IN FOR
THE KILL

RPG HP && the village


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PÉRIODE DE JEU:
SEPTEMBRE 1955
GODRIC'S HOLLOW ● Dans l’ombre, un texte commence à circuler dans les différentes communautés magiques, lu lors de soirées mondaines, traduits dans une dizaine de langue, le pamphlet, extrémiste, fait assez parler de lui pour être reproduit par les journaux ou lu sur les ondes de nombreuses radios afin d’en commenter ou critiquer le contenu. L’illégalité de leur organisation ne semble nullement avoir empêché les Mangemorts de diffuser leurs idéaux. (lire le pamphlet)
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The tears that weren't shed (Saoirse)
passeur: be kind & just ●
Dolores Abbott
passeur: be kind & just
Dolores Abbott
feuille de personnage

Feuille de personnage
RELATIONS:
INVENTAIRE:
ACQUISITION:
WANDS
KNIVES
SOUL
hiboux : 897
pseudo : pollypocket
faciès & dot : Ella Purnell + starrynightavatars
doublon(s) : Paulina + Saturnine
gallions : 2257
The tears that weren't shed (Saoirse) Fc15d0e55b5332ff9acefad5764f86804344cdae
pronoms : elle
décade : dix-neuf ans, entre une adolescence perdue et l'âge adulte qui lui ouvre les bras
labeur : diplômée depuis un peu plus d'un an, elle était jusqu'à il y a peu assistante parjurante au Magenmagot. désormais sans emploi, elle cherche sa voie
alter ego : Nicole Desplat
sang : sang pur, bien que ça n'ait pas la moindre importance à ses yeux
myocarde : le coeur accroché et offert à un doux géant
allegeance : passeuse depuis janvier 1955, branche aubépine
particularité physique : une cicatrice sur la tempe droite, due à une malheureuse rencontre avec un cognard lors de son tout premier match de quidditch
gif feuille : The tears that weren't shed (Saoirse) Tumblr_inline_pfqgma66371ricaxd_540

badges
team boursouf.
olympiades 2023.
dedoublator
posséder 1 multi.
animation
a participé au trick or treat 3.0
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ancienneté
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jeux d'iftk 2024.
crésus
2000+ gallions.
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(#) The tears that weren't shed (Saoirse) ●
23.02.24 19:57
● ● ●
you have nothing to fear
À PROPOS
DE CE SUJET
if you have nothing to hide
● ● ●
temporalité du rp : Juin 1955
personnages concernés :  @Saoirse Finnigan @Dolores Abbott
trigger warnings : décès, deuil
intervention autorisée du mj : [x] oui [ ] non
autre(s) : /

IN FOR THE KILL - 2021-2022


JEUX 2024
The tears that weren't shed (Saoirse) XPBmkqFF_o
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Dolores Abbott
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pronoms : elle
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labeur : diplômée depuis un peu plus d'un an, elle était jusqu'à il y a peu assistante parjurante au Magenmagot. désormais sans emploi, elle cherche sa voie
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sang : sang pur, bien que ça n'ait pas la moindre importance à ses yeux
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allegeance : passeuse depuis janvier 1955, branche aubépine
particularité physique : une cicatrice sur la tempe droite, due à une malheureuse rencontre avec un cognard lors de son tout premier match de quidditch
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(#) Re: The tears that weren't shed (Saoirse) ●
23.02.24 20:04

How can I go on or find a way to be strong?
Will I ever again enjoy life's sweet song?
T
HE TEARS THAT
WEREN'T SHED
Le temps n’était pas vraiment au beau fixe pour la gamine. Les jours se suivaient, se ressemblaient un peu trop et malgré ce qu’elle avait cru ou même ce que Ronald avait affirmé, elle ne s’habituait pas à l’absence. Etait-ce ça aussi qu’il ressentait à l’époque où elle passait plus de la moitié de l’année loin de lui à Poudlard ? Si c’était le cas, elle n’osait imaginer à quel point il avait dû se sentir seule, surtout dans leur ancienne maison, bien trop grande pour deux personnes et encore moins une seule. A côté, les dimensions bien plus réduites de leur appartement étaient rassurantes, mais rien ne suffisait pour autant à combler le vide qu’il avait laissé. Elle essayait comme elle pouvait de se garder occupée, d’élaborer une routine et surtout de tout maintenir en ordre, comme s’il avait été prévu qu’il rentrerait d’une minute à l’autre. Parce que c’était possible non ? Elle ne savait plus. Ses lettres étaient irrégulières, vagues, exactement comme quand elle était petite et qu’il partait en mission. Mais à l’époque, elle avait encore sa mère pour la rassurer. Dix-neuf ans, une supposée adulte et pourtant elle aurait donné n’importe quoi pour que quelqu’un vienne la réconforter et prendre les choses en main à sa place. Mais comme ce n’était pas possible, il fallait bien qu’elle s’occupe. Ça avait commencé par des achats inutiles, puis elle avait entrepris d’apprendre à cuisiner à la façon des moldus histoire de se nourrir correctement et de passer le temps, ce qui était loin d’être facile. Une fois sur deux, elle abandonnait et retournait à sa baguette pour se faciliter la tâche. Mais même avec la magie, ses compétences aux fourneaux étaient limitées. Un elfe de maison lui aurait sans doute été utile, mais bizarrement la simple idée d’une présence servile ici ne faisait qu’accentuer la cruauté de l’absence.

Ce coup-ci, elle abandonna une fois de plus sa tentative de tarte aux pommes, et jeta rageusement le rouleau à pâtisserie dans l’évier. Ces jours-ci, sa patience s’usait vite et elle était sujette à des mouvements d’humeur bien trop fréquents pour être normaux. En cause son travail, et il ne s’agissait pas d’un collègue aimant la tourmenter cette fois-ci, plutôt de celle qu’elle accusait de tous les maux. Mary Travers qui avait renvoyé son père, lui brisant même le coeur au passage. C’était à cause de cette femme qu’il se trouvait loin d’ici, qu’il allait peut-être perdre la vie (elle chassa immédiatement cette pensée). Meredith avait eu raison depuis le début: cette femme était un vrai poison et plus le temps passait, moins Dolores supportait de savoir qu’elle travaillait pour elle. Elle l’évitait et c’était plutôt heureux car elle-même ignorait ce qu’elle aurait été capable de dire à la Ministre de la Magie en personne.

Trop agitée pour se concentrer, elle retourna dans le salon et s’affala sur le canapé, jetant à peine un regard au tas de courrier qui s’accumulait dans un coin. Suite à la débâcle à la distillerie Weasley, elle avait reçu plusieurs rappels à l’ordre plus ou moins compatissants de la part des employés chargés de maintenir l’image publique de Poudchem. On s’inquiétait soudain de ce comportement, si peu habituel chez elle. Et puis elle avait peu à peu arrêté d’ouvrir toute enveloppe qui ne portait pas l’écriture de son père. Au cas où elle contiendrait quelque chose qu’elle ne voulait surtout pas savoir.
A côté des lettres, elle avait placé le téléphone moldu qu’elle avait acheté, une lubie qu’elle avait eue. Téléphone qui ne fonctionnait absolument pas, car ce que Dolly n’avait malheureusement pas réalisé, c’est que l’appareil seul, même branché, ne suffisait pas pour pouvoir s’en servir. Avant, elle aurait demandé à Adam ce qui pouvait clocher. Lui, il aurait su. Mais maintenant, elle ne se voyait pas vraiment aller le voir comme ça, surtout pour une broutille pareille.

