temporalité du rp : août 1955
personnages concernés : @Helen Umbridge
trigger warnings : suprémacisme sorcier.
intervention autorisée du mj : [ ] oui [X] non
autre(s) : /

IN FOR THE KILL - 2021-2022

Une journée de plus passée enfermé dans ton antre, au plus profond des entrailles des Mystères. Rares étaient les sorciers que tu recevais en ces lieux. Mais tous pouvaient s’accorder à dire que l’endroit était morne et lugubre. La lumière du soleil ne parvenait aucunement à se glisser entre les pierres qui tapissaient les murs recouverts d’étagères à grimoires. Aucun ornement, aucune décoration ne venait égayer l’atmosphère. A l’exception d’une vieille photographie jaunie par le temps qui passe. On pouvait y apercevoir un Marlon âgé de dix-huit ans, tout juste sorti de Poudlard, faisant ses premiers pas au Ministère. Pour ce qui était probablement la première fois de la journée, tes lippes s’étirèrent en un mince sourire alors que tes yeux se posèrent sur ce visage empreint d’une naïveté juvénile, disparue depuis des lustres. Dans tes jeunes années, tu te représentais le Ministère de la Magie comme un haut lieu de pouvoir, parfaitement hermétique, duquel aucun secret ne pouvait s’échapper. Tu avais longtemps cru en la noblesse et la puissance de l’institution.  Et puis, au fil des années, tu avais appris à en reconnaître les faiblesses inéluctables. A tirer profit des failles qui sillonnaient sa carapace. A considérer les rumeurs avec plus de curiosité que de mépris. Et c’est grâce à cette dernière aptitude que tu te retrouvais aujourd’hui dans une position des plus confortables. Si tu te gardais bien de te donner des airs de colporteur de ragots malfaisant -contrairement à bon nombre de tes pairs- tu avais appris à tendre l’oreille au bon endroit, au bon moment. Et c’est ainsi que la tenue d’une réunion très secrète organisée par Helen Umbridge, en personne, parvint jusqu’à toi. Il se murmurait que la présidente du Magenmagot avait pour but d'accélérer le déroulement de l’enquête dans le dossier Khabarov. Tu n’en savais guère plus, mais cela était déjà largement suffisant pour éveiller tes soupçons. Dans une telle affaire, on cherchait toujours à savoir s’il y avait eu des complices, on allait fouiller dans les tréfonds de la vie privée de l’accusé. Et dans le cas de Vadim, tu savais parfaitement ce que cela pouvait signifier…
Il était impératif d’en apprendre plus sur les véritables intentions d’Umbridge ainsi que sur l’avancée des recherches. Tu te doutais bien que ta vieille amie ne te révèlerait pas l'entièreté de l’enquête, mais peut-être finirait-elle par accepter l’aide d’un Directeur de département ? Après tout, cela faisait près de huit mois que Vadim avait été envoyé à Azkaban et qu’aucun autre mangemort n’avait été arrêté. Merlin soit loué.

C’est ainsi que tu t’étais retrouvé à attendre le début de ton audience devant le bureau d’Helen. Le personnel du Magenmagot n’était guère accoutumé à ta présence dans ses couloirs. Nombreux étaient les regards lancés à la hâte que tu sentais peser sur tes épaules. Les rumeurs quant à la raison de ta présence iraient certainement bon train. Et tu t’en délecterais une fois le moment opportun venu. “Monsieur Carrow, la Présidente est désormais prête à vous recevoir.” Arborant ton sourire de façade le plus convaincant, tu emboîtas le pas à l’employé du Magenmagot, qui te conduisit jusque devant la porte d’Umbridge. Qu’une née-moldue occupe un tel poste te paraissait toujours aussi insupportable, mais tu allais devoir prendre sur toi si tu voulais protéger les tiens. “Madame la Présidente, merci de m'accorder de votre temps.”

