temporalité du rp : septembre 1964
personnages concernés : @vivian mcintyre & @Elias Thackeray
trigger warnings : —
intervention autorisée du mj : [ ] oui [•••] non
autre(s) : le rp se situe 02 semaines après le mariage de Vivian & Keir

IN FOR THE KILL - 2021-2022

Lèvres purpurines répondent au baiser volé par l’époux, quand les phalanges de la jeune mariée ne manquent pas de s’égarer sur la joue mal-rasée de ce dernier. C’est à peine un effort qui est demandé pour maintenir la promesse tacite glissée à l’oreille, dans le creux des draps et des bras, c’en devient presque naturel, et la nouvelle McIntyre espère que le fruit de leurs efforts ne tardera pas à venir arrondir son ventre. Mais il est bien trop tôt pour le dire. Une semaine à peine s’est écoulée depuis le mariage. Et tandis que la porte se ferme sur un époux qui s’en va travailler, l’abandonnée, elle, dépose sa tasse de thé dans l’évier et entreprends de débarrasser le petit déjeuner avant de vaquer à d’autres activités bien moins plaisantes. La pensée la taraude depuis plusieurs jours, depuis le jour des noces en vérité, apparition malvenue de la seule et unique personne qu’elle ne voulait pas voir à son mariage. Il avait suffi d’un regard, puis d’une parole pour qu’elle comprenne que rien ne serait jamais plus pareil. Elias était sorti de son sommeil, et elle ne pouvait pas laisser la situation demeurer plus encore en suspens. Elle avait su répondre à certaines questions quand il ne se souvenait de rien, elle ne pouvait plus éluder celles qui étaient restées en suspens maintenant qu’il se remémorait sa vie d’avant, et plus encore, leur lien. Attrapant le téléphone d’une main, elle ne tarda pas à composer le numéro qu’elle connaissait par cœur, une voix ne manquant pas de répondre au bout de quelques sonneries, terriblement familière. À peine le temps d’un souffle qu’elle reposait le combiné sur son socle. Elle n’avait besoin que de cette confirmation, quand ses petites mains lui avaient pourtant soufflées à l’oreille les informations qu’elle n’avait pourtant pas demandées. Le garage du village avait bien rouvert ses portes, et son propriétaire était de retour.

Ce ne fut pourtant qu’une fois douchée, parfaitement habillée et délicieusement maquillée qu’elle quitta la demeure qui était désormais la sienne, talons claquant avec habitude sur le pavé, robe noire à pois blancs voletant avec grâce au rythme de l’avancée de ses gambettes. Lèvres étirées pour saluer le bon voisinage, avant de finalement ralentir à peine le pas dans la rue de l’endroit où elle se rendait. Nul pour la voir franchir l’immense entrée où une voiture patientait, gueule béante, tandis qu’un homme s’occupait avec une infinie patience d’elle. Combien de fois avait-elle surpris Elias dans cette position ? Bien trop. L’heure pourtant, n’était plus à se laisser aller à la nostalgie. Elle se surprit pourtant à observer les moindres recoins de l’endroit, comme si elle s’attendait à ce que certaines choses aient changées…Sans que ce ne soit pourtant le cas. Tout ce qu’elle pouvait déterminer de cet endroit, n’étaient rien de moins que des souvenirs brûlants qui auraient sans conteste fait rougir une nonne. « Bonjour Elias. » finit-elle enfin par laisser échapper, s’attendant d’ores et déjà à affronter la fureur de ce dernier.

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Il a encore la hargne collée aux tripes. Comment pourrait-il en être autrement alors qu’il peut encore sentir le gout âpre de cette défaite qu’elle lui a imposée ? Poussé dans cette vie qu’il préférait éluder, prendre le temps de savoir s’il allait prendre de nouveau contact avec sa famille. Avec elle. Son existence était-elle seulement réparable en un sens ? Des bouts de scotch rapidement ajoutés, c’est bâclé, ça tient à peine début, tangue sous le poids des tourments qui l’assaillent depuis qu’elle l’a aidé à retrouver la trace de celui qu’il fut jadis. Ce ne sont pourtant pas des remerciements qu’il lui a jetés au visage, pas alors qu’elle avait ce sourire heureux aux lèvres, pas alors qu’elle se paradait aux bras du McIntyre dans sa tenue nuptiale. Première gifle qu’elle lui a assénée. Celle pour laquelle il s’était jeté dans la gueule du loup, emportant avec lui les promesses qui n’avait pas eu le temps de prendre leur envol. Mots enterrés en même temps que le cercueil vide qu’ils avaient enseveli. La seconde n’arrivant alors qu’il voulait pouvoir gouter au doux sucré et voluptueux de la revanche en se pointant à la fête. Ne dissimulant pas sa colère alors qu’il était venu faire tache au mariage de la belle à dessein. Grand bien lui fasse.  Après tout, c’est grâce à elle qu’il se souvenait de ce qu’il était avant, que les souvenirs mordants venaient le hanter lors de ses nuits sans sommeil. Alors oui qu’il était venu pester et la maudire pour ce qu’elle avait osé lui faire. N’hésitant pas à lui faire comprendre qu’il ne savait que trop bien le passé lourd pesant entre eux deux avant qu’elle ne le pousse sur le devant de la scène sans lui laisser le choix des armes. Affront ajouté à la montagne qu’il pouvait déjà lui reprocher. Le liant dans ce village qu’il aurait pu autrement laisser derrière lui une fois son fiel balancé. Elle ne lui avait laissée aucune échappatoire au loup, balançant le prédateur au milieu d’agneaux sans s’en rendre compte. Il pourrait en rire si cela ne le forçait pas à renouer avec celui qui mourut sous les crocs du loup cette nuit-là. Il n’était plus un chasseur. Il n’était plus celui qu’elle venait trouver, il ne lui restait qu’une famille pour laquelle il était devenu trop dangereux.

Et si elle lui avait tout prit Vivian avec l’assistance d’une Hécate riante, il n’allait pas courber l’échine pour autant, attendant le bon moment pour lui faire comprendre le fond de sa pensée. Elle était maintenant une heureuse mariée n’ayant plus besoin de lui, elle aurait pu le laisser quitter ce satané village auquel il avait toujours voulu échapper de toute façon. Mais non, il était maintenant le fils prodige, retrouvé qui se pointait le soir pour le diner pour rassurer sa mère. Il était le bougre trainant sa carcasse dans ce vieux garage poussiéreux qui malgré tout, trouva clientèle dès qu’il remonta le lourd rideau métallique. Et c’est là qu’elle vint le dénicher. Il l’éviterait presque, préparant ses couteaux pour mieux venir effacer ce sourire qu’il était certain de trouver dès qu’il poserait le regard sur elle. Le dos cassé, il l’entendit même avant qu’elle n’ose l’apostropher. Il aurait reconnu cette démarche n’importe où. Alors il peste le loup, pestant déjà sur la raison de sa présence. Il se redresse, sortant son visage de dessous le capot de la voiture avec u soupir, attrapant au passage un torchon pour s’essuyer les mains avant de se tourner pour lui faire face, le visage fermé et la mâchoire contractée à lui casser les dents. « Quoi ? Pas de voyage de noces ? On s’ennuie déjà avec son petit mari que tu viens te perdre ici ? Désolée Vivian, la voiture du maire n’est pas disponible si tu voulais épicer ton nouveau petit quotidien adorable. »

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Elle se refuse à la nostalgie, la Vivian, se refuse à songer à ce qui a pu être et ne sera jamais plus. Tête haute, le port altier, la silhouette fière et droite, elle s’aventure dans ce lieu de crasse où elle a tant aimé se perdre autrefois. Où elle ressentait le besoin de se perdre. Ce n’était pas tant pour le lieu en lui-même que pour l’homme qui en était le maître. Époque révolue. Quand a-t-elle cessé de l’aimer ? Elle se sent bien incapable de le dire. L’a-t-elle seulement aimé ? Plus d’une fois, trop de fois. Et ce n’était jamais suffisant pour le faire rester. Elle oblige son propre cœur à rester serein, son fard à ne pas ressasser les souvenirs d’antan, son esprit à rester droit dans ses bottes, à ne jamais dévier de la trajectoire. Tout est minutieusement calculé pour ne rien laisser paraître, comme elle a toujours si bien su le faire toutes ces années. Même durant les pires instants. Elle serre les lèvres, l’ancienne Dursley, alors qu’il se redresse et qu’elle toise son dos, puis sa nuque, et enfin son faciès. Elle prend son temps pour l’observer, pour jauger la situation et y répondre en conséquence. Toujours cette même barbe hirsute, ses lèvres serrées comme s’il se retenait de lui hurler à la face toutes les insanités du monde. Ce regard aussi dur que la roche. Il est en colère l’ancien amant. Elle devine bien pourquoi, et pourrait même s’étonner qu’il le soit, lui qui la connait pourtant mieux que personne, lui qui l’a façonnée pour moitié. Il savait à l’instant même où il a posé un pied au mariage qu’il perdrait la manche, qu’elle aurait toujours un coup d’avance sur lui, certainement deux. Les lèvres s’étirent d’un rictus poli sous sa diatribe où transparait tant de non-dits qu’elle ne peut s’empêcher de reculer de trois pas pour mieux se détourner et appuyer sur le bouton qui fermera l’intérieur du garage du monde extérieur, et plus encore, des oreilles indiscrètes. Certaines conversations ne regardent personne d’autre qu’eux, et elle doute qu’il accepte d’aller dans le bureau pour lui faire plaisir. Ou tout du moins, pas ce genre de plaisir… Car Dieu en est témoin plus qu’à son tour, les conversations sur le bureau n’ont jamais été de celles utilisant des mots.