Penser à Adam, voilà qui n’allait pas l’aider à se détendre et à se calmer, au contraire. Mais il y avait bien un truc qu’elle pouvait faire et qui était susceptible de lui changer les idées. Elle finit par se lever, se changea rapidement pour enfiler une tenue qui lui permettrait de se fondre dans la masse du côté moldu et sortit de chez elle. Malgré la nuit qui tombait, la gamine connaissait le chemin par coeur ou presque et traversa le village d’un pas assuré jusqu’au Drunken Sailor Pub. Voilà quelques bonnes semaines qu’elle n’y avait pas mis les pieds, et qu’elle n’avait pas vu Tasha. En fait, la compagnie de la rousse, c’était exactement ce dont elle avait besoin, avec son franc-parler, son caractère de cochon son humour parfois douteux. Et puis, avec elle, Dolly n’était plus vraiment Dolly, elle était Nicole, moldue elle aussi (Nini pour Tasha, qui malheureusement avait refusé de renoncer à ce surnom ridicule). Evidemment, elle se sentait coupable de lui mentir sur son identité, sur son travail, mais c’était sans doute pour le mieux non ? On ne pouvait jamais trop prévoir la réaction des moldus sur ce genre de chose, et avec les activités annexes auxquelles elle participait elle devait faire d’autant plus attention.

Pour l’heure, elle était seulement heureuse d’apercevoir le visage familier de l’Irlandaise et fondit directement sur le bar avant d’aller se percher sur l’un des tabouret. « Tashaaaa t’aurais un truc fort pour moi s’il te plait ? » La requête prit des allures de gémissement alors qu’elle s’affalait à moitié sur le comptoir.

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Saoirse Finnigan
witch hunter: never bow
Saoirse Finnigan
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hiboux : 307
pseudo : foxie
faciès & dot : Luca Hollestelle (ralhiel)
doublon(s) : Mona ▸ Mycroft ▸ Ethel ▸ Helen ▸ Agnes ▸ Adam
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The tears that weren't shed (Saoirse) Giphy
pronoms : she-her (elle)
décade : 25 ans
labeur : impertinente tenancière (Drunken Sailor's Pub)
storytime : DOLORESKEIRELVIRA (FLASHBACK)
sang : moldue, sang aussi bourbeux que la bière de son pays natal, étincelles qui coulent dans les veines.
myocarde : lesbienne assumée et revendiquée, coeur qui bat pour les beaux yeux d'une blonde en particulier.
allegeance : les copains d'abord, la bande avant tout ; mais de bande il n'y a plus, alors elle se jette dans une nouvelle cause à corps perdu. Les Chasseurs sont sa nouvelle famille, dynamique dysfonctionnelle et conflits compris.
particularité physique : cicatrice de brûlure couvrant l'intégralité de sa cuisse droite. Taches de rousseur qui constellent le visage, les épaules et les bras.
gif feuille : scène du quotidien (Maligan) by kathee

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golden snitch
le.a speedy gonzales du rp.
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mordu.e des top-sites.
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adepte des pavés.
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participation aux missions.
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https://inforthekill.forumactif.com/t3504-saoirse-some-fires-can https://inforthekill.forumactif.com/t2828-saoirse-if-there-s-a-f
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(#) Re: The tears that weren't shed (Saoirse) ●
25.03.24 16:41
I can't leave my bed but I can't sleep, I got no clean clothes and I can't eat, And I smoke too much 'til I can't breathe
T
HE TEARS THAT WEREN’T SHED
Heureusement qu’il n’y a pas de miroir dans ma chambre. Parce que plus je vois mon reflet se préciser dans la vitrine, plus je comprends pourquoi les autres résidents du Black Dog me regardaient avec autant d’insistance ce matin. Ce n’est pas tant le pli de l’oreiller qui me barre la joue d’une vilaine moquerie de cicatrice ; ce sont surtout les cernes qui soulignent mes yeux mieux qu’un trait de crayon - que de toute manière je n’utilise pas, même pour les concerts. Des yeux qui semblent flotter dans un autre monde, tant la face qui leur sert d’écrin est lunaire. Les constellations de mes taches de rousseur ne suffisent pas à masquer un teint tellement blafard qu’il en devient cadavérique : l’ensemble du portrait fait peur à voir, et je me reconnais à peine lorsque d’un geste du poignet, j’achève de laver la grande vitre sur laquelle se détachent en lettres de bronze les mots Drunken Sailor Pub.

De l’autre côté de la fenêtre, un gamin s’arrête pour observer cet inhabituel manège. Je lui montrerais bien mon plus beau doigt d’honneur, c’est ce que je ferais en temps normal. Mais plus rien n’est normal. Plus rien ne sera jamais normal.

J’ai déjà essuyé de sales gueules de bois, mais pas question d’alcool cette fois. Enfin, un peu tout de même - faut pas déconner. Mais ce n’est pas le lendemain de veille qui presse de tout son poids contre mon front épuisé ; c’est une autre sorte de fatigue, un choc sourd qui n’a de cesse de se réverbérer contre les parois de mon être tout entier. L’absence crée un trou béant et je m’y cogne à chaque pas, je tombe un peu plus loin à chaque souvenir qui me revient. Lutter contre l’inéluctable chute monopolise toutes mes forces, alors affronter les regards… Je préfère ne pas trop y penser, me réfugier dans un univers fantasmé où les autres n’existent plus ; un univers dans lequel tu es encore bien vivant, un univers dans lequel tu peux débarquer ici à tout moment. Tu es en retard tout simplement. Alors je relève le menton, une ombre de mon incendie luit dans mes pupilles pour un bref instant, l’espoir que tout ceci ne soit qu’un très mauvais cauchemar…

« Eh, la rouquine, tu nous sers ? »

« J’arrive » je réponds, monocorde. Même pas la force d’imaginer une répartie mordante : si je continue sur cette lancée, les clients les plus fréquents vont finir par s’inquiéter eux aussi. Ah non, hein. Pas la force d’encaisser leurs questions à la con - les comment tu vas, Finnigan, les tu peux nous parler, tu sais. Je veux pas leur parler. Je veux causer à personne, juste à toi. Parce que je le sais, tu vas arriver, saisir l’attention de l’audience par l’une de tes pirouettes et scandaliser les deux pépées du fond de la salle, les mêmes qui pouffent à chaque fois que tu les regardes - j’ai jamais compris ce qu’elles te trouvent, t’es trop maigrichon et même tes fringues mal coupées ne suffisent pas à cacher ça. Enfin, le problème principal pour moi, c’est que t’es pas une nana - mais c’est un autre sujet.