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Il y avait des rendez-vous que l’on attendait avec impatience. Il y avait ceux que l’on redoutait, et ceux que l’on repoussait : la visite annuelle chez le dentiste, par exemple. Et puis il y avait les rendez-vous auxquels on ne pouvait pas échapper, et qui n’appartenaient bien souvent qu’à une seule des catégories précitées. Par exemple, ceux qui étaient fixés d’un commun accord entre deux secrétaires, qui s’arrangeaient pour caler une entrevue au sommet entre leurs patrons aux agendas surbookés.

« Monsieur le Directeur. Je vous en prie, prenez place. Prendrez-vous un verre d’eau ? Ou une tasse de thé ? »

Il était de notoriété publique que la plus haute magistrate du pays ne consommait pas d’alcool - un signe de son inoxydable probité, ou de son incurable propension à jouer les sainte-nitouches, selon que l’on demande à ses admirateurs ou à ses détracteurs. En contrepartie de cette particularité, qui la distinguait de beaucoup de ses collègues prompts à servir un verre de sherry dès qu’on approchait de l’heure de l’apéritif, Helen conservait dans un placard une impressionnante collection de thés - une collection agrandie chaque année par les trouvailles d’Orion Flamel, qui ne manquait jamais de lui envoyer une nouvelle décoction pour fêter son anniversaire.

Une fois le choix de Carrow effectué, et les boissons servies sans plus de formalités, Helen reprit sa place habituelle derrière l’imposant bureau de cèdre poli. Croisant ses doigts élégants, dépourvus de toute bijouterie à l’exception de son alliance, la magistrate laissa un silence s’installer tandis qu’elle observait son interlocuteur. Marlon Carrow était un adversaire à sa mesure, la chose était certaine - et ce, depuis qu’ils s’étaient côtoyés à Poudlard, en tant que Préfets puis Préfets-en-Chef. Opposés sur à peu près tous les sujets de conversation qu’ils avaient l’occasion de brocher, ils avaient marché sur des œufs pendant plusieurs années avant que leurs chemins ne se séparent, à leur soulagement mutuel. Aujourd’hui, malgré cette ancienne proximité forcée, aucun des deux n’aurait même songé à tutoyer l’autre.

Pour Helen, Marlon était l’incarnation de tous les défauts du système politique magique actuel. Fils d’une lignée peut-être plus ancienne que le pays, il semblait croire que tout lui était dû sans aucune contrepartie ; politicien roué, il dirigeait son département d’une main de fer, dénuée de tout gant de velours. Un secteur, d’ailleurs, dont la simple existence avait causé plus d’un mal de crâne à la magistrate suprême. Comment garantir la transparence du Ministère et éviter tout abus de pouvoir, alors même qu’un des principaux services fonctionnait sur base d’une complète opacité de ses activités ?

Elle se doutait néanmoins que Carrow ne lui rendait pas là une simple visite de politesse. Déjà, parce que leurs services tenaient chacun à leurs prérogatives respectives, ce qui entraînait plus d’une dispute entre fonctionnaires. Et ensuite, parce que le jour où un Carrow se montrerait poli envers une Née-Moldue, les Veracrasses auraient des dents.

« Dites-moi… Que puis-je faire pour vous aider ? »

L’inverse, toutefois, était bien sûr complètement faux. Helen était toujours polie, en faisait même un point d’honneur de chaque entrevue prenant place au sein de ce bureau soigneusement rangé, dont la fenêtre enchantée montrait un paysage arboré sous les rayons d’un soleil estival bien loin au-dessus de leurs têtes. La formulation n’avait cependant rien d’innocent : avec le temps, Helen aussi était devenue une politicienne, bien que ce changement se soit partiellement opéré contre son gré. Toute bribe d’information ou d’assistance prêtée à Carrow devrait être rendue, et serait âprement négociée… La température de la pièce menaçait donc de chuter brusquement, malgré la saison inhabituellement chaude qui dominait le monde extérieur.