Ce n’est qu’une fois le rideau de fer tombé au sol qu’elle relâche la commande d’une main distraite avant de se retourner de nouveau sur la fureur à peine entravée. « Sérieusement Elias ? Tu es jaloux ? » Car comment pourrait-elle penser autrement quand il s’en prend ouvertement à l’époux qui n’a de tort que de lui avoir passé la bague au doigt à la demande des anciens ? « Je constate que la mémoire t’est revenue, à moins que tu ne l’ait jamais vraiment perdue ? » L’accusation est à peine feinte, tandis qu’elle pose son sac sur le tabouret le plus proche, peu regardante sur le fait que celui-ci soit propre ou non. Il y a un temps pour jouer les parfaites petites bourgeoises, mais en compagnie du Thackeray, elle ne s’est jamais vraiment embarrassée de ces semblants. Elle marque un pas, puis deux, Reine dans un royaume qui n’est pas le sien. « À quoi est-ce que tu t’attendais Elias, à te pointer à mon mariage de la sorte ? Si tu voulais l’empêcher, ce n’est pas au vin d’honneur qu’il fallait venir, c’était au moment de l’échange des vœux, quand le prêtre demande si quelqu’un souhaite s’opposer au mariage. » Le regard se fait lourd de reproches, un vague instant, avant qu’elle ne reprenne. « Mais pourquoi diable l’aurais-tu fait n’est-ce pas ? » Logique.

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Il se fait mur de glace le Thackeray. Le soldat se tient fermement, campe sur ses positions alors qu’il se prépare déjà mentalement pour l’affrontement qui va suivre.  Car peu importe pourquoi elle est venue le trouver la nouvelle épousée, elle a le désavantage du territoire qui n’est pas le sien. Et il augmente ses chances d’en sortir entier ou ce qui y ressemblerait le plus en ouvrant en premier les hostilités. Le verbe pour toute arme pour le moment, tous deux ne savant que trop bien qu’ils n’en étaient pas restés là bien des fois, chose qu’il ne sait que trop maintenant que la mémoire lui est revenue. Première salve de lancer, il reste sur place, attend la réplique qu’il ne sait venir. Prenant tout d’abord la forme de la banalité avec laquelle elle baisse le rideau, sans lui demander son avis. Elle s’impose maitresse des lieux sans même connaitre la bête qu’elle enferme avec elle. La barbare prenant le pas sur la bourgeoise enrubannée. Mais elle ne s’arrête pas là Vivian, non, pourquoi le ferait-elle quand lui-même viserait la jugulaire si possible. Il ne nie pas être jaloux, lui qui a la très nette impression que l’on lui a tout dérobé. Mais face à l’accusation à peine voilée, les poings se serrent sur le tissu tâché de cambouis. « Comment oses-tu. » La bête gronde en ne la quittant pas du regard. « Tu ignores-tout de ce que j’ai vécu, des traumas qui ont fait que j'en ai oublié jusqu'à mon propre nom de famille, mais pas ton visage... Tout. Et pour qui cela est-ce arrivé je te le demande. » Elle semble avoir la mémoire courte l’ancienne Dursley. « C’est vrai pourquoi serais-je venu gâcher ta si précieuse fête ? Je me suis juste jeté dans la gueule du loup. Pas pour jouer aux héros, pas pour la gloire. Pour toi Vi. Toi. » Il s’avance d’un pas. « Je ne suis que le pauvre idiot qui est juste assez bon pour recoller les pots cassés et te sauver la mise. Le pion qui ne vaut pas que l’on sacrifie une paire d’escarpins… Pourquoi serais-je venu réclamer ce que tu n’aurais pas donné ? Tu savais que j’étais là, vivant, et tu m’as baratiné jusqu’au bout avec l’autre vieille bique ! » La hargne s’envole, les mots se veulent coupant, des coups de poings dissimulés sous des phrases trop longtemps refoulées. « Excuse moi de trouver que tu te fous bien de ma gueule ! »

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Comment oses-tu. Les lèvres s’étirent d’un léger soupçon d’ironie, d’un présage viscéral de rétorquer les mots violents. Elle ose s’élever dans ce lieu qui n’est pas le sien sur le papier, parce qu’au fond… elle comme lui savent parfaitement que le garage n’est rien de moins que leur forteresse de couverture dans lequel ils s’abandonnaient. Un parfum de « chez soi » sans vraiment l’être, aux fragrances piquantes, agressives… à son image à lui. Les prunelles céruléennes observent, surveillent, et les cils papillonneraient presque d’amusement. Elle note tout ce qui dénote dans l’attitude de l’homme qu’elle connait sur le bout des doigts. Son agressivité exacerbée qui se reflète dans le torchon qu’il tient à s’en péter les jointures, dans ce ton qui dénote plus que de la simple colère, mais une rage purement animale. Elle ignore ce qu’il a vécu, il le souligne bien, et elle crève d’envie de savoir tout et en même temps… rien. Les révélations seront forcément douloureuses, tant pour lui que pour elle. Mais la Barbare, elle, a besoin de savoir, a besoin de connaitre le moindre détail, de les assimiler pour établir la prochaine bataille. Les talons martèlent avec grâce le sol, à mesure qu’elle marche, s’occupe dans ce grand espace, sans jamais détruire la distance entre elle et lui, mais le faciès lui, ne se détourne pas un instant de son adversaire. Elle ne sait que trop bien que les mots bientôt, ne suffiront plus. Elle ne le coupe pas, pas un instant, mais ne peut empêcher son propre corps de se tendre sous les reproches, tique une nouvelle fois sous l’unique révélation qui pourrait faire fondre toute femme un tant soit peu niaise. « Oh je t’en prie Elias, épargne-moi le discours du preux chevalier tu veux ? Je ne suis plus la petite princesse qu’il faut protéger du grand méchant monstre, tu as fait ce qu’il fallait pour cela. » Il avait aiguisé la lame. Elle interrompt sa marche pourtant, lui fait face, front, alors qu’il s’avance d’un pas et continue sa méprisable diatribe. Les lèvres s’étirent de son plus mauvais sourire, alors qu’elle penche légèrement son menton vers le sol, signe qu’elle ne joue plus, qu’elle daigne accorder du crédit à son adversaire. Un pion ? Il avait été bien plus que cela sur l’échiquier. Le Roi qu’elle ne pouvait sacrifier, quand bien même elle ne pouvait souffrir qu’à chaque fois qu’il coure la gueuse. Le cœur toujours en miettes, mais toujours prêt à battre pour lui. L’avouer à voix haute pourtant… Que les saints lui pardonnent, elle avait appris à ses dépens que confesser ses faiblesses ne lui attirait jamais rien de bon. Elle se fissure Vivian, sous les coups de poings verbaux, elle craque alors qu’elle foule le sol des derniers pas qui la séparent du tout premier. L’index ne manque pas de venir tapoter avec virulence sur son poitrail, quand les prunelles ne quittent pas les siennes des yeux. « Tu m’as ABANDONNÉ Elias ! Comme tu le fais toujours depuis quinze ans ! Tu reviens, tu prends, et tu repars ! Pourquoi est-ce que cette fois aurait été différente hein ? La guerre, les marie-couche-toi-là, un loup-garou… Tu pars, tu m’oublies et tu reviens. Tu me prends tout et tu me brises le cœur, encore et encore ! » Le doigt qui frappe ne manque pas de devenir une main qui claque à plat contre le torse. « Est-ce que tu as la moindre idée de ce que moi j’ai vécu ? De te perdre et de chaque jour devoir faire comme si de rien n’était, de faire comme si ta perte n’était qu’une simple tragédie de plus de Godric’s Hollow ? » Nouvelle claque, au bras cette fois, alors que le regard se fait plus féroce encore. « Ne me reproche pas d’avoir fait ma vie quand tu faisais la tienne avec toutes les salopes du village dès que tu te lassais de moi ! Je n’allais pas être ta putain toute mon existence Thackeray ! » Qu’elle gronde, la rage jusque dans les viscères. Elle aurait bien des choses à dire elle aussi.

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Il est le prédateur dans cette salle que ne peuple plus aujourd’hui que des souvenirs qu’il aurait peut-être mieux fallut laisser enfouis et d’une carcasse métallique qu’il délaisse présentement pour la suivre du regard. Il sait qu’il pourrait faire des dégâts, maudit qu’il est, mais il n’oublie pas pour autant qui se trouve en face de lui. Et s’il connait ses tiques, ses manies et mouvements, pour les lui avoir appris après Blaise, des mois se sont écoulés depuis. Et il serait fou de croire qu’il est le seul changé par cette expérience ou le temps écoulé. Et alors que le mur s’abaisse, qu’il laisse doucement s’écouler le flot de colère contenue, elle se moque l’arrogante. Moque son sacrifice et la vie jetée en pâture pour qu’elle puisse continuer la sienne. Il grogne alors qu’elle ballait son geste avec désinvolture. Il n’est pas un chevalier, il ne le sait que trop bien. Mais elle dénigre l’une des seules choses de son existence de laquelle il pouvait tirer ce qui pouvait s’approcher à de la fierté. « Pas ton cul qui s’est fait botter cette nuit-là je te rappelle. Pas ton sang qui a coulé. » Il s’en était assuré. A ses dépens. Et si elle s’arrête un temps, ô comme il voudrait effacer ce sourire détestable de son visage, d’une manière où d’une autre. Choisissant de vider son sac avant d’en venir à des fins plus expéditives.  Il se contente de lui balancer son expérience, son ressenti avec toute la violence dont il peut être capable. Mais l’index accusateur rencontre son torse, veut le maintenir a distance. La mâchoire se contracte alors qu’elle lui balance ses accusations à la gueule, jusqu’à ce qu’il n’en puisse juste plus. « Abandonnée ?! TU M’AS LAISSE POURRIR DANS CETTE FORET SANS UN REGARD EN ARRIERE ! » Le ton monte, la voix claque, se réverbère contre les murs nus. La rage se fait brulante alors qu’il s’avance pour mieux la faire reculer, faisant fi des coups reçus. Il reste muet un temps abasourdi parce qu’elle ose lui dire. Il mache grossièrement ses mots se retient à grand peine de la coincer contre un mur pour qu’elle entende enfin ce qu’il a à dire. « Je prends que tu dis… As-tu seulement pensé qui à tout perdu dans cette histoire Vi ? » Il ose à peine inspirer de peur d’exploser. « M’as-tu seulement une fois, une fois, fait part de quelconque sentiment à mon égard ? Non pas que je sache. Te basant juste sur la réputation que j’avais à l’époque et ne cherchant pas plus loin. Comment voulais-tu que je devine que ce petit arrangement ne te convenait pas ?! !que je cherche plus loin quand dès la première fois, tu m'as bien fait comprendre qu'on ne mange pas de ce pain là par chez toi !» Ses phalanges deviennent exsangues à mesure qu’il s’explique. Il ne la laissera pas le dépeindre comme le méchant de l’histoire. Pas cette fois. « Qui a été là à chaque fois que tu en avais besoin Bordel ?! Je ne suis pas Blaise, je pensais que tu l’avais compris depuis le temps. » Le torchon finit au sol alors qu’il va piocher un objet dans sa poche avant de fourrer l’écrin dans sa main et de s’écarter. « C’est la seule chose qui ne pas quittée depuis l’attaque, mais c’est vrai que je ne suis qu'un connard qui fourre chaque trou qui passe, qu’est-ce que je pouvais bien en avoir à faire de ta gueule… Au moins, moi, j’avais eu le courage de vouloir agir selon mes sentiments. Faut croire que c’est encore trop te demander.»