« Il est passé où le patron ? T’es pas seule, d’habitude… » tente l’un des habitués, dans ce qui s’approche dangereusement d’une tentative de conversation. « Il a pris des congés, le patron. Si y a des récriminations, j’ai pas son adresse postale, alors vous pouvez vous les carrer là où je pense. »

Ah voilà, ça c’est plus comme moi. Faut croire que ça calme les velléités de discussion : le gars baisse des yeux penauds sur sa pinte de bière brune, et les deux nénettes du fond reprennent leur échange en me lançant des regards en coin. Celui que vous cherchez, il est pas en vacances, par contre j’ai envie de leur lancer. Il est parti, et il reviendra plus. Mais pourquoi je leur cracherais ça à la figure, alors que je refuse encore d’y croire ? La mort, c’est définitif comme saloperie. Mais Pete n’est pas mort, Pete ne peut pas mourir, il est immortel ce gamin mal nourri aux airs d’ange vêtu de noir. Hein, que tu peux pas mourir ? Dis-leur, dis-moi, que t’es pas vraiment parti pour ne pas revenir. Que c’est juste un jeu, une blague qui dure depuis trop longtemps mais que tu vas bientôt arrêter de faire le con, que tu vas revenir et nous regarder de haut en te marrant parce qu’on y a cru, et qu’on est la pire bande de blaireaux que t’as jamais vue…

Pour m’occuper l’esprit, je poursuis le grand nettoyage entamé dès mon arrivée. J’ai pas menti : le patron semble avoir pris des vacances inexpliquées. Les lumières sont allumées à mon arrivée, comme d’habitude, mais personne n’a plus vu Anthony Black depuis le weekend dernier. Les portes du bar ne sont plus verrouillées, mais personne ne semble l’avoir encore réalisé, alors je maintiens les apparences. Ça a le mérite de me donner quelque chose à faire : entre ça et rester au Black Dog, à baisser les yeux dès que je croise le regard de Jake, de Harry ou de Lucy… Mon choix est vite fait. Ton absence est plus forte là-bas - elle est audible dans chaque silence entre nos phrases trop vite marmonnées, elle nous observe depuis les encoignures et nous nargue chaque fois qu’on change de direction pour s’éviter, parce qu’on ne sait plus comment exister sans toi pour faire de nous plus qu’une composition d’individualités dissonantes. Tu savais nous parler ; tu savais faire de nous la bande, tu nous sortais des mélodies sur lesquelles on se calait instinctivement, mais tu n’es plus là et je crois que depuis ton départ, plus personne n’a touché un instrument.

Ton départ. Parce que tu vas revenir, t’as intérêt.

La porte du pub s’ouvre, et je ne peux pas m’empêcher de lever la tête avec un peu trop d’espoir, une question informulée qui éclate telle une bulle de savon, tel un espoir brisé, sur mes lèvres lorsque je reconnais la chevelure brune et les yeux immenses de Nicole. Nini la Londonienne, qu’on a recroisée dans ce coin paumé. T’as eu l’air de trouver ça normal, alors j’ai jamais posé de questions. J’en poserai pas davantage aujourd’hui - t’es plus là, et j’ai pas la force de continuer ce petit jeu sans toi.

« Fort comment ? » je demande tout de même, parce que come on Tasha, parce que c’est Nini et que j’ai pas envie qu’elle me dévisage de ses yeux de biche effarouchée. Parce qu’il faut donner le change en attendant que tu reviennes - tu vas revenir, tu m’entends ? Cette mauvaise plaisanterie a assez duré.

« Assez fort pour oublier ton prénom, ou juste assez pour l’oublier, lui ? » je demande, sans référence précise - plaisanterie devenue une habitude entre nous, un code : Nini a un grand amour secret, ce qui explique qu’elle ne cédera jamais à mes avances. Le fait que ce soit l’inverse, que ce soit moi qui aie juré mon coeur en premier - et à la plus belle blonde d’Angleterre par-dessus le marché - ne nous empêche aucunement de continuer à jouer. Parce que parfois, prétendre qu’on est d’autres personnes, c’est la seule chose qui empêche de sombrer dans le trou béant de l’absence et de cette chose affreuse qu’on appelle deuil. Et le premier qui me parle de déni, je lui mets mon poing dans la gueule.

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(#) Re: The tears that weren't shed (Saoirse) ●
12.04.24 19:09

How can I go on or find a way to be strong?
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T
HE TEARS THAT
WEREN'T SHED
Le Drunken Sailor Pub, c’était un peu un havre de paix en ce mois de juin plutôt tumultueux. Bon, l’endroit ne payait pas de mine, et une Abbott n’était certainement pas supposée y trainer, mais c’était justement pour cette raison qu’elle l’appréciait, en plus de la présence de Tasha évidemment. Là au moins, personne ne savait qui elle était vraiment, personne n’avait lu ce stupide article dans la Gazette et personne n’allait l’abreuver de menaces, ridicules ou effrayantes, ou pire, lui demander des nouvelles de ses fiançailles avec Arthur Bagshot. Le simple fait de le savoir était… reposant. S’écrouler sur ce tabouret et discuter avec la jolie rousse entre deux verres pendant au moins les deux prochaines heures lui semblait un programme absolument parfait. Elle espérait même voir Pete passer la porte du bar. Voilà au moins quelques semaines qu’elle ne l’avait pas vu. Il la ferait rire, saurait lui changer les idées en quelques minutes à peine. Pete le gardien de tous ses secrets, auprès du reste de la bande (à l’exception de Jules évidemment). L’ennui était qu’elle n’avait pas prévu qu’elle en viendrait à se greffer autant à leur petit groupe, pièce ajoutée, membre honoraire de la petite famille qu’ils s’étaient constitués. Elle avait sa vie de son côté, ne partageait pas les mêmes liens, mais elle était là, quelque part dans le paysage. Et parce qu’elle ne l’avait pas vu venir, ni Dolly ni Pete ne s’étaient spécialement concertés pour réfléchir à une histoire cohérente la concernant. Alors elle craignait que le secret ne tienne pas à grand chose, qu’un jour il finisse par s’étioler complètement. Mais est-ce que ce serait si grave ? Ils la connaissaient maintenant, et elle les connaissait aussi. Elle voulait croire que tout se passerait bien, qu’ils l’accepteraient.

Mais elle était aussi prudente, plus encore depuis qu’elle avait été recrutée chez les Passeurs. Alors, pour Tasha, elle était restée Nicole ou plutôt Nini (elle n’adhérait toujours pas au surnom mais avait fini par baisser les armes sur la question). Tasha, aussi différente d’elle que le jour de la nuit mais avec qui pourtant elle avait entretenu un rapport de séduction, lequel avait fini par se transformer en une manière de communiquer entre elles, sans arrières pensées. De toute façon, Tasha avait quelqu’un de ce qu’elle avait compris. Et Dolly… dans les faits, n’avait personne, même si son coeur et sa tête n’avaient pas encore envie de le comprendre. Il allait bien falloir pourtant… Et d’ailleurs, l’Irlandaise lui offrait le parfait remède.

