds jamais sincèrement. Seules tes sœurs savent ce qu’il se passe au fond de ton cœur. Ton palpitant brisé, en miettes, qui ne peut plus battre comme avant. Edna est partie et elle a emporté un morceau de ton cœur aussi. Elle était ton double, celle avec qui tu partageais tout. Tu pensais que c’était réciproque, peut-être pas finalement. La dureté de la réalité qui te rattrape sans cesse.

Cette soirée est d’une tristesse. La veille de ton anniversaire : événement attendu d’ordinaire, souffrance aujourd’hui. L’alcool t’aide à faire passer la peine. L’alcool t’aide à mettre un peu de côté cette tristesse qui ne te quitte plus. L’alcool t’aide à ne pas freiner tes pensées les plus sombres. Tu en sens les effets. Dernier verre bu cul sec pour un départ précipité. Pressés par l’envie. John qui t’accompagne bien volontiers. Vous entrez dans ta demeure sans prétention. Maisonnette qui te ressemble. Couleurs douces, meubles blancs anciens et objets qui traînent par-ci, par-là. Tu aimes cet endroit, parce qu’il est à toi. Fierté d’avoir la chance de posséder ton petit cocon, tu t’y sens bien. Malheureusement, la solitude te pèse encore, même ici. Tu trébuches, perte d’équilibre due à l’alcool. Ça tangue sévèrement pour mieux atterrir contre lui. Vos bouches qui se découvrent pour faire augmenter la tension qui vous lie. Immédiatement, les soucis disparaissent. Envolées les pensées qui t’assaillent. Évaporées les préoccupations qui te hantent. Ses lèvres qui caressent ta peau dénudée par ses gestes appliqués. Un frisson parcourt ta colonne vertébrale à chaque fois que sa bouche rencontre ton épiderme. Venir chercher son visage, pour retrouver le contact de ses lèvres. Tes doigts glissant dans ses cheveux, puis lui retirant sa veste. Espérant qu’il ne soit pas maniaque, car elle tombe par terre en un tas chiffonné. Des mots susurrés à tes oreilles. Des mots qui te font frémir. Chaleur venant titiller ton bas-ventre, prémices du désir qui va s’étendre encore. L’attirance pour tout son être que tu connais pourtant si peu. L’envie de le découvrir sous toutes les coutures, juste pour cette nuit. Quelques heures d’évasion en promesse. « Suis-moi. »

TW : sexualité

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