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Elle ignore encore qui il est devenu, ce qu’il est devenu, mais elle le connait son premier amour. A toujours su qui il était, l’impulsivité dont il pouvait faire preuve à bien trop d’égards. Était-ce pour cela qu’elle était tombée amoureuse de lui ? Ou pour le visage caché, celui qu’il ne lui montrait qu’à elle lorsqu’ils étaient isolés du reste du monde ? Il avait grignoté chacune de ses résistances, chacune de ses barrières. Une par une. Ce qui n’était au départ qu’une découverte, un désir d’apprendre et de comprendre une parcelle de la vie, était devenu bien plus. Si elle avait eu le choix, elle aurait fini par refuser d’éprouver le moindre sentiment : ce n'est jamais qu’une faiblesse de plus, de la torture, la pire des souffrances. Les dégâts laissés sur le passage étaient trop importants pour être ignorés. Qu’avait-elle ressentie lorsqu’il s’était jeté devant elle pour la protéger ? Surprise, choc, désarroi, désespoir. Le tout caché sous un masque bien trop important pour être levé. « Je ne t’avais rien demandé !! Tu aurais dû laisser ce putain de loup me prendre moi ! » Qu’avait-elle à perdre à prendre sa place ? Il ne l’aimait pas, elle avait perdu déjà bien assez, jusqu’à son âme… Perdre la vie… Ses parents auraient pleurés, certes, mais qui d’autre ? La bande de gamins qu’ils étaient autrefois se seraient simplement souvenus de la fausse princesse qu’elle était, des jeux d’enfants auxquels elle participait et rien de plus. « Je ne t’ai PAS laissé pourrir sans un regard en arrière !! J’ai envoyé tous les braconniers à ta recherche Elias ! TOUS ! Chaque fois que j’allais dans cette forêt maudite, je prenais le risque de trouver ton cadavre ! » Et il a beau tenter de la faire reculer, elle se refuse à lui céder le terrain. Elle hausse le ton, elle frappe la Vivian, mais pas assez fort encore pour faire mal. « Tu as tout perdu ? Je t’ai perdu Elias ! Et tu n’avais pas l’air en si mauvaise forme lorsque tu es revenu ! Ne me fais pas croire que tu as vécu tel un ours dans cette forêt ! » Cela, elle ne pourrait le croire. Elle lui en veut au Thackeray. Elle lui en veut d’avoir survécu sans même chercher à la retrouver, alors qu’il se targue de la voir dans ses rêves. Elle ne veut pas savoir qui a pris soin de lui, l’a soigné, l’a nourri. Les réponses ne seront que trop douloureuses. L’amour est douloureux, elle aurait préféré ne rien ressentir.

Elle darde ses prunelles dans les siennes alors que ses phalanges claquent contre la carcasse. C’est familier, naturel, et surtout, c’est une proximité qu’elle n’espérait plus, qu’elle n'a plus le droit d’espérer. « Le simple fait que je te revienne à chaque fois aurait dû te mettre la puce à l’oreille Thackeray ! Quelle fille de bonne famille irait se compromettre sans cesse dans les bras d’un homme si ce n’est par amour, espèce de crétin borné et stupide ! » Elle blanchit un instant sous le nom honni, celui que l’on ne doit pas prononcer devant elle. Elle se recule, parce que c’est bas comme attaque, parce qu’il sait le traumatisme engendré par le sorcier. Elle n’a pourtant pas le temps de tourner la langue dans sa bouche pour rétorquer qu’il lui fourre quelque chose dans la main. La surprise envahie un instant son regard alors qu’elle observe le petit écrin posé avec virulence dans sa paume. Elle perd de ses couleurs Vivian, à mesure qu’elle prend conscience de ce que cela peut être. Curiosité l’emporte alors qu’elle l’ouvre et se fige. Bijou magnifique qui aurait sans aucun doute parfaitement orné sa phalange. Elle reste silencieuse un instant la nouvelle McIntyre, la tristesse au fond des prunelles. Elle la sent, cette larme silencieuse, mais c’est bien trop vite la rage qui reprends le dessus, alors qu’elle referme l’écrin qu’elle garde dans sa main, resserre les phalanges dessus et ne manque pas de détruire la petite distance entre eux, main venant claquer une nouvelle fois sur son torse. « IDIOT ! CRÉTIN ! IMBÉCILE DE THACKERAY ! » Qu’elle assène avant de se pencher pour attraper une de ses chaussures et lui balancer dessus, tout en jurant, insultant comme jamais, l’autre talon ne manquant pas d’attaquer l’homme. Il devrait certainement remercier Dieu qu’elle n’ait pas ses lames avec elle. « TU ES L’HOMME LE PLUS STUPIDE QUE J’AI RENCONTRÉ ! » Elle ne manque pas de le pousser, la fureur venant encadrer son visage, son beau chignon venant se défaire sous la virulence de ses attaques. Elle se recule, l’étincelle de fureur dans ses prunelles céruléennes avant de se diriger vers son sac pour lui jeter au visage. Il y a bien d’autres objets à lui jeter dessus dans le garage, mais elle n’a pas encore jeté son dévolu sur les outils. « Quinze ans Thackeray !! QUINZE ANS !! Et tu oses me balancer ça MAINTENANT ?? Tu oses me dire que c’est MOI qui suis cruelle ?? Tu n’as jamais voulu de ce genre de vie ! » Elle attaque une nouvelle fois la Vivian, utilise ses mains – dont l’une tient toujours l’écrin fermement – pour le repousser.

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Il n’est pas un homme bien. Il le sait bien, et il le prouve encore une fois. Pourtant il a l’audace de penser que tout n’est pas à jeter chez lui lors de ses bons jours. Que tout n’est pas qu’ombres putrides et effrayantes. Comme ces fois où il l’a aidée à se reconstruire. Comme cette nuit où il s’est interposé entre elle et la bête. Et le fait qu’elle le lui reproche, bordel, ce que ça faisait mal. Bien plus qu’il n’était prêt à l’admettre, plus qu’il ne le lui dirait jamais. La mâchoire se contracte alors qu’elle lui renvoie la même rengaine dans la tronche. Dialogue de sourd qu’il voudrait faire cesser d’une façon ou d’une autre. « Jamais. Au cas où tu n’aurais pas remarqué, en général on protège les arrières des personnes auxquelles on tient Dursley ! » L’ancien patronyme sort autant par automatisme que pour narguer le nom de l’épouse qu’il vomit sans s’en cacher. « On aurait perdu une personne bien plus importante qu’un simple soldat, et je t’aurais perdue toi ! » Il ne sait pas quoi déblatérer de plus pour que cela s’ancre enfin dans son crâne.

Le ton monte, les barrières de la bienséance s’effondrent alors qu’il tente de lui faire comprendre son point de vue en envahissant son espace personnel, tentant de la faire reculer. « Pas franchement les propos que tu m’as tenu au cimetière. » Qu’il lâche avec simplicité. Simple énonciation des faits. Il n’a pas oublié leurs retrouvailles et le goût amer qu’elles lui laissent maintenant dans la bouche. « Tu m’as perdu ? Bordel, ces dernières semaines j’étais juste sous ton nez ! J’étais là ! Est-ce que tu m’as seulement regardé une seule fois avec autre chose que la distance calculée que tu m’as réservée depuis mon retour ? Tu craignais quoi au juste ! » Il pouffe le Thackeray, c’est jaune, sarcastique, amer. « J’avais oublié qui j’étais. C’est quoi ton excuse ? As-tu seulement attendue deux semaines avant d’accepter les fiançailles par égard pour le défunt où tu as accepté après la cérémonie ?! Est-ce qu’on m’a soigné ? Oui Vivian. On m’a appris ce que j’allais devoir affronter aussi à l’avenir… Mais je ne me suis promis à personne durant ces derniers mois ! Moi ! » Les poings se serrent alors qu’il se retient à grand peine de ne pas hurler ces derniers mots. Le mariage, la promesse d’une vie.