Accoudée sur le bar, le menton appuyé sur ses paumes, la petite brune arborait une moue boudeuse, quelque peu vexée d’être si transparente. Ca se voyait donc tant que ça, qu’elle se trimbalait un coeur brisé ? « La deuxième option. » finit-elle par marmonner. Oublier son nom, enfin celui qu’elle s’était donné ici était loin d’être une bonne idée, alors oublier un peu Adam, ça ferait bien l’affaire. Quoiqu’elle était pas sûre que l’alcool suffise, un bon sortilège serait plus efficace. Evidemment, elle ne pouvait pas dire ça à Tasha. « Tu m’accompagnes ? » demanda-t-elle, pas franchement enthousiaste à l’idée de boire toute seule. Elle n’était pas sûre à quel point la marge de manoeuvre de la rousse s’étendait là-dessus. « A moins que ton patron risque de te tomber dessus. »

Ce verre, cet endroit, c’était très exactement ce dont elle avait besoin. Avec l’Irlandaise, il y avait comme un accord tacite: on ne s’épanchait pas en grands sentiments ou en confessions larmoyantes, à moins d’avoir une bonne dose d’alcool dans le sang. Ca valait mieux, parce que de toute façon elle ne pouvait rien lui dire de ce qu’il s’était passé, sous peine de se trahir. Et puis quand bien même, elle n’avait aucune envie de ressasser une fois de plus toute cette histoire, elle y pensait déjà bien assez comme ça. Parce qu’elle y avait cru, pour de vrai et que maintenant elle pouvait qu’imaginer quelle opinion il devait avoir après toute cette histoire.

Alors non, vraiment, elle ne voulait pas en parler. Juste oublier, un peu, ou au moins anesthésier la peine le temps de quelques heures. Et parler avec Tasha, de tout et de rien, des habitués, jouer leur petit jeu, avoir peut-être la surprise que Pete passe à l’improviste, comme elle savait qu’il avait souvent l’habitude de le faire.

Elle leva les yeux vers la rousse qui s’activait avec une aisance toute particulière. Dolly ne put s’empêcher de se faire la réflexion que l’Irlandaise aurait sans doute été très performante dans le domaine des potions. Enfin ça non plus, elle n’aurait jamais la possibilité de le lui dire. Son regard s’accrocha à sa silhouette et ce fut à ce moment qu’elle nota l’évidence qui aurait dû lui sauter aux yeux dès sont entrée dans l’établissement. Il y avait quelque chose de différent. C’était subtile, mais c’était bel et bien là: ses épaules légèrement plus affaissées. Ses traits marqués, ses yeux cernés et la pâleur de son teint, même comparé à d’habitude. Elle n’y avait pas pris garde alors qu’elle l’avait face à elle, parce que c’était Tasha, que Tasha et une petite vie tranquille où on se couche à vingt heures le soir, c’étaient deux monde différents, jamais destinés à se croiser.

Alors en soi, il n’y aurait rien de propre à surprendre quiconque la connaissait. Elles ne se connaissaient pas depuis si longtemps, mais Dolly l’avait déjà vue dans des états de fatigue assez impressionnants, de ceux qui auraient dû abattre la barmaid mais qu’elle semblait surmonter sans aucune difficulté avec une force quasi titanesque. Pourtant, cette fois-là, ça la frappait. Ca l’alertait même pas, alors qu’elle avait la très nette intuition, sans pouvoir mettre le doigt dessus, que quelque chose n’allait vraiment pas.

La petite brune se sentait coincée. Elle hésitait, soudainement un peu mal à l’aise. C’est lorsque la rousse déposa un verre plein devant elle, qu’elle se décida à rompre l’accord tacite qui voulait qu’on ne s’épanche pas sur ses sentiments, pas en ayant l’esprit clair. « Tasha… t’as vraiment une tête affreuse… est-ce que ça va ? » Elle ne prenait pas de gants, avec elle, elle n’en avait jamais pris. Les ronds de jambe et les politesses, c’était pas le truc de l’Irlandaise. A elle, Dolly pouvait dire les choses, même un peu abruptement. Et si Tasha s’énervait, protestait, râlait, et bien ce ne serait pas grave, elle en avait vu d’autres.

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myocarde : lesbienne assumée et revendiquée, coeur qui bat pour les beaux yeux d'une blonde en particulier.
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(#) Re: The tears that weren't shed (Saoirse) ●
02.05.24 0:42
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T
HE TEARS THAT WEREN’T SHED
J’ai toujours dit que j’étais une solitaire. Un esprit libre, une aventurière. J’ai toujours dit que j’avais rien signé, et que je partirais comme je suis arrivée. Que je préviendrais pas, qu’un jour le lit serait défait et que je le ferais plus jamais - non que je sois du genre à tirer les draps au cordeau, de toute manière. Et il m’est arrivé d’imaginer la scène, quelques fois. Des variantes sur un même thème, vous qui restez et moi qui m’en vais. Un cadeau pour Lucy, un pour Harry, deux pour toi, rien pour Jake - évidemment. Et pour Jules…

J’ai pas eu le temps de te raconter, pour Jules.
J’aurais voulu, pourtant.
J’avais juste besoin d’un peu plus de temps.


Pas envie - plus envie - de penser à tout ça. Parce que c’est pas moi qui suis partie, je me retrouve à être de celles qui restent. Et putain qu’est-ce que je déteste ça. Je déteste me lever chaque matin dans un monde où tu n’es pas, alors tant pis pour le deuil et tant pis pour cette chose triste que d’autres aiment appeler réalité. Je n’ai jamais cessé de te parler, comme si en fait d’absence, t’étais plus présent que jamais.

Toujours là pour écouter tes conneries, Tasha que tu répondrais.
J’ai que ça à foutre, de toute façon.


En ta compagnie, on avait toujours tout le temps devant nous. Désormais, les minutes font mal, et on s’abrutit tous comme on peut pour oublier que le temps passe sans toi. Harry pleure, j’en ai marre de voir ses yeux rougis par les larmes - marre de pas avoir les mots ni les gestes pour le consoler. Lucy disparaît, elle court enterrer ses secrets en forêt, de nous tous, c’est peut-être la plus sauvage après tout. Elle était là, quand… Non. J’ai d’autres histoires à te raconter. Jake qui s’est remis au sport, tu devrais le voir, avec son gabarit de crevette mal musclée, ça tient du ridicule mais personne n’oserait le lui faire remarquer. Il a une lueur dangereuse dans les yeux, ces derniers temps. Et Jules…

Putain, Pete, qu’est-ce que t’es nul d’être parti comme ça.
Je te déteste de plus être là pour m’interrompre quand je te raconte un truc, t’avais le chic pour couper court aux moments trop sérieux parce que…


Eh regarde, Tash’,
C'EST UNE HUÎTRE EN PLASTIQUE, QUAND T'APPUIES DESSUS ÇA FAIT POUET-POUET !

Espèce de crétin des îles.
Reviens.


Mais ce n’est pas ta silhouette dégingandée qui pousse la porte du bar. Pas ta chevelure désordonnée - même si la sienne pourrait aussi bénéficier d’un coup de peigne, mais eh, qui suis-je pour juger, moi l’Irlandaise à la crinière enflammée.