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L’accueil est poli, mais réservé. La chaleur estivale qui règne en dehors de ces murs ne parvient vraisemblablement pas à se frayer un chemin à l’intérieur de la pièce. “Je prendrais un thé. Noir, de préférence. Avec une goutte de lait. Merci.” Tu savais pertinemment que tu n’en boirais pas la moindre goutte. Tu ne tenais pas à devenir le prochain sorcier de sang-pur victime des bas-fonds de la société. Néanmoins, tu porterais certainement la tasse à tes lèvres de temps à autre, pour entretenir la comédie par politesse, bien entendu. Tu observes la porcelaine s’agiter sous les mouvements de la baguette d’Helen. “Si ma mémoire ne me fait pas défaut, c’est la première fois que j’ai l’occasion de vous rendre visite dans votre bureau.” Utiliser le terme d’honneur aurait été trop exagéré, trop hypocrite. Même pour toi. Quoiqu’il en soit, tu savais pertinemment que ta mémoire ne te trahissait que très rarement et que tu n’avais jamais vu l’intérieur de cette pièce. Ton interlocutrice n’avait certainement jamais brûlé d’envie à l’idée de te convier en ces lieux. “Vous l’avez fort bien agencé. Votre collection de thés est tout à fait remarquable. Je vois que les rumeurs disaient vrai.” Cette dernière phrase est prononcée différemment. Le ton de ta voix se détache de ce semblant de courtoisie dont tu avais gratifié tes paroles précédentes. Il était évident que tu ne faisais pas véritablement référence aux multiples boîtes de thé entreposées dans le placard de la Présidente. Tu n’étais pas du genre à prêter attention aux préférences culinaires de tes pairs. Lorsque tu avais véritablement besoin de quelqu’un, tu achetais son savoir (ou bien son silence, selon la situation) par le biais de moyens moins…conventionnels. Mais n’allons pas trop vite en besogne, l’heure était encore aux préambules chargés d’une politesse exacerbée. Si tu n’es pas avare de palabres mielleuses, il se trouve qu’Helen te rend bien volontiers la pareille. Ta mâchoire se contracte imperceptiblement alors qu’elle demande comment elle pouvait bien te venir en aide. Ce dernier mot t’irrite. Tu t’y attardes un peu trop dessus. Une ou deux secondes durant lesquelles tes pupilles prennent une teinte plus sombre qu’à l’ordinaire. Tes mains agrippent finalement la tasse de thé que tu portes à tes lippes juste le temps de parer à nouveau ton visage de ce masque de contenance légendaire, dont tu avais le secret. Un très mince sourire vient se ficher sur tes lèvres alors que tu reposes la porcelaine. “D’après ce qui se murmure dans les couloirs du Ministère, c’est peut-être moi qui peux vous venir en aide. A condition que les dires qui me sont parvenus aux oreilles soient véridiques, bien entendu.” Le Préfet-en-chef taciturne et impatient avec lequel Umbridge avait dû composer à l’époque avait disparu il y a bien longtemps. Les décennies passées à gravir les échelons au sein du Ministère t'avaient inculqué les règles des jeux politiques. Patience et prudence étaient des vertus bien utiles en ces hauts lieux de pouvoir. Gare à celui ou celle qui dévoilerait ses véritables intentions trop tôt. Tu avances pas à pas face à cette adversaire que tu connais et méconnais à la fois. Et c’est bien là que réside toute la dangerosité de la situation. Tu ne l’as plus cotoyée depuis fort longtemps, bien heureux de ne plus avoir à croiser son chemin. Tu ignores de quelle façon la Helen d’aujourd’hui défend ses intérêts. Une chose est certaine, tu vas devoir lui donner un appât si tu veux qu’elle morde à l'hameçon. Continuer d’emprunter des chemins détournés ne fera que retarder l’échéance. “J’ai entendu dire que l’enquête concernant Khabarov n'avançait pas aussi rapidement que le Ministère ne le souhaiterait.” Ce n’était pas peu dire. Cela faisait près de huit mois que Vadim avait été arrêté par les aurors et qu’aucune information supplémentaire n’avait fuité. Néanmoins, tu fais de ton mieux pour te départir de ton sarcasme habituel alors que tu reprends la parole. “Je connais du monde au sein de la société sorcière. Je pourrais certainement mettre mes relations à profit pour servir les intérêts du département de la justice magique.” S’il y a bien une chose que le Marlon d’autrefois avait encore en commun avec le directeur des Mystères c’était ses insupportables petites manières de sang-pur honteusement privilégié.