Il essuie les coups sans tressaillir. La laisse faire claquer sa carne autant que les reproches. « Je ne nie pas le fait que tu venais te perdre dans mon lit Vi. Mais c’est pas comme si tu avais été prête à t’afficher à mon bras. » Alors il vide son sac le chasseur, blesse alors qu’il dévoile enfin la vérité enfermée dans un écrin de velours qu’il lui colle dans la paume.  Il la laisse prendre le temps, succomber enfin à la curiosité non sans remarquer la perle rouler sur sa joue. Il demeure stoïque sous les attaques répétées. Les insultes. Il s’y attendait de toute manière. Mais il ne pouvait plus garder cela pour lui. Egoïste sans nul doute. Mais elle ne pourrait plus lui mettre des mots dans la bouche. Douter. Il finit tout de même par attraper ses poigner pour lui faire glisser les mains dans son dos pour qu’elle cesse au moins de le frapper un instant. « Parce que tu crois que je serais resté là quinze ans si tu n’y étais pas pour quelque chose ? Bordel ! La seule chose que je voulais c’était quitter ce trou ! Tu es partie Vivian, tu as fait le choix de revenir mais tu étais partie ! Et je voulais juste pouvoir t’accompagner si d’aventure tu repartais » Son visage s’approche, sachant pertinemment qu’il risque un autre coup plus violent en s’exposant ainsi. Les souffles se mêlent sans déraper pour autant. « Mais ce n’est pas comme si cela avait une quelconque importance maintenant n’est-ce pas… »

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Elle sent la moutarde lui monter au nez, Vivian, cette furieuse envie de lui en coller une au visage pour le faire taire, pour l’insulter, pour le punir de lui avoir fait croire à sa mort. Elle le déteste autant qu’elle ne peut que se réjouir de son retour. Car que serait la Barbare sans son bras droit, sans son diable d’épaule ? Sans lui, elle a l’impression de ne pas pouvoir avancer. Car lui seul connait son secret, lui seul sait les épreuves qu’elle a enduré, lui seul connait l’origine de sa haine envers les sorciers bien plus qu’envers la magie. Keir McIntyre a beau être son bras droit sur le papier, c’est Elias Thackeray qui tire les ficelles derrière le rideau. C’est lui son plus proche collaborateur. Ils n’ont de cesse de se renvoyer la balle, c’est insupportable. Mais la Barbare ne plie pas, jamais, pas plus que Vivian. Dans un cas comme dans l’autre, l’un aurait perdu l’autre. À croire que le ciel ne souhaite vraiment pas les voir ensemble. Serait-ce si dramatique si tel était le cas ? Ou n’est-ce qu’une autre série d’épreuves pour une vie meilleure ? Elle n’est pas aussi optimiste l’ancienne Dursley.

Elle laisse échapper un gloussement de mépris, Vivian, alors qu’il lui reproche encore et toujours les mêmes choses. « Tu parles de cette journée où tu m’as agressé parce que tu ne me reconnaissais pas ? » Elle l’a toujours en travers de la gorge, cet instant-là. C’est lui qui ne l’a pas reconnu, malgré ses beaux discours sur le fait de la voir en rêve et tutti quanti. Lui qui finalement l’a oublié. Puisqu’il semblait parfaitement bien vivre sans se souvenir d’elle, pourquoi l’aurait-elle empêché de reconstruire sa vie comme elle tentait de le faire ? « Et tu m’avais oublié Thackeray !! Que le ciel m’en soit témoin, c’était peut-être bien les projets du tout-puissant de veiller à ce que tu ne te souviennes de rien, et encore moins de moi ! Je ne t’ai pas menti que je sache Thackeray ! Ne t’ai-je pas dit que tout le monde te pensait mort ? Ne t’ai-je pas dit que nous couchions parfois ensemble ? » Non, elle ne lui avait pas menti. « La seule chose que je ne t’ai pas dite, concernait les chasseurs. Tu sais tout aussi bien que moi qu’ici-même on doit tout aussi bien se méfier de son voisin que des personnes de passage ! » Elle recule, comme s’il l’avait giflé, avant de s’avancer de nouveau vers lui. « Parce que tu crois que j’ai accepté ces fiançailles de gaieté de cœur ? Pour quelle raison aurai-je dû refuser, puisqu’officiellement jeune femme à marier ? Tu crois que ces derniers mois ont été amusants ? Tu crois que je couchais avec Keir alors que ta tombe était toute fraiche ? » Et si elle élude certains passages de sa diatribe, elle les garde toutefois en mémoire. Un jour peut-être, elle saura ce qui lui est arrivé durant ces derniers mois. Mais pas encore.

« Me l’as-tu seulement demandé Elias ? » Qu’elle rétorque, la tête haute. Elle n’aurait peut-être pas accepté au début, parce que rien ne laissait à penser qu’ils s’appréciaient. Mais avec le temps, les bons moments, et plus encore ces sentiments sans cesse naissants, pourquoi aurait-elle refusé ? Mais de lui, elle se remémore surtout les femmes lui tournant autour. Il n’a jamais été horrible à regarder, bien au contraire. Elle attaque Vivian, et pourtant, elle est encore si sage, loin de la violence dont elle pourrait faire preuve. Mais il pare, parce qu’après tout, c’est ensemble qu’ils s’entrainent depuis bien trop longtemps. Elle garde l’écrin en main, s’y accroche comme si sa vie en dépendait. Et si elle se calme un instant, les dents pourtant se serrent. « Tu ne voulais pas de cette vie Elias, tu n’en voulais pas ! Tu savais ce à quoi j’aspirais, tu savais que je voulais me marier, que je voulais fonder une famille, que je voulais des enfants. Mais pas toi ! » Qu’elle gronde, ses prunelles plantées dans les siennes. « Je suis tombée amoureuse de toi un nombre incalculable de fois, je couchais avec toi parce que je t’aimais et que j’espérais qu’un jour, tu changerais d’avis. Dieu m’en est témoin, je t’aimais Elias ! Mais jamais tu n’as montré le moindre signe que tu m’aimais en retour. » Qu’elle crache, pleine de fiel. « Et peut-être que finalement, c’était bien la volonté du ciel que l’on ne soit pas ensemble et que l’on ne puisse pas construire cela. Après avoir perdu notre enfant, c’est toi que j’ai perdu. J’aurai pu remuer ciel et terre que cela n’aurait rien changé. Tu as disparu dans la forêt, emporté par une bête monstrueuse. Si ça n’avait été toi, c’aurait été moi. Toi ou moi. » Qu’elle insiste, appuie sur les mots. Alors non, ça n’avait manifestement pas d’importance ce qu’ils voulaient ou avaient espéré. Elle se dégage, l’ancienne Dursley, elle se dégage et recule. « Blâme-moi autant que tu veux Elias, hais-moi de toute ton âme, mais n’oublie pas que je t’ai offert une chance de partir, je t’ai laissé le choix. Et tu m’as obligé à le faire pour toi. »

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La joute s’emballe, le rythme ne faiblit pas. Pas alors que la confrontation n’en est pas encore à son paroxysme. Il sait bien qu’il devrait redescendre le Thackeray, garder son venin et éviter de vider son sac de la sorte. Mais une fois le barrage cédé, il ne voit pas comment tenter de contenir l’inondation. Moyens bien dérisoires qui sont à sa disposition, où comment vouloir tenter de vouloir éviter le naufrage du navire en écopant avec ses mains. Dialogue à couteaux tirés que plus rien maintenant ne pourrait arrêter.  Les prunelles de mousse se lèvent au ciel. Comment peut-elle lui reprocher ce fait ? elle n’avait pas son excuse. « T’attendais-tu à autre chose d’un homme qui n’a plus aucuns souvenirs ?! Quelle est ton excuse à toi ? » Lentement, la moutarde pourtant lui monte au nez à l’ancien chasseur forcé au placard. Parce qu’elle a beau affirmer ne pas lui avoir menti, l’omission est un péché aussi grave à ses yeux. Elle ose mêler les questions mystiques pour se dédouaner de ses propres choix. Y voir un signe là où il ne voit qu’un manque clair d’engagement. Comme une honte qu’on ne cesserait de lui balancer continuellement au visage. La honte d’être avec lui, de s’afficher avec lui. Non pas que cela devrait le surprendre, pas après les ragots dont sa famille a si longtemps été la victime. « Tu as, et je te cite presque, dit que j’étais un passe-temps ou quelque chose du genre Vivian, une distraction. Ne va pas tout me mettre sur le dos. Pas quand ton comportement avec moi ne laissait rien supposer de plus alors que j’avais tant à perdre. » Car s’il a laissé un mot s’échapper sur son manque de repos nocturne, elle ne sait pas tout. Elle ne sait pas qu’il craignait sans même la connaitre la fureur de la Barbare si elle le découvrait, lui le nouveau maudit. Elle ne sait rien de ce qu’il risque en demeurant ici, de cette vie qu’elle pense retrouvée et qui pourtant, ne sera jamais la même. Et s’il sait pourquoi elle n’a pas parlé des chasseurs, elle ignore à quel point elle s’approche de la cruelle vérité.

Les dents se serrent. La mâchoire craque alors qu’elle évoque ce qu’il ne veut pas savoir. « On a toujours un choix. Tu n’es pas une marionnette que l’on dépose à l’autel il me semble. » Il s’en était assuré. « Et comment veux-tu que je le sache ? » La voix baisse d’une octave alors que son regard ne dévie nullement de son visage. Il n’aime guère penser à cela Elias, cette simple évocation lui donnant envie de défoncer un mur. Son visage se ferme un instant, parce qu’il n’accepte tout simplement pas les réponses qu’elle a à lui offrir. Excuses vites envolées.