Et même si elle n’est pas toi -

Même si personne d’autre n’est toi, t’es unique.
T’étais.
Saloperie de conjugaison au passé.


- même si elle n’est pas toi, j’apprécie assez sa compagnie pour ne pas l’envoyer chier tout de suite. Nini est drôle, Nini ne pose pas de questions, ou seulement pour jouer à prétendre qu’on a des sentiments inavoués l’une pour l’autre. Sauf que là, il semblerait que la réalité s’immisce dans notre petit jeu, et il va bien falloir qu’on finisse par parler de ce grand dadais avec lequel je l’ai déjà vue traîner. Enfin non, pas traîner. Nini a ce truc dans l’attitude, ce chic que je perçois parfois chez Jules aussi, cette démarche parfaitement assurée qui vous indique qu’elle connaît sa place dans l’univers. Qu’elle se joue des règles, mais qu’au fond, elle les respecte. Qu’il y a un ordre dans le chaos, et que même le désordre obéit à certaines règles, respecte certaines limites. Un jour, je m’intéresserai suffisamment à ce genre de détails pour comprendre de quoi il retourne. Pour l’instant, je me contente d’élaborer des théories fantaisistes à moitié formulées : Jules et Nini sont des descendantes de nobles françaises, exilées du Continent - et tant pis si la Révolution s’est finie il y a plus de 150 ans. Nini et Jules sont des mannequins pour une maison de haute couture, en cavale suite à un braquage qui a mal tourné. Jules et Nini… Mais je me lasse vite de ce petit jeu, je préfère celui de notre conversation, à laquelle je reviens comme si de rien.

« Je te prépare ça. Un Spécial Coeur Brisé, coming right up ! »

Je m’apprête à lui demander s’il lui faut de l’aide pour rappeler au crétin qui lui a cassé les sentiments que traiter une demoiselle comme ça, ça ne se fait pas. Je serais pas contre l’idée d’aller briser quelques nez, en ce moment -

Et c’est ainsi que la flamboyante Irlandaise finit au commissariat.

Ta gueule, Petey.
Je suis assez fine pour pas me laisser attraper. Et je cours plus vite que n’importe quel poulet en uniforme.
Et puis, c’est de ta faute, si je suis de cette humeur.


« Avec plaisir - tu paies ? »
Tu perds pas le nord, hein ?
Foutus Irlandais et votre argent…

Ose te plaindre, seulement. T’as jamais payé une seule conso.

« Le patron est parti en vacances, je crois. » Je ne m’appesantis pas sur le côté étrange de cette situation, dont je compte bien tirer enfin pleinement profit. « Du coup, je te suis, deux Coeurs Brisés… » Je n’achève pas ma phrase. Parce que c’est trop vrai.

C’est ça, fais-nous chouiner.
T’as pas le cœur cassé, Tash’.
Ça finira par passer.
Qu’est-ce que t’en sais ?

Fabriquer deux cocktails. Le regard sur les verres, sur mes mains, sur le comptoir où je les dépose sans trop de délicatesses. Le Coeur Brisé, recette de la maison, c’est deux parts de gin, une de vermouth et deux - ou une, si je suis d’humeur traître - part de jus de framboises. Pour la déco, une rondelle d’orange sanguine, et en avant Ferdinand comme disent les vioques. Et me revoilà face à Nini, et à ses grands yeux de biche noyée, et à sa question qui me tombe dessus comme une tonne de briques.

Et puis, on critique mes manières.

« Eh ben, merci pas merci, Nini. On va dire que j’ai vu des jours meilleurs, depuis… »

Oh merde.
Elle sait pas.
Personne lui a dit.

Personne lui a dit quoi, Tash’ ?
Les mots que tu gardes en toi ?
Les faits que tu refuses d’affronter ?

« Merde. Nini, je… »

Allez, crache-la, ta putain de Valda.

« Y a pas de bonne manière de t’annoncer ça, j’imagine. »

N’empêche que j’essaie. Je fais de mon mieux, version main étendue au-dessus du comptoir pour étreindre la sienne. Version “vaudrait mieux que tu t’assoies pour que je te dise”, limite “attends, je sors un mouchoir”. Sauf que j’ai pas de mouchoir.

« Pete… est parti. »

Parti, hein ?
Tu peux faire mieux que ça.
Sauf que non, justement. Je peux pas.


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labeur : diplômée depuis un peu plus d'un an, elle était jusqu'à il y a peu assistante parjurante au Magenmagot. désormais sans emploi, elle cherche sa voie
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particularité physique : une cicatrice sur la tempe droite, due à une malheureuse rencontre avec un cognard lors de son tout premier match de quidditch
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(#) Re: The tears that weren't shed (Saoirse) ●
13.05.24 20:38

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Un spécial Coeur Brisé.

C’était ça qu’elle avait, le coeur brisé ? Parce que, quand on y pensait, ils se connaissaient pas depuis longtemps. Elle avait fréquenté des garçons sur de plus longues durées que ça. Mais si elle avait parfois eu de la peine à la fin, cette fois ça avait rien à voir. Ca pesait lourd dans sa poitrine, en fait tout pesait lourd. Elle se sentait mal, coupable de ne pas l’avoir contacté mais avait peur de le faire, d’être intrusive, de forcer un échange dont il n’avait peut-être pas envie. Et qu’il le lui dise, évidemment. Ils n’avaient eu que quelques rendez-vous, soit pas grand chose quand on y pensait. Mais le fait était là, il lui manquait. Il lui manquait quand quelque chose de drôle lui arrivait et qu’elle avait envie de le lui raconter. Quand elle voyait des affiches du film qu’ils avaient vu, passait devant le café où ils avaient été, ou encore dans le parc là où ils avaient discuté pour la première fois - raison pour laquelle elle évitait cet endroit en fait.

Donc oui, peut-être bien que c’était ça, un coeur brisé. Elle sentait déjà qu’il allait falloir du temps pour recoller les morceaux. Ca ne lui plaisait que moyennement d’être si transparente, qu’on puisse lire si facilement en elle, mais peut-être que ce cocktail là serait une sorte de remède. Ca ne pouvait pas empirer les choses en tout cas, et de toute façon elle ne comptait pas non plus boire jusqu’à perdre ses moyens, il ne manquerait plus qu’elle lâche une information qu’elle aurait dû garder pour elle.

« Evidemment que je paie. » Dolly, ou plutôt Nicole ne refusait jamais de sortir son porte-monnaie. Plus d’une fois elle avait aussi payé pour les autres, parce qu’elle ne se doutait que trop bien qu’ils n’avaient pas les mêmes moyens qu’elle, et c’est vrai, peut-être qu’elle se sentait un peu coupable de mentir. Ce qui avait été normal au début devenait pesant, au fur et à mesure que les liens se tissaient, que les amitiés naissaient. Elle se demandait vraiment comment Pete faisait pour garder si bien le secret. De ce qu’elle avait compris, il se sentait plus moldu que sorcier et c’était peut-être là la clef. Il faudrait qu’elle lui demande à l’occasion.