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« Votre mémoire est excellente. Il semblerait que nos agendas respectifs » - ainsi qu’une farouche envie de se tenir aussi éloignée de Carrow que d’un sac empli de limaces explosives - « ne nous aient pas encore permis de procéder aux visites de politesse les plus élémentaires. Je ne doute pas que vous ayez un sens de la décoration très aigu, mais venons-en au fait, si vous le voulez bien » reprit la magistrate, déposant du bout de sa baguette un plateau assorti de deux tasses fumantes.

Plus vite le chef de service serait ressorti de son espace de travail, plus vite elle pourrait procéder à un examen minutieux de l’endroit. Non qu’elle accuse l’un des hauts gradés du Ministère de vouloir lui nuire en  posant l’un ou l’autre maléfice vicieux dans les recoins de son bureau… Mais mieux valait prévenir que guérir. Elle choisit sciemment de ne pas relever l’allusion à des rumeurs, notant toutefois l’intonation plus fraîche avec laquelle cette insinuation avait été formulée. Des murmures circulaient donc, dont sa fidèle secrétaire aurait négligé de l’informer ? À moins qu’il ne s’agisse là que d’une ultime tentative de manipulation, l’un de ces petits jeux dont le Serpent avait toujours été friand, même à l’époque de leur scolarité. Comme toujours, le duo tanguait au bord d’un précipice : le premier à en reconnaître l’existence y serait impitoyablement jeté.

Et tous deux étaient si bien versés à ces arts de la parade que cela en devenait un autre jeu, de diversions en dérives, d’obfuscations en refus polis, et ainsi de suite jusqu’à ce que le personnel administratif devienne parfaitement conscient qu’il était inutile d’espérer une quelconque collaboration entre leurs départements. Un état de fait dont chacun se lamentait, tout en espérant qu’un jour,  un jour prochain, l’autre commettrait l’erreur fatale de sous-estimer l’adversaire.

« Loin de moi l’idée d’insinuer que des murmures ne peuvent pas être des sources dignes d’intérêt. Et encore moins de suggérer que quiconque au sein de cette institution soit en mesure de tenir un autre discours que la vérité… » Vaste blague, évidemment. Le Ministère était un repère de politiciens tous plus doués les uns que les autres - tous plus roués les uns que les autres. « Mais tout de même, Monsieur Carrow : vous sollicitez une audience » - et cette fois, le sourire était sien. Il avait dû s’abaisser à quémander une entrevue, qu’elle avait pu imposer sur son propre territoire : c’était déjà une première, une minuscule mais bien réelle, victoire. Ce devait être la première fois qu’un Carrow en était réduit à une telle extrémité. « suite à de simples murmures ? Nous ne sommes plus à Poudlard : nous ne sommes plus des Préfets, chargés du bien-être d’une pléthore adolescente. » Son temps était autrement plus précieux que pour de telles considérations, semblait-elle affirmer, juste avant de prendre une gorgée de son thé - sans lait, ni miel, juste une touche de citron relevant le goût acidulé d’un breuvage venu tout droit de Vladivostok.