« Ça marche dans les deux sens. » Qu’elle n’avait pas plus que lui fait les démarches pour rendre les choses plus officielles. Allait-il franchement risquer le ridicule alors qu’elle n’acceptait de le voir qu’ici ? Et s’il escalade dans ses attaques le loup, c’est bien pour éviter de finir à terre sans qu’elle l’ait entendu. Les choses pourraient basculer si facilement. Une étincelle et les coups pourraient pleuvoir, il le sait. Tout comme elle il présume. Traces qu’il faudrait ensuite expliquer cependant.  Ses poignets sagement maintenus, il ne tente pas de récupérer son bien, pas encore. Il la laisse cracher son venin, même si le mépris pourrait transpirer un instant dans son regard. Des enfants et une barrière blanche. Avec la vie qu’ils menaient. Il ne voyait pas quel cadeau cela serait-il que de laisser des orphelins. Mais elle enchaine, frappe et touche sa cible avec une information qu’elle ne lui avait jamais, jamais communiquée. Et de cela, il était certain. « Quoi ?! » Un gosse. Son gosse. C’est impossible. Il sait fort bien comment ce genre d’accident peut se produire, et pourtant, ils avaient été chanceux à ce niveau-là, du moins l’avait-il cru jusque-là. Sonné, il ne répond rien pendant un instant. La laisse se libérer de son emprise.  « Tu comptais me le dire un jour ? Ou c’est encore un truc que tu comptais me cacher jusqu’à ce que je finisse par me barrer ?! » Le ton monte encore une fois, un pas, deux, il s’avance, menaçant. Il avait le droit de savoir, elle n’avait pas à garder ça pour elle. « C’est arrivé quand ? Avant que je disparaisse ou tu as eu assez de chance pour que cela arrive quand tu me pensais froid et digéré !?! »

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Il y a beaucoup à dire, et pas assez. La rancœur est tenace, les blessures sont profondes. Elle est blessée Vivian, par tout ce qui fait Elias. Des années qu’elle se traine ses plaies, qu’elle les lèche en silence. Mais cette fois, c’est bien tenace, ça ne guérira pas de sitôt. Ça fait un mal de chien, et quand elle souffre, elle attaque celle qui était autrefois Dursley. Quelle était son excuse ? Méritait-il seulement qu’elle le lui avoue ? Il ne l’avait pas reconnue, la reléguant une fois de plus au second plan. Encore et toujours. Ce n’était peut-être pas de sa faute, mais elle avait espéré mieux, plus, tout. Jamais il n’avait eu de geste aussi virulent envers elle. Pas une fois en plus de vingt ans. « Mon excuse ? J’étais sur ta foutue tombe, persuadée que tu étais mort. Des mois que je traine cette pensée sans vouloir y croire ! Des mois Elias ! Et le jour où j’abdique enfin, tu réapparais ? Non pas que je te le reproche, soyons au moins clairs là-dessus ! » Qu’elle gronde. Elle se souvient avoir cru à un fantôme, une mauvaise plaisanterie, tout sauf la vérité. « J’ai cru que c’était une mauvaise plaisanterie, qu’on jouait avec mes nerfs, pire encore, qu’on avait pris ton visage ! Tu ne peux pas me reprocher de me montrer prudente ! » d’être paranoïaque même. N’importe quel sorcier pourrait sortir la carte de l’amnésie pour obtenir des informations. Elle comme lui se devait de réfléchir à toute éventualité et faire les sacrifices nécessaires pour préserver la communauté. Elle essuit les reproches, sans même s’en offusquer plus. « Et je t’ai dit la vérité ! Je venais chez toi, tu venais chez moi, on baisait ensemble, et l’un de nous repartait au petit matin comme si de rien n’était. C’est ce que l’on vit depuis près de quinze ans Elias. C’est ce que j’appelle un passe-temps ou une distraction ! À quel moment étais-je supposée savoir que tu me considérais comme plus que cela ? Au rappel, Thackeray, tu te permettais d’aller voir ailleurs. Et second rappel Elias, je ne suis pas aussi cruelle pour te faire croire que j’étais la femme de ta vie alors que tu ne te souvenais même pas de moi et que j’étais fiancée à un autre ! » Elle s’essouffle Vivian, parce qu’ils tournent en rond. « Tu sais quoi ? Désolée de ne pas être à la hauteur de tes espérances. Je ne peux pas être parfaite tout le temps. » qu’elle abandonne, lève les mains en gage de fausse paix. Elle n’abdique pas aussi facilement d’ordinaire.

« Oh que non Thackeray. N’essaie même pas de me faire culpabiliser là-dessus ! Je n’avais pas le choix quand j’ai accepté, et je n’allais certainement pas planter mon fiancé à l’autel sans une très bonne excuse. Si tu voulais empêcher ce mariage Elias, tu n’avais qu’à te pointer à l’Église. Tu avais retrouvé la mémoire si je ne m’abuse ? » qu’elle rétorque, pleine de fiel. Où était-il, quand il aurait pu empêcher les faux tourtereaux de convoler ? Elle ne lui offre pas de réponse à sa propre question. Elle n’est pas aussi mesquine. Elle pourrait lui dire que non, mais il ne la croirait pas. Pourquoi tenter même de démentir ?

« Revenir encore et encore depuis près de quinze ans n’était pas assez bon indicateur pour toi ? Il te fallait quoi ? Une pancarte ? » qu’elle assassine. Elle ne fatigue pas la Dursley, elle sait qu’il ne faudrait qu’une parole de trop pour que les gestes pleuvent. Les parades, les excuses, elle les a toutes trouvées. Des accidents de cuisine, de couture… maintenant que les sorciers sont officiels, ça n’en fera qu’une de plus. Peut-être même finalement, n’attend-elle que cela, de se battre avec Elias, de rendre des coups plus incisifs. À un moment donné, les mots ne suffisent plus, et elle a beau avoir l’apparence d’une lady, elle n’en est pas toujours une. La bombe est lâchée, et elle n’y croyait pas vraiment à ce qu’il abandonne. Elle ne se place pas vraiment en victime ayant besoin d’être réconfortée. Ses blessures, elle les lèche seule depuis Blaise. Elle n’a besoin de personne pour compatir, pour la rassurer, pour lui souffler que tout ira bien. Elle a pleuré la perte de cet enfant qui ne viendrait jamais dans le plus grand silence, elle a offert au monde entier un sourire, comme s’il ne s’était rien passé de grave dans sa vie. Pourquoi partager cette peine ? Pourquoi diable l’aurait-elle mis dans la confidence, lui qui de toute manière, n’en voulait pas ? Si elle comptait lui dire un jour ? « Je viens de le faire. Pourquoi, ça aurait changé quelque chose ? Il est parti et il ne reviendra pas. » qu’elle lui crache au visage. C’est un sujet sensible malgré tout. Un échec de plus dans sa vie, et Dieu sait qu’elle abhorre les revers. Mais il a le mot de trop, le Thackeray, et c’est la glace qui craque, la fêlure de trop. La gifle part seule. C’est le plat de la main, et pas le poing au moins. « Je t’interdis de prononcer un mot de plus à ce sujet Elias. » Qu’elle contrebalance dans une fureur calme. Elle l’esquive pour récupérer ses chaussures, qu’elle remet rapidement, avant d’attraper son sac pour y glisser l’écrin dedans. Elle met de la distance entre eux, s’en retourne vers la porte du garage pour reprendre la télécommande qui l’ouvrira. Elle veut seulement s’évader d’ici, respirer. Elle voudrait rentrer chez elle, pas dans cette maison où elle vit avec son époux. Juste chez elle, là où elle se sentait libre, là où parfois, il venait la rejoindre pour passer le temps. Elle évite son regard, l’ignore superbement, il n’y a plus rien à dire.

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A quoi s’attendait-elle en venant le trouver ici Vivian ? Des explications civilisées en face d’une tasse de thé fumante ? Il n’avait jamais été du calme posé et raffiné. Elle devrait le savoir. L’ancien chasseur étant bien plus du genre explosif que les culs serrés qu’elle pouvait parfois fréquenter avec sa famille. Le ton monte, claque contre les murs nus qui furent délaissés durant de si longs mois. Les blessures se dévoilent au grand jour et il ne fait rien pour empêcher cela, en rajoute une couche lorsqu’il ferait bien mieux de se taire et de la laisser retrouver son époux. Mais les lésions sont bien trop fraiches, la douleur bien trop nouvelle pour qu’il la laisse partir sans rien dire, sans se battre. Et s’il ne peut pas lui reprocher sa prudence, il peine à pardonner, digérer la distance imposée lorsqu’ils auraient pu avancer bien plus tôt. Que si l’un d’entre eux l’avait retrouvé avant, les choses auraient pu être différentes. Plus dangereuses, mais différentes. Car la prudence dont elle se targue est fine, bien plus qu’elle ne l’imagine, alors qu’elle se tient si près de ce qu’elle chasse d’ordinaire. « Ne dire que la moitié de l’histoire n’arrange pas les choses non plus. Une distraction n’aurait pas été là lorsque tu en avais besoin, et certainement pas tout ce temps. Et je n’ai pas non plus courut tous les lits de ce putain de patelin à ce que je sache ! » Il soupire le loup, se passe une main sur son visage las. « Ce n’est pas ce que j’ai dit, et tu le sais. » Qu’il n’a jamais été celui la renvoyant à cette image lisse dont elle faisait la promotion au monde entier.

« Et comment m’aurais-tu accueilli Vi ? » Certainement pas à bras ouverts. Et même s’il avait voulu arriver en trombe et tout faire s’écrouler, il n’en avait pas le droit. Pas après les mots qu’elle lui avait tenu, pas alors qu’il était presque certain qu’elle trouerait sa carne si elle apprenait son secret. « Si j’avais sorti cette bague, qu’est-ce que cela aurait changé ? Tu m’aurais frappé plus tôt ? »

Il souffle, prend le temps de répondre. « J’étais là. Pendant Quinze ans, j’étais là à chaque fois moi aussi. » Pas une fois il ne l’avait éconduite, lui avait toujours ouvert la porte. Ils avaient quelque chose, une ébauche, une ombre chérie mais jamais oubliée. Et s’il se savait en périphérie de son existence, il n’imaginait qu’ils en étaient là. L’information blesse bien plus qu’il ne voudrait l’admettre. Combien de choses taisait-elle encore ? Allait-il tomber de nouvelles découvertes à mesure que les jours passaient ? « Tu es vraiment obligée de jouer à ça maintenant ? Bordel, j’aurais au moins pu être là avec toi ! » Il abhorre l’image qu’elle semble avoir de lui, la colère s’exprime au moins autant que la déception. Qu’avait-il été ? Juste un bon coup que l’on vient voir de temps en temps ? Il avait été là après son épreuve avec Blaise, l’avait aidée à se reconstruire. Mais la confiance n’était pas telle qu’elle se serait confiée à ce sujet. La gifle part et il ne fait rien pour l’arrêter. Accepte le coup mais ne réplique pas. Ses paupières se ferment un instant alors que sa carne s’échauffe. Moment qu’elle saisit pour tenter de prendre la poudre d’escampette. « Ou quoi ? » Il la laisse s’approcher de la grille qu’elle a elle-même refermée sur eux deux, sans savoir que ce genre de matériel s’entretien, qu’elle ne pourra guère déguerpir d’ici sans aide. Qu’il n’est pas franchement enclin à lui apporter à la minute. « Tu as quelque chose qui m’appartient. » Lâche-t-il froidement. Changeant tout de même de sujet même s’il y reviendra à un moment. « Ca ferait doublon avec ce que tu as au doigt. »