Elle déposa rapidement l’argent nécessaire sur le comptoir. Maitriser la devise sans magie lui avait pris un peu de temps, mais c’était depuis un moment devenu chose naturelle.

Elle tiqua pourtant à la remarque de Tasha, haussa les sources. Deux Coeurs Brisés ? Devait-elle comprendre que la mystérieuse demoiselle que la rousse fréquentait avait été finalement une déception ? Ou y avait-il autre chose ? La petite brune connaissait trop bien l’Irlandaise pour poser une question si précise. Si cette dernière voulait en parler, elle en parlerait et sinon aucune des interrogations de Dolly ne trouveraient réponse, quelle que soit la manière dont elle demanderait. Alors elle ne dit rien du tout, la regardant avec une certaine fascination composer le cocktail. Ça ressemblait vraiment à la fabrication d’une potion, ne pouvait-elle s’empêcher de penser à chaque fois qu’elle voyait quelqu’un oeuvrer. Peut-être devrait-elle s’essayer à l’exercice, créer des combinaisons différentes à l’aide de magie ? Ça la distrairait un peu, les heures étaient parfois longues dans cet appartement vide. Elle but quelques gorgées de la boisson et sut que ça pouvait lui remonter le moral, ne serait-ce qu’un peu.

Mais même si elle voulait rester silencieuse, elle ne pouvait pas en voyant le visage de Tasha. Elle était toute prête à se faire envoyer balader, ce qui en fait ne serait pas si grave. Il s’agissait simplement d’ouvrir une porte, libre à la rouquine de s’y engager ou pas.

Mais la réponse, elle n’y était pas préparée.
Pas préparée à ce que d’un coup, la fière irlandaise semble gênée. Pas à son aise en tout cas.
Et certainement pas à ce qu’elle ait quelque chose à lui annoncer.

Dolores oublia le cocktail, écarquilla les yeux alors qu’un frisson lui parcourait l’échine. Et elle le repoussait avec force cet instinct, celui qui lui soufflait que quelque chose de grave était arrivé. Elle eut froid d’un coup - personne n’avait l’idée de mettre du chauffage par ici ?

Le temps se suspendit. Le silence lui paraissait si lourd, un miasme gluant dont elle ne parvenait à se sortir. Pourtant, elle aurait voulu qu’il dure, ce silence. Parce que tant qu’il durait, tant que rien n’était dit, tout allait bien. Rien de mal n’ était arrivé.

Mais ils furent dits, ces mots. La voix de Tasha s’éleva dans l’air, couperet d’une condamnation.

Pete… est parti.

« Parti où ? En vacances ? » Les mots étaient sortis d’eux même, avant qu’elle ait pu les réfléchir ou les retenir. Ils se voulaient légers, une simple question. Mais son sourire avait plutôt forme de grimace, sa voix des inflexions de fausses notes, le fil de ses mots qui déraillait dans sa gorge.

Tu sais très bien ce que ça veut dire.

Ces mots là, elle les avait déjà entendus, ce regard-là déjà vu, il y a une dizaine d’années. Son père qui faisait de son mieux pour lui expliquer, elle qui refusait de comprendre, la perte, le départ définitif. Que plus jamais elle ne reverrait sa maman, sentirait son parfum, embrasserait la douceur de ses joues, se collerait à ses jambes pour attirer son attention.

Et là, c’était Pete qu’elle avait dans la tête. Les mots de Pete, les sourires de Pete, le rire de Pete. Ses plaisanteries parfois un peu idiotes mais qui la faisaient rire quand même, son regard espiègle, sa voix d’or quand il chantait, ses bras qui savaient enserrer et faire disparaitre le chagrin, ses maux qu’il ne disait pas, parce qu’il en portait plus que ce qu’il laissait penser.

Alors non, c’était pas possible que tout ça disparaisse. Ça n’avait pas le droit d’exister et elle refusait.

Elle regardait Tasha, seulement Tasha, parce que l’Irlandaise allait forcément lui dire que oui, Pete était parti, en voyage. Et que c’était pas grave, parce qu’il allait bien et qu’il reviendrait.


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(#) Re: The tears that weren't shed (Saoirse) ●
19.06.24 0:48
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ft. @Dolores Abbott | THÈME | deuil, idéation suicidaire
Je ne peux pas.

Va bien falloir.
C’est pas comme si quelqu’un d’autre allait le dire à ta place.

Je peux pas, je te dis.

C’est pas vrai.
T’as des couilles jusqu’au moment où il en faut vraiment, hein, Tash’ ?

Tais-toi.

C’est pas près d’arriver.
Tu sais que c’est juste dans ta tête, pas vrai ?

Je peux pas.

Non.
C’est pas que tu ne peux pas.

Je ne veux pas.

Voilà.
Au moins, maintenant, tu es honnête avec toi-même.
Maintenant, il est temps de l’être avec Nicole.

« Non. Pas… Pas en vacances. »

Mes fausses notes font comme un écho à celles de Nini, qui me pose des questions con - ma réponse ne vaut pas mieux. On danse autour de ce sujet qu’on évite soigneusement, mais va bien falloir que quelqu’un mette les pieds dans le plat, et évidemment ça va être moi.

J’ai pas de tact, j’en ai jamais eu. Mais pour une fois, ça va m’aider. Enfin, ça devrait. Parce que je voudrais, vraiment, les mots sont juste là, mais j’y arrive pas. Si je le dis, ça devient vrai. Si je le dis, c’est une personne de plus qui saura que tu n’es plus là…

Je serai toujours là.

Joue pas au con.
Tu sais très bien ce que je veux dire.


Si je le dis, je vais voir ses yeux se remplir de ces larmes que je devine. Mais c’est pas ça le problème. Le problème, c’est que si je le dis, je vais pleurer aussi. Et je ne peux pas pleurer.

C’est pas une question de pudeur ou d’un autre truc aussi débile que ça. C’est juste que je sais pas comment faire, pour pleurer devant quelqu’un d’autre. J’ai pas chialé quand on t’a dit au revoir - pas adieu, on est pas du genre religieux. J’ai pas chialé quand on s’est tenu la main devant tes cendres dispersées. Harry a pleuré toutes les larmes de son corps, tu t’en doutes sûrement. Lucy tenait à peine debout. Jules s’est collée à moi, personne ne faisait attention à nous de toute façon. On a chacun porté notre deuil comme l’autre sa croix - ouais, j’ai des vieux réflexes d’éducation catholique qui résistent, on ne se refait pas. Jake était défoncé, soi-disant pour te rendre un dernier hommage.

Genre, il compte devenir sobre après ?
Eh bah celle-là, c’est la meilleure de l’année.

« Il est… »

Respire.
Il est pas loin, le mot que tu cherches.
Tu vas y arriver.