« L’enquête suit son cours. Les rouages de la Justice Magique sont peut-être lents, c’est un fait » - un fait qu’il lui coûtait d’admettre, même si elle pouvait argumenter - « mais c'est là une vertu. C’est en se précipitant que l’on commet des erreurs. Or, les erreurs judiciaires ont des conséquences bien trop cruelles pour que je ne puisse les tolérer. »

Pourtant, et il devait en être conscient, Carrow touchait là une corde sensible. Les délais imposés par le dossier Khabarov nuisaient à l’image du département, sans même parler des conséquences de l’affaire sur les mesures de sécurité prises lors des nouveaux recrutements. Des vérifications extensives étaient ajoutées à la charge de travail déjà démentielle de la Justice Magique, qui avait très franchement d’autres Scroutts à fouetter que de savoir si un gratte-papier de niveau ᚠ-17ᛉ était bel et bien recommandé par la cousine issue de germain de la nièce du sous-chef de département des Accidents et Catastrophes Magiques. Toutefois, la proposition suivante du chef des Langues-de-Plomb fit lever un élégant sourcil à la magistrate. Elle se serait attendue à une attaque plus directe - une remise en cause de ses compétences, peut-être, sous couvert de proposition d’une intervention du Département des Mystères. Mais Carrow semblait avoir surpassé la fougue de ses jeunes années : c’était bien plus sournois, insidieux et discret, mais les faits n’en demeuraient pas moins identiques. Ce n’était pas sa capacité de travail qu’il mettait en cause : pire encore, c’était son statut social.

« C’est fort aimable. Vous n’êtes pas sans savoir que je dispose moi-même d’un réseau de contacts étendus, à la fois du côté sorcier et du côté des sans-magie. » L’un des - rares - avantages de sa naissance de l’autre côté des frontières magiques était justement qu’Helen était bien plus à l’aise avec les interlocuteurs moldus que la majorité de ses collègues. Elle avait étroitement collaboré avec certains magistrats sans-magie lors des procès de Nurmengard : cela avait surpris ses confrères d’alors, mais la collaboration avec les moldus avait d’indéniables avantages. Cela ne lui était toutefois d’aucune aide en ce moment : l’affaire Khabarov, couplée au meurtre de la petite Churchill, avait à ce point distendu les relations entre mondes magique et moldu qu’aucun des contacts d’Helen ne prenait plus la peine de retourner ses courriers. « Seriez-vous en train de suggérer que ce n’est pas déjà le cas ? Sûrement, Marlon » - l’usage du prénom était empli d’un tel mépris que nul n’aurait pu croire à une tentative de flatterie ou de fraternisation - « sûrement vous servez de manière égale les intérêts de tous nos départements ? »

Une nouvelle gorgée de son thé sombre, et la procureure poursuivit. « Si vous disposez d’une quelconque bribe d’information permettant de faire progresser notre affaire, j’ose espérer que vous l’avez déjà partagée avec les fonctionnaires compétents. Vous comprenez que, dans le cas contraire, je me verrais obligée de procéder à une perquisition de vos propres locaux… N’est-ce pas ? »

« De même, si vous disposez de contacts utiles : de telles personnes ressources devraient au plus vite être questionnées par mon département. Comme vous l’avez souligné, il est temps que nous progressions sur ce dossier. » Elle venait de laisser là une porte dangereusement entrouverte, mais l’avant-goût d’un triomphe tel qu’une perquisition du Département des Mystères était un prix suffisant pour distraire l’impassible Helen Umbridge de son strict contrôle habituel.

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Tu observes Helen avec une intensité feutrée, celle d’un prédateur dissimulé dans l’ombre. Son ton est poli, ses paroles bien choisies, mais chaque mot suinte le mépris à ton égard. Tu relèves à peine l’utilisation de ton prénom, un affront volontaire que tu préfères ignorer pour le moment. La partie vient à peine de commencer, et déjà les hostilités sont lancées. Soit. Cela ne te surprend pas, au fond, pas plus que cela ne te déstabilise. Tu te redresses légèrement sur ton siège, ajustant d’un geste imperceptible la coupe impeccable de ta cape.