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Elle a beau détester la situation, le ton, la gestuelle, les regards brûlants sont plus que familiers. C’est une routine dans laquelle elle a appris à se jeter à corps perdu, ce qu’elle a toujours aimé chez Elias. Sa façon de monter rapidement dans les tours et de lui montrer son authenticité. De la provocation pure et dure qui lui rappelle tout ce qu’elle a enduré pour être ce qu’elle est désormais. Elle était née pour être un diamant étincelant, parfait, finement sculpté, mais il avait veillé à ce qu’elle garde sa réelle nature en son cœur. Pour cela, elle lui serait éternellement reconnaissante. Pour cela, elle avait une dette envers lui. Peut-être bien deux même, si l’on compte cette nuit fatidique. Elle aurait aimé pouvoir payer sa dette. On ne peut pas dire qu’elle n’ait pas tenté par ailleurs, quand elle lui a offert la liberté de choisir, de partir ou de rester. Six mois durant, il avait vécu ailleurs après tout. Et si elle ignorait comment, avec qui… six mois, c’était long malgré tout, assez pour se construire une vie en parallèle. Et c’était peut-être bien cela qui lui faisait le plus mal finalement. Ils avaient vécu leur vie chacun de leur côté. « La moitié c’était déjà de trop. » Surtout pour son cœur autrefois fragile, surtout pour les sentiments qu’elle peinait à dévoiler, pour sa jalousie silencieuse. Elle n’a jamais pu lui dire les trois mots qui auraient sans doute changé la donne bien plus tôt, qui auraient peut-être empêchés Blaise de jouer avec elle. Et là encore, rien n’était moins certain. Ils auraient pu être, mais le destin, manifestement, en a décidé autrement.

Comment l’aurait-elle accueillie ? Assurément, elle aurait été en colère, terriblement en colère. Si un regard pouvait tuer, sans doute serait-il mort sur le coup. Mais d’un autre côté, n’est-ce pas une seconde chance que le ciel lui aurait accordée ? Celle de pouvoir choisir qui se tiendrait à ses côtés à l’autel ? Il ignorait tout de ces six derniers mois, il ignorait le calvaire que c’était d’avoir dû se faire accepter par le McIntyre, de la tension à chaque instant, même au jour du mariage où ni l’un ni l’autre n’était certain de se présenter pour le grand jour. Et sans doute ne lui dirait-elle jamais. Elle le jauge du regard, le Thackeray, avant d’ouvrir de nouveau la bouche « Est-ce que tu m’aimes Elias ? » La question est légitime. Après tout ce temps, y’a-t-il seulement des sentiments dans son cœur, ou n’est-ce que de la rancœur et rien d’autre ?

« C’est ce que je dis, Elias. Tu aurais pu me demander ma main chaque jour pendant près de quinze ans. Tu aurais pu me demander de t’épouser, comme n’importe quel idiot, avant de partir à la guerre, et j’aurai accepté, en stupide jeune fille que j’étais à l’époque. Je t’aurai dit oui, à chaque instant de ma vie. » Qu’elle lui reproche, se remémorant parfaitement chaque émotion qu’il a pu extirper du bout des doigts, d’un simple baiser, d’une simple caresse. « Tu as toujours été celui qui me connaissait mieux que personne, sans doute même mieux que moi-même, par tous les saints. Tu aurais dû savoir que même si j’éconduisais, j’aurai fini par accepter d’être tienne ! » Parce qu’elle lui revenait toujours, quoi qu’il arrive, et qu’il en allait de même pour lui. Il y a de la lassitude dans son palpitant, mais elle ne s’autorise pas plus de quelques secondes pour le regret. Elle n’en a plus le droit, plus maintenant qu’elle porte le nom d’un autre. Alors c’est la colère qui reprend le dessus. Elle l’assassine du regard, sans vouloir lui avouer qu’elle voulait être seule pour cette épreuve, pas parce qu’elle ne le jugeait pas digne de savoir, mais parce qu’elle ne voulait pas qu’il se sente obligé de quoi que ce soit. De changer d’avis parce qu’elle était en train de perdre la seule chose qu’elle voulait vraiment. Cette épreuve, c’était son fardeau à elle. Elle ne lui en voudrait jamais de ne pas avoir été là, parce que c’était son choix. Elle ne voulait pas de lui ce jour-là, parce qu’elle ne voulait pas lui infliger cette douleur, ou qu’il la voit dans sa détresse la plus grande. Elle ne rétorque rien, parce que l’idée fera son chemin tout seul dans sa tête. Mais comme toujours, Elias parle avant de réfléchir, tout comme elle, il cherche à blesser, mais elle ne le laissera pas l’atteindre, pas cette fois. Elle refuse cette attaque, préfère même partir avant que ça ne dégénère plus. Elle ne répond même pas, il sait ce qu’elle fera, il le sait parfaitement, puisqu’il la connait mieux que quiconque. Elle ronge son frein pour cette fois, parce qu’elle ne veut pas plus en parler. Elle veut seulement partir, tout a été dit selon elle. Elle retrouve de sa superbe sur ses talons, Vivian. Elle retrouve son visage de poupée parfaite, le rouge sur les joues en plus. Et tandis qu’elle attrape la commande pour ouvrir la porte, il ose une fois encore, attaquer. Elle n’appuie pas tout de suite sur le bouton, se contente de se retourner sur lui. Elle sait parfaitement de quoi il parle, ce bijou qu’elle n’a pas la moindre intention de rendre, parce qu’après tout, il lui était destiné n’est-ce pas ? Elle esquisse un rictus, alors qu’il lui rappelle sa condition de femme mariée. « Par chance, j’ai neuf autres doigts. » qu’elle assène, avant d’appuyer sur le bouton. Évidemment, il y a grincement, comme une lente agonie du métal qui peine à se soulever. Elle rappuie une seconde fois, puis une troisième, avant de comprendre qu’elle est coincée ici. Ou presque. Elle sait parfaitement qu’il y a une autre porte de sortie. Toujours. Elle a passé trop de temps dans ce garage pour ne pas s’en souvenir. Alors elle relâche la commande, dans l’idée de commencer à se diriger vers l’autre porte.

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Les hauts sommets de la colère sont faciles à reconnaître, à accueillir à bras ouvert pour s’y être perdus si souvent et si facilement tout le long de son existence. C’est une amie fidèle, toujours présente, tapie dans un coin obscur de sa psyché, bête avec laquelle il a toujours vécue. Celle-ci, il ne la connait que trop bien, sait comment réagir en conséquence. C’est une danse qu’il n’a que trop pratiquée avec Vivian. Connait chaque exclamation, chaque geste. Il pourrait même s’inventer médium en sachant déjà comment les choses vont se dérouler, quel autre objet elle risque de lui envoyer au visage avant qu’elle ne se décide enfin à utiliser ses poings comme il le lui a montré. Un échauffement comme un autre. Un entrainement juste un peu différent de ce qu’ils ont connu jusqu’alors. Le bougre soupire alors qu’elle se renferme encore une fois derrière ses murailles. « Facile à dire quand tu omets les aspects les plus importants Vivian. Comment veux-tu, comment voulais-tu que je devine ?! » Lui, la moitié d’homme. La bête qui n’avait plus toute sa tête. L’identité envolée, brume insaisissable qu’il avait peiné à attraper de ses doigts rendus malhabiles par cette renaissance accidentelle.

Alors il interroge, déjà certains de son sort. Condamné avant tout jugement. Son interrogation tient plus de la rhétorique qu’autre chose et ils le savent tous deux. Jamais elle n’aurait accepté sa demande s’il avait interrompu ses justes noces devant tout le village rassemblé. Au pire, aurait-il juste retardé l’inévitable et elle lui aurait arraché la peau du dos pour l’avoir fait. Il pare, la pousse dans ses retranchements sans tressaillir lorsqu’elle riposte enfin. Presque peiné qu’elle en vienne à se poser la question dont elle connait déjà la réponse. « Je pensais avoir été assez clair sans que tu aies poser la question. » Il s’avance, n’étant certainement pas prêt à faire la même erreur qu’elle. « Pourquoi crois-tu que je sois encore ici ? Ma famille n’a pas besoin que je vive ici pour me voir. » Elle serait même plus en sécurité s’il partait à quelques kilomètres. « Tu connais très bien la réponse. Tu veux l’entendre ? » Il mange du terrain le Thackeray. S’avance encore de quelques centimètres. « J’étais prêt à mourir pour la femme que j’aime Vi. Je suis encore là pour elle. Mais si cela peut te satisfaire me m’entendre le dire le premier, soit...Oui.. Je t’aime Vivian... Et bordel, tu le sais très bien. »  Il n’était pas certain que cela les fasse beaucoup avancer. Elle qui était maintenant liée à un autre. Homme auquel il rendrait visite incessamment sous peu. L’ami d’enfance ayant profité de la place vacante encore tiède.

Ses narines se gonflent alors qu’il expire lentement. Elle n’a pas changé à ce qu’il peu voir, toujours aussi bornée. « Peut-être qu’un homme doit être sûr qu’il ne va pas se prendre le râteau du siècle avant de poser un genou à terre ! » La voix se fait grondante alors qu’il visse ses prunelles aux siennes. « Que pour une fois, j’avais peut-être besoin que tu me montres que tu serais là, pas juste par dépit ou parce qu’un crétin t’a énervée lors d’une opération ! Et que tu ne sortes pas du garage ou de chez moi comme une voleuse… » La relation avait été suivie, durant des années certes. Mais jamais assumée. Couverte d’un seau bien trop lourd du secret. Qu’elle veille protéger sa réputation, il pouvait comprendre. Mais elle n’avait jamais formulé son souhait de voir les choses changer.