« Il est mort. »

Le mot est posé. Lâché comme une bombe, et pourtant posé avec toute la délicatesse dont je suis capable. Je m’accroche au comptoir si fort que mes ongles inexistants vont creuser de nouvelles rainures dans le bois mal ciré, mais la douleur fait du bien, la douleur me distrait du vide qui est là, dans lequel il serait si facile de sauter à pieds joints. Je préférerais exploser, mais non. Ce serait trop facile. Et quand je puise en moi pour trouver la colère, qui d’habitude joue les alliées fidèles et demeure accessible, bouillonnant sous la surface, cette salope joue à cache-cache.

C’est bien le moment de me lâcher.

Je vais tout de même pas te tenir la main tout le temps.
J’ai pas que ça à foutre.

« Je suis désolée, Nicole. »

Politesse de base, convenance dégueulasse qui me râpe la langue. Et puis quoi encore, mes sincères condoléances ? Comme si ça allait changer quelque chose à l’étau qui me serre le cœur. Comme si ça allait chasser les larmes que je vois poindre dans les yeux immenses de Nini.

Main tendue par-dessus le comptoir, et tant pis pour l’écharde qui se loge au passage dans une jointure de l’index. « Je… Vraiment, je voulais pas que tu l’apprennes comme ça. On aurait dû… » On aurait dû quoi, au juste ? Penser à tous ceux que t’as aimés avant nous. Ou à côté. Peut-être qu’il y en a d’autres, des filles et des garçons, t’étais pas du genre à discriminer là-dessus. Amoureux des âmes plus que des corps, tu tombais amoureux comme d’autres tombent d’une chaise. J’ai toujours préféré penser qu’il n’y avait que la bande, mais pour toi c’était pas vrai, tu avais d’autres familles. Des amis, éparpillés un peu partout, parce que t’as voyagé, parce qu’avant de nous fédérer autour de toi, t’as eu une vie, même si t’aimais pas trop en parler. « Merde, Nini, je… Viens, on sort. »

De l’air, sinon je vais étouffer. J’entraîne Nicole dans mon sillage, sa main minuscule dans la mienne couverte de cals dûs à l’eau trop chaude de la plonge et au saxophone dont je joue avec une violence rare. « Je sors cinq minutes, allez pas avoir des idées trop con » je lance à la cantonade. « Le premier que je trouve derrière le bar ou occupé à plonger dans la caisse, je l’émascule au lance-flammes » je menace, et c’est plus qu’à moitié sérieux. Je sais pas où je trouve la force de pas chialer, parce que maintenant la plaie est ouverte et c’est béant, Pete, je peux voir le vide que ton absence crée…

Et putain, faut qu’on me retienne, sinon je vais plonger dedans.

Fuite en avant, la porte de sortie en objectif avant le grand saut. Faut de l’air, pour oxygéner le cerveau. Nini toujours derrière moi, sans doute encore sonnée, je claque la porte un peu plus fort qu’il ne faudrait. Évidemment, il fait un temps magnifique. Comme chaque jour depuis que t’es parti. À croire que l’été et toi, vous pouviez pas cohabiter.

C’est trop injuste.
Le monde aussi devrait pleurer.
Peut-être que ça aiderait.


Tu crois vraiment ?

Je sais pas.
Mais rien ne peut être pire que ce moment.


Réflexe de fin de soirée, j’ai passé un bras autour de la taille de Nicole. Pas de flirt, cette fois. Juste un soutien, un support, autant pour elle que pour moi.

« Je suis désolée… »

Désolée de quoi ?

Que tu ne sois plus là.
T’aurais eu des mots bien plus classe, plus doux aussi.
Moi, je sais pas comment faire ça.

C’est toi qui aurais dû rester.
Moi, je sais survivre…
Mais pas vivre sans toi.


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22.07.24 19:23

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La supposition émise se heurta à un mur. Ses mains tremblaient et elle ne s’en rendait même pas compte. Le silence s’installa, aussi épais qu’un torrent de boue. On aurait pu découper des tranches de ce silence et en fait ça n’aurait même pas suffi à l’alléger un peu. Elle eut froid d’un coup, sans trop comprendre comment c’était possible. Peut-être que quelqu’un avait laissé la porte ouverte ? Ou une fenêtre ? C’était bien ça, il devait y avoir un sacré courant d’air. Elle devait prévenir Tasha, vite, avant que quelqu’un tombe malade. Ou aller elle-même voir et trouver la source du problème. Ce serait le mieux, parce que si elle allait voir, elle n’aurait pas à rester là plantée sur son tabouret comme une idiote à dévisager l’Irlandaise et à rester muette. Et surtout, surtout, elle n’aurait pas à entendre quoique ce soit de plus.

Pas en vacances.

Tais-toi. TAIS-TOI, avait-elle envie de lui dire. Non, de lui hurler.

Mais elle ne s’était pas tue, elle avait brisé le silence, et les mots que la petite brune redoutait tant s’infiltraient partout désormais, jusque sous sa peau.

Pete est mort.

Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort Mort

Le mot résonnait, répété en boucle par une voix moqueuse. Ca sonnait trop familier cette annonce. Mais cette fois, elle n’arrivait plus à refuser cette réalité. En fait, elle laissait le mot circuler, tandis qu’elle était inerte, comme si elle ne comprenait pas. Elle ne réfléchissait plus à rien, ne pleurait pas, ne hurlait pas, ne disait rien du tout. Elle regardait Tasha, espérant presque voir la rousse éclater de rire, lui annoncer que tout ceci n'était qu’une vaste plaisanterie. Ou mieux, voir Pete sauter de derrière le comptoir comme un diable hors de sa boite. Elle aurait sursauté de trouille, les aurait ensuite insultés tous les deux. Comment avaient-ils pu lui faire une peur pareille ? Mais à la fin, le soulagement l’aurait emporté sur tout le reste. Ils auraient ri, bu des verres.

Alors non, elle ne pouvait pas envisager un monde où ça n’existerait pas. Ou plus. Où le rire de Pete ne serait qu’un lointain souvenir.

Tasha disait des choses. Dolly pouvait le voir, ses lèvres remuaient, des mots avaient l’air d’en sortir mais elle ne les entendait pas vraiment, ou plutôt, ils ne faisaient pas sens, imbriqués les uns aux autres comme les pièces d’un puzzle qu’on venait de secouer. Mais la dernière suggestion parvint par miracle par l’atteindre.

On sort. D’accord on sort.

C’était très bien ça, sortir. Elle se laissa entrainer comme une enfant, n’eut même pas envie de rire aux avertissements de l’Irlandaise dont le caractère pourtant l’amusait toujours beaucoup. Elle ne savait pas quoi faire d’elle, alors elle suivait bêtement. Mais à peine passée la porte, elle regretta d’être sortie, parce que l’air frais de l’extérieur eut pour effet de la réveiller un peu. Il n’y avait rien de pire, parce que maintenant elle sentait les choses. La réalité lui tombait dessus et elle avait l’impression de couler. Que des pierres remplissaient son estomac. Pete était mort. Ils ne se connaissaient pas depuis longtemps pourtant. Elle n’était pas aussi proche de lui que la bande, c’était certain, mais ils avaient noué une forme d’amitié un peu étrange, du genre qu’il aurait été difficile d’expliquer. Du genre qui comptait.