« Madame la Présidente, » commences-tu, avec cette politesse presque exagérée qui, tu le sais, a le don d’irriter tes interlocuteurs les plus méfiants.  « Je ne doute pas un instant de vos compétences ni de l’étendue de votre réseau. Après tout, il serait mal avisé de sous-estimer une personne de votre envergure. »

Tu marques une pause, ton regard sombre rivé au sien, calculant chaque mot qui suit. « Cela dit, même les réseaux les plus vastes peuvent parfois manquer d’une pièce du puzzle. Une information isolée, une connexion insoupçonnée. »

Tu inclines légèrement la tête, adoptant une posture plus introspective. « Vous le savez aussi bien que moi, Helen. Les secrets, les vérités dissimulées… ce sont des armes puissantes, et plus le temps passe, plus elles risquent de nous échapper. C’est précisément dans ces moments que le Département des Mystères peut se révéler utile. Nous n’avons pas les mêmes contraintes que vos équipes, ni les mêmes limites dans nos méthodes. Ce qui pourrait sembler inaccessible ou insignifiant à d’autres ne l’est jamais pour nous. »

Tu te penches en avant, sans rompre le contact visuel. « Mon intention n’est pas de remettre en question votre travail ou celui de vos équipes. Loin de là. Je suis ici pour offrir un partenariat, une collaboration qui pourrait se révéler bénéfique à tous. Vous évoquez les rouages de la justice, leur lenteur nécessaire. Je ne saurais contredire cet argument. Après tout, la patience est une vertu que nous partageons, vous et moi. Néanmoins, permettez-moi de souligner que, dans le cas de l’affaire Khabarov, le temps joue contre nous. Chaque jour qui passe sans avancée ne fait qu’affaiblir la confiance que nos concitoyens placent en notre institution. Pire encore, il offre à ceux qui pourraient être impliqués une occasion précieuse de dissimuler leurs traces. »

Ton sourire s’élargit imperceptiblement. « Mais bien sûr, si vous jugez que notre aide n’est pas nécessaire, je respecterai votre décision. Après tout, chaque département doit préserver son indépendance. Néanmoins, vous comprendrez que refuser une offre de coopération pourrait être perçu, disons, comme un manque de… pragmatisme, dans une affaire aussi sensible que celle-ci. » Tu recules légèrement, laissant le silence s’installer une fraction de seconde de plus, suffisamment pour que tes paroles résonnent.

Tu prends une inspiration silencieuse, dissimulant soigneusement l'irritation qui monte en toi. La mention d'une perquisition au Département des Mystères, t'a frappé comme une gifle glacée. Ce n’est pas tant la menace implicite qui te dérange, mais plutôt l’audace qu’elle incarne. Que Helen ose même envisager une telle action est une provocation, un affront à l’autonomie sacrée de ton département. Pourtant, tu maintiens ton calme apparent, ne laissant transparaître qu’une fraction de ton agacement dans un léger durcissement de tes traits.« Quant à l’idée d’une perquisition… Je suis certain que ce n’est qu’une hypothèse rhétorique. Vous savez aussi bien que moi que le Département des Mystères est soumis à des protocoles stricts, et que tout accès non autorisé pourrait entraîner des… complications. Mais bien sûr, si vous estimez qu’une telle démarche est indispensable, je vous invite à en discuter directement avec Madame la Ministre. »

Tu reprends ta tasse de thé, feignant une décontraction parfaite, et la portes à tes lèvres sans en boire une goutte. « Mais avant d’en arriver à de telles extrémités, pourquoi ne pas explorer des solutions plus… conciliantes ? Après tout, nous partageons le même objectif : assurer la sécurité de notre société et maintenir l’ordre. »

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