Il aurait pu en rester là. Cesser les attaques après la confession offerte mais qu’il lui reproche la seconde d’après. Le silence qu’elle utilise bien trop de fois à son avantage pour frapper ensuite. Mensonge par omission qu’il voudrait balayer de sa fureur. Mais il la laisse. La laisse frapper pour ensuite tenter de s’enfuir, sachant pertinemment qu’elle n’ira pas loin de toute façon. Pas tant qu’elle aura sa bague au doigt. « Et par ce que tu crois que ton cher petit mari ne va pas se poser de question ? Et penses-tu que je ne lui expliquerai pas sa provenance ? » Sa langue claque doucement contre son palais alors qu’il se déplace, se place sur son chemin pour éviter qu’elle n’emprunte la porte de derrière. Il pourrait réprimander une enfant qu’il n’agirait pas différemment. Il attend sagement qu’elle s’approche pour être à sa portée avant de barrer son chemin de son bras tendu. Son autre main se tend. « Si tu es si sûre de toi, rend la moi Vivian. » Parce que si elle lui reproche si fortement de ne pas avoir assumé leur relation, il ne serait que trop enclin à accéder à sa demande maintenant. Et à clamer que cette bague provient de lui. Et qu’un solitaire pareil parle de lui-même.

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Débat stérile, rien de bon à en tirer. Ils le savent tous deux, campent sur leur positionnement, quoi qu’il arrive. Têtes de mules. Vivian ne concède jamais de terrain, pas lorsqu’elle estime être dans son bon droit, pas lorsqu’elle est en colère comme elle peut l’être en ce moment, et certainement pas lorsqu’elle est blessée comme en cet instant. Elias est bien le seul à être capable de l’abattre aussi froidement, bien le seul à pouvoir dans le même temps, la faire glisser dans un état de paix. Un peu plus de quinze ans que l’affaire dure, perdure, persistera, et ce, malgré les récentes épousailles. Il a gagné le droit d’être dans le cœur de l’ancienne Dursley, gagné sa confiance éternelle, sa gratitude, son amour. L’affaire n’était pourtant pas dans le sac, enfance plutôt houleuse, désintérêt mutuel, les prunelles uniquement attirées par celui qui aujourd’hui, est l’époux. Amitié forte avant de devenir amour. Mais Thackeray ne s’imposait pas comme un ami, tout juste un adversaire de taille. Trop de facilités à batailler l’un contre l’autre pour envisager autre chose. L’adolescence leur avait pris cette innocence. Leur histoire n’avait pas même débuté sur la naissance d’un intérêt mutuel, pas le moins du monde, uniquement de la curiosité… maintenue jusqu’à ce qu’il parte à la guerre. C’était instinctif, elle lui revenait sans cesse, savourant la chaleur de sa peau, de ses baisers, de ses caresses. Elle avait découvert sa féminité dans ses bras et n’avait à aucun moment envisagé de s’en extirper. Les sentiments étaient nés après, entretenus, malmenés, profondément ancrés. Elle l’aimait, autant qu’elle pouvait le détester lorsqu’il lui brisait le cœur, encore et encore. Homme stupide. « Tu aurais dû le savoir !! » qu’elle assène finalement, brisée, frustrée, vexée. Il aurait dû savoir qu’elle était la femme de sa vie, l’élue de son cœur, parce que leur histoire n’avait alors plus aucun obstacle. Il aurait dû la reconnaitre, transcender l’ignorance. Il aurait dû être tout ce qu’elle n’était pas.

La situation était frustrante, agaçante. Désormais, son destin était lié à un autre, cet homme qu’elle n’aurait jamais pensé avoir pour époux un jour, hors d’atteinte depuis presque toujours. Mais Dieu en était témoin, ou au moins ses saints, ses anges… elle était son épouse légitime, quand ils auraient pu encore se rétracter à quelques minutes de la cérémonie. Si Thackeray était venu interrompre la cérémonie, pour sûr, elle lui aurait arraché les yeux, et en aurait eu de surcroit le cœur un peu plus brisé. Le destin ne voulait pas d’eux ensembles, pourquoi s’acharner à le défier ? Reste-t-il seulement quelque chose à sauver ? Il s’avance, et elle ne bouge pas Vivian, parce qu’elle ne recule que rarement, que lorsqu’elle perçoit le danger. Quel danger pourrait-elle associer au Thackeray ? Aucun, sinon celui associé à son cœur. Il s’avance et bientôt, c’est le visage qui se redresse pour suivre son avancée. Proche. Trop proche. Il est là, finalement, le danger, alors qu’il s’expose, et qu’elle ne peut que subir sa proximité, plus encore ses mots. Elle serre le poing alors qu’il lui souffle cette cruelle vérité, celle qu’elle a toujours eu besoin d’entendre et qu’il ne songe qu’à lui offrir maintenant. Les paupières viennent se fermer, mais l’espace de quelques secondes, alors qu’elle plante de nouveau ses prunelles dans les siennes, féroce, virulente. Il n’y a pas de réponse adéquate à cela. Elle pourrait lui souffler de partir, de la laisser en paix… mais elle n’est pas prête à le voir s’en aller. Pas encore une fois. Elle ne peut pas le laisser fuir, lui, son roc dans l’adversité, son phare dans les nuits les plus sombres. Elle ne rétorque rien, se recule, marque de nouveau une distance nécessaire entre elle et lui.

Et de nouveau, les choses dégénèrent, parce qu’ils sont ce qu’ils sont. Elle fronce les sourcils Vivian, et l’orage ne manque pas de s’abattre dans ses prunelles céruléennes alors qu’il ose lui reprocher d’être ce qu’elle est, ou n’est pas. « Pardon ?! Tu as donc si peu de foi en moi que tu es persuadé que j’aurai refusé ? » Elle est vexée Vivian, plus encore, elle sent les pluies de la tristesse s’abattre sur elle, alors qu’elle baisse d’une octave, que ses paupières papillonnent d’incompréhension, blessée par les mots qu’il ose lui jeter au visage. « C’est ainsi que tu me vois ? Une femme égoïste qui ne venait te voir que par manque de choix ? » C’était pour lui qu’elle venait, pour savourer la chaleur de ses bras, pour trouver le réconfort de sa présence. Pour sûr, elle partait toujours au petit matin comme une voleuse pour ne pas ébruiter leur relation, pour ne rien donner aux commères… Mais Godric’s Hollow était un petit village où les mauvaises langues vont bon train. S’il lui avait fait part de ses désirs, de ses rêves, elle aurait certainement envisagé leurs rendez-vous autrement. Cruel quiproquo.

La bataille est ardue, épuisante, alors qu’elle ne rêve plus que de partir, battre en retraite. Qu’y a-t-il de plus à dire ? Rien. Tout est dit, et les non-dits sont bien trop parlants. Elle retrouve de sa superbe dans sa fureur, alors qu’elle ose amorcer le premier pas de la retraite. C’est sans compter sur ce garage qui mériterait bien lui aussi d’être réparé. Elle claque de la langue, avant de jeter un regard en coin au propriétaire des lieux. « Laisse Keir en dehors de tout ça. » qu’elle exhorte. Parce qu’il n’a rien demandé, parce qu’il est lui aussi victime finalement de ce coup monté qu’est le mariage. Arrangement qu’il n’a pas demandé. Elle lui a proposé une solution qu’il a rejeté, trop honnête. Il ne mérite pas de subir la vengeance d’un autre. Elle cherche à fuir, et une fois encore, il se retrouve sur son chemin, proximité qu’elle pourrait éviter, mais ne s’en donne pas la peine. Elle le regarde, avant d’observer sa main tendue, de souffler du nez pour mieux se perdre de nouveau dans ses prunelles. « Nous savons tous deux que tu n’offriras cette bague à personne d’autre que moi. Même si tu rencontres une autre femme, tu ne pourras pas la lui donner, parce qu’elle m’était destinée. Je me trompe ? » Qu’elle gronde, égoïste. « Et je ne te laisserai pas la jeter, l’oublier dans ton tiroir de chaussettes, pas plus que je ne te laisserai la donner à quelqu’un d’autre. » Réminiscence d’un regret, d’un acte manqué. « Je ne serai jamais ta femme Elias, ça ne m’empêche pas de rêver que ça aurait pu être le cas. »

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Il pourrait jurer entendre l’orage gronder au loin. L’atmosphère électrique en est un symptôme comme un autre. Il pourrait presque deviner les éclairs tenter de briser la tension grandissante entre ces murs. Marée qu’il est maintenant bien trop tard pour faire reculer, voire même tenter de ralentir. Elle monte, inextinguible, ne s’arrêtant sans doute qu’une fois que les murs délavés de cette bâtisse se seront écroulés. Leurs prises de bec devenant presque l’essence même de ce lieu, s’incrustant dans les murs poreux aussi bien que la graisse et le cambouis. Il ne lâche pourtant pas une once de terrain, même lorsque cela serait la réaction la plus sage.  Il grogne, tente de se faire entendre lorsqu’elle ne l’entend pas plus que lui. Chacun défend son bout de gras, sans en venir aux mains pour une fois. Car ils savent tous deux où cela les mènerait. Et il pourrait y mettre sa main au feu, mais elle ne veut pas en arriver là. Ne veut plus. Il ne rétorque rien à sa dernière répartie. C’est presque puéril. Il n’est pas médium ou sorcier, ne peut lire dans les pensées malgré la malédiction qui court dans ses veines, insidieuse. Aussi se contente-t-il de soupirer. Las. Parce qu’elle ne saurait attendre de lui l’impossible, reproche qu’elle peut tout aussi bien prendre pour son compte, n’ayant pas les excuses qu’il pouvait avoir dès lors.

Les plaies anciennes se rouvrent si elles ont déjà cicatrisé un jour. C’est à vif, purulent. Les non-dits explosent enfin en plein jour, s’extirpent de ces zones d’ombre où ils ont été contenus pendant bien trop longtemps. Il ne recule pas lorsqu’elle cherche à obtenir ces trois mots qui pourront de toute manière rien arranger maintenant. Parbleu, il les lui offre même volontiers, le menton fier, la mettant au défi de rire de ses sentiments ou de les balayer d’un revers de la main. Et s’il s’attendait à de la colère face à son impudente arrogance, un coup, le silence furieux qu’elle lui offre est pire. Pas de réponse, pas de simultanéité, pas d’effusion ou de coup de poing reçu en plein visage. Juste le même entre deux toujours aussi inconfortable.  

Et lorsqu’il est franc avec elle, elle s’emporte, encore, comme d’habitude. Qu’attendait-elle de lui à la fin ? qu’il devine la moindre de ses pensées ? Il se montrait vulnérable pour une fois, de manière maladroite, certes, mais tout ce dont il n’avait jamais eu besoin, était la certitude que ses sentiments trouvaient un écho chez son amante. « Je ne savais pas Vivian ! C’est aussi simple que ça ! » Les poings viennent se planquer dans les poches de son pantalon pour éviter de s’arracher les cheveux. « Ce que je sais, c’est que pas une fois tu n’as soufflé mot de moi a qui que ce soit ! Je ne parle même pas de tes parents ! Si je t’avais fait ma demande Vivian, sois honnête, si je mettais un genou au sol, qu’est-ce que tu répondrais ? » Le moment était passé, quel bien y avait-il a ressassé ce passé dorénavant révolu ?

Mais l’univers se range pour une fois de son côté alors qu’elle ne parvient pas à battre en retraite avec son précieux butin. Ecrin qu’il a bien l’intention de récupérer. La bague est lourde de rêves morts dans l’œuf depuis qu’il a retrouvé la mémoire. Signification bien trop lourde pour qu’elle se contente de se pavaner avec à son doigt. La douleur que cela engendrerait serait bien trop grande pour lui. Et lorsqu’elle prend la défense de son cher petit époux, il se contente d’esquisser un sourire mauvais. « C’est vrai, pourquoi devrais-je avoir une petite conversation avec cet ami qui doit bien apprécier la place encore tiède que je lui ai laissée. » La chasse qui reprend alors qu’il se place sur sa route, devinant facilement où elle compte se rendre, essayant la solution la plus réfléchie en lui tendant la main pour qu’elle lui rende ce qui ne lui appartient pas.  « Ce que je fais de cette bague ne te regarde plus depuis que tu as dit oui devant l’autel Vivian. » Gronde-t-il aussi à son tour. « Si je décide de l’enterrer dans les bois, cela me regarde. » Parce qu’elle a touché juste en devinant qu’il ne la donnerait pas à une autre. Ses regrets ne changent rien à la donne. « Tu ne peux pas accepter et garder cette bague sans en accepter les conséquences. » Qu’il comptait la lui offrir pour partager sa vie, proclamer au monde entier qu’ils étaient ensemble, une force de la nature à reconnaitre. Aussi se penche-t-il vers elle pour marquer ses propos, prenant l’initiative de glisser une main le long de sa taille tout en approchant son visage du sien. Juste assez pour murmurer ses prochains mots contre ses lèvres. « Tu crois que je te laisserai la porter alors que tu es avec lui ? » Le bout de son nez vient frôler le sien, jouant avec le feu alors qu’il lui laisse encore une échappatoire. Il n’impose pas Elias, jamais.  De son autre main, il capture la main coupable du crime qu’il lui reproche. « Je en te savais pas cruelle. Me rappeler éternellement ce qui aurait pu être et en souffrir en silence alors que je pourrais ronger mon frein dans l’ombre tranquillement si tu me la rendais maintenant. » La menace à peine voilée que si elle s’échappe avec cette bague, il ne serait pas contre mettre le feu au village pour la récupérer.

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Ca suinte par tous les pores, colère montante, terrible, affamée. Il n’y a jamais eu que lui pour calmer cette dernière, la réduire à l’état de simple nuage morose. Mais les moyens pour y parvenir… Elle n’a plus le droit ne serait-ce que d’y songer. Plus maintenant qu’elle a juré à l’autel son amour pour un autre, son soutien. Pour le meilleur et pour le pire. Le pire est encore à venir, mais le retour d’Elias en montre déjà la voie. Tentation fébrile mise sur sa propre route. Elle ne peut guère prétendre ne plus rien ressentir pour ce dernier, pas plus qu’elle ne peut l’avouer à voix haute. Elias est un non-dit qui se doit de demeurer dans le jardin de ses secrets. Elle doute toutefois que le statuquo perdurera, pas avec la colère qu’il éprouve et dont elle est à l’origine. Combien de temps avant qu’il ne vende la mèche ? Combien de temps avant qu’il ne gueule à qui veut bien l’entendre toutes les subtilités de leur relation ? Elle ne peut pas l’empêcher. Elle ne le tuera pas pour garder ses secrets, ne l’envisage même pas. Lorsque le raz-de-marée percutera sa bulle de confort, elle devra faire face aux retombées, et advienne que pourra dès lors. Ce sera ça de moins à porter, sans doute.

Les mots glissent à ses oreilles, et elle ne peut rien en faire. Elle avait osé croire que l’amnésie pourrait balayer les éventuels sentiments. Six mois. Six mois sans sa présence pour nourrir cet amour ressenti. Six mois sans qu’il ne sache qu’elle était là, non loin, à attendre son retour malgré et contre tout. Six mois durant lesquels peut-être, une autre avait pris sa place. C’aurait été légitime. Douloureux, mais normal. Pourquoi aurait-il cherché une femme dont il ne se souvenait de rien ? Et puis il y a cette bague. Si. Il l’avait cherché quelque part, sans savoir que c’était elle. Mais une fois encore, le destin ne voulait pas d’eux ensembles. Le ciel ne le désirait pas. Ces épreuves étaient bien trop grandes pour oser croire que ce n’était rien de moins qu’une mise à l’épreuve. Les saints ne les béniraient pas de leurs trompettes. On avait tenté d’en tuer un pour que l’autre s’en détourne. Elle sait pertinemment, la nouvelle McIntyre, que s’ils retentaient… l’issue serait fatale, quoi qu’il arrive. Ne tentons pas le diable dès lors, écrasons les sentiments malhabiles qui n’engendraient que le malheur.

Elle prend sur elle, pour elle, pour eux, pour cet époux qui ne mérite pas ce qui lui arrive, lui qui n’a rien demandé. Mais elle ne peut s’empêcher de trouver tout cela injuste, de maudire le ciel de la mettre dans cette situation, de maudire sa propre personne d’être ce qu’elle est. Elle n’est pas parfaite Vivian, malgré tout ce qu’elle met en œuvre pour le paraitre. Elle aime deux hommes, c’est aussi idiot que cela, et se trouve pourtant indigne des deux. Insécurité flagrante qu’elle ne tente pourtant de museler. Et elle s’insurge contre les reproches qui lui sont faits, tait la verve qui voudrait s’extirper, une fois de plus, de sa bouche aux lèvres carmines. Il y avait en réalité bien une personne qui était au courant, à qui elle avait osé souffler cette cruelle vérité. Son propre frère. Mais elle ne le vendrait pas sur un plateau d’argent. Et puis, sans qu’elle ne le sache, sa propre mère avait deviné, sans jamais rien dire, se faisant garante des secrets de sa fille. Mais il reproche encore et encore le Thackeray, joute verbale, surenchère, alors qu’elle explose de colère sous son insistance. « J’aurai dit oui Elias ! Je t’aurai épousé !! » Qu’elle hurle, gronde, avant de se reprendre, la prunelle brillante de colère. Elle ne peut pas gérer plus. Ne veut pas gérer plus. Cette conversation doit se terminer.

Elle essaie de fuir, sans succès, encore et toujours rattrapée. Que doit-elle faire pour qu’il la laisse partir ? Lui rendre l’écrin si précieux ? Non. Jamais. Inenvisageable. C’est à elle, point. Egocentrique, égoïste. Vivian, répétons-le une dernière fois, n’est pas parfaite, et elle ne partage pas. La prunelle se fait orageuse sous le nouveau reproche, alors qu’elle claque de la langue contre son palais. « Par pitié Elias, ne vient pas me faire croire que Keir était au courant pour nous deux. Laisse-le en dehors de cette histoire. Cette union nous a été proposé, nous avons accepté, l’histoire s’arrête là. » Mariage arrangé, ni l’un ni l’autre certain que l’autre serait présent à l’autel au jour fatidique. Cela pourtant, elle ne le dira pas, parce que ça ne le regarde pas. Elle cherche à s’échapper, une nouvelle fois, mais toujours le chasseur sur sa route, prêt à la traquer au moindre mouvement qu’elle opère. « Laisse-moi passer. » qu’elle gronde, l’impatience gagnant sa gorge. Colèer qui pourtant, s’amenuise alors qu’il ose glisser une main le long de sa taille, marque une possessivité qui la laisse un instant pantoise, le visage qui dérive de cette main à son visage, salive doucement avalée, visage de l’ancien amant bien trop proche pour qu’elle l’ignore. Les prunelles se perdent un instant dans les siennes, quand les lèvres s’effleurent. Flots de souvenirs sous leur flirt malicieux d’autrefois, sous la faiblesse dont elle a toujours fait preuve sous son charme. C’est presque naturellement qu’elle se cambre en arrière, pour lui échapper certainement, que sa main droite glisse le long de son bras opposé. Trop de gestes familiers. Les lèvres qui s’entrouvrent doucement, prêtes à céder à son appel. « Ce n’est pas un choix que je te laisse Elias. » qu’elle souffle en retour. Leur destin est tracé. Elle ne lui appartient plus. Main prisonnière, phalanges qui caressent la bague de fiançailles et l’alliance. Elle ferme les yeux un instant, avant de les rouvrir, capte parfaitement le sous-entendu dans les mots. Et la dose d’adrénaline suffisante alors qu’elle le pousse en arrière, le plaque contre le mur, lèvres contre les siennes, baiser fougueux, violent, passionné. Saveur d’autrefois retrouvée alors que sa main s’égare dans sa chevelure trop longue, mais qui lui va si bien. Son Elias, celui qui la tuera toujours à petit feu. Dents qui viennent marquer sa lèvre, alors qu’elle se recule enfin, le relâche et le toise, mélange de passion et de colère. « Ne me menace plus jamais Elias. » Qu’elle ponctue, le laisse là où il se trouve, attention détournée. La porte est juste à côté, et elle n’hésite pas à la passer pour s’en aller.

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