Et maintenant, il ne serait plus là. Plus jamais.

L’injustice de la situation la frappa soudain. Le fait qu’il soit si jeune. Si talentueux. On ne pouvait pas mourir si jeune, ça ne pouvait pas exister. Et ce fut ce fait là, cette constatation qui emplit ses yeux de larmes alors qu’elle marchait derrière Tasha. Il faisait beau dehors. Si beau. Ca n’allait pas, ça ne collait pas. Il aurait dû pleuvoir. Le ciel aurait dû pleurer de tristesse, comme elle était sur le point de le faire. Elle n’avait pas envie de s’effondrer pourtant. Il y avait, auprès de la rousse, une sorte de pudeur des sentiments. Et puis, elle n’oubliait pas que ça devait être bien pire pour elle. Ils étaient peut-être amis tous les deux, mais la bande, c’était une famille, une vraie.

Dolores sentit un bras passé autour de sa taille. Elle n’avait aucun besoin de tourner la tête pour percevoir la proximité de Tasha, sentir leur chagrin commun. Et cette fois, elle laissa les larmes rouler sur ses joues, silencieusement.

Je suis désolée, mots encore répétés. Elle aurait dû trouver quelque chose de bien à répondre, quelque chose capable de réconforter. Au moins dire qu’elle aussi était désolée, mais pour le moment elle n’y arrivait pas, tout se nouait dans sa gorge. Une question pourtant se forma dans son esprit, aussi pénible et insoutenable qu’elle puisse paraitre. Il lui fallut bien quelques seconde, ou quelques minutes pour la poser, elle n’était pas très sûre. « Co… comment c’est arrivé ? »

Peut-être connaissait-elle déjà la réponse, au fond. Elle l’avait remarqué dès le début, ce goût de Pete pour certaines substances. Ce qu’elle avait cru récréatif au départ, elle avait réalisé par la suite que ça pouvait aller plus loin. Elle avait fini par comprendre, sans qu’aucun mot soit prononcé, que les marécages dans lesquels naviguaient le garçon étaient de ceux qui étaient bien trop loins pour qu’elle puisse les comprendre. Il avait ses monstres, ses démons qui le torturaient et qu’elle ne pouvait probablement envisager pleinement. Avaient-ils été assez forts pour l’emporter ? Pete avait-il succombé à ces poisons qu’il insufflait si souvent dans sa chair ?
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sang : moldue, sang aussi bourbeux que la bière de son pays natal, étincelles qui coulent dans les veines.
myocarde : lesbienne assumée et revendiquée, coeur qui bat pour les beaux yeux d'une blonde en particulier.
allegeance : les copains d'abord, la bande avant tout ; mais de bande il n'y a plus, alors elle se jette dans une nouvelle cause à corps perdu. Les Chasseurs sont sa nouvelle famille, dynamique dysfonctionnelle et conflits compris.
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(#) Re: The tears that weren't shed (Saoirse) ●
30.10.24 20:04
I can't leave my bed but I can't sleep, I got no clean clothes and I can't eat, And I smoke too much 'til I can't breathe
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HE TEARS THAT WEREN’T SHED
L’air frais a pour mérite de m’apaiser. Enfin, c’est un mérite tout relatif, même en temps normal, parce que je suis le genre de nana à qui le qualificatif apaisée convient aussi bien qu’un préservatif usagé à une poignée de parapluie. Alors quand, en plus, il fait beau et chaud, quand le soleil rebondit gaiement sur les façades lustrées de frais du petit village côtier dans lequel on s’est installés, quand l’univers tout entier semble conspirer à être joyeux alors qu’en moi, c’est l’émotion inverse qui domine… ça me donne envie de vriller sévère.

Encore plus que d’habitude, tu veux dire ?
Carrément plus.

Mais par je ne sais pas quelle force - peut-être une intervention divine,  mais ça fait bien longtemps que j’ai pas causé au vieux qu’est censé occuper les nuages, alors permets-moi d’en douter - je parviens à ne pas exploser. Pourtant, je voudrais. Je crève d’envie de repeindre le monde couleur flamme, couleur sang, couleur sombre et annonciatrice de violence. Je veux le salir, ce monde trop propre qui a refusé que tu continues à exister. Je veux le défigurer, jeter à bas chacune de ses figures d’autorité, dynamiter chaque institution et prendre juste assez de recul pour tout voir partir en fumée.

T’es sûre que tu veux pas juste chialer un coup ?

Non. C’est hors de question. Ce monde de merde m’a déjà pris beaucoup de choses, mais pas ma dignité.

Le mot exact, c’est “fierté”, Tash’.

Oh, ta gueule.

Alors, tout ce qui sort, c’est une sorte d’excuse pathétique. Le genre de banalité qui ferait pleurer un clerc de notaire. Le genre de connerie qui fait pleurer Nini, et moi je suis là, comme une imbécile, un bras autour de sa taille, à voir les larmes lui laver le visage. Pour avoir l’air un poil moins con, je passe mon autre bras autour de ses épaules. Au moins, je ne dois pas la regarder chialer. Au moins, je ne dois pas l’envier.

Parce que moi aussi, je voudrais pleurer.
Tu mérites au moins ça.


Mais pour tout ce que j’avais redouté ce moment, voilà que je ne verse pas une seule larme. Rien ne vient, juste ce vide immense qu’aucun câlin ne suffit à combler. Je finis par relâcher Nicole et je recule d’un pas, et on reste là à se regarder - ou plutôt, à s’éviter du regard, moi pour qu’elle puisse pleurer en paix et elle pour ne pas voir que je ne parviens même pas à te rendre cet hommage posthume. Ça dure un instant. Ou une éternité. Je ne sais pas et je m’en fiche. Je suis beaucoup trop occupée par la contemplation du chasme béant que ton départ - que ta disparition - que ton meurtre, parce qu’on va appeler un chat un chat… Bref. T’as laissé un trou en forme de Pete dans ma vie. Et dans celle de Nicole aussi.

Et le pire, dans tout ça, c’est que je peux même pas t’en vouloir. Ça m'aiderait. Pouvoir te rejeter, nier en bloc qu’on a un jour été amis, que je t’ai même connu avant que tu ne sois parti… Ouais, ça aiderait. Je crois.

Mais non.
Je dois continuer à vivre, moi. Vivre avec la douleur de savoir que t’es plus là, avec la peine de savoir que tu ne reviendras pas, que c’est pas juste des vacances ou une très mauvaise blague. Et je n’ai pas la moindre idée de par où commencer.

Commence par le début.
Commence par répondre à sa question.

« C’est Lucy qui l’a trouvé. »

J’ai pas les bons mots, ni les formes pour le dire. Alors le récit sort comme ça, brut de décoffrage et sans ambages. Pas de protections, et pas de désinfectant, ça pique et ça va saigner mais je sais pas faire autrement.

« Il était au Black Dog. » Ma voix ne me ressemble même pas. Je suis une speakerine de la BBC, je suis une gamine qui explique à sa copine que le Père Noël n’existe pas. Je suis quelqu’un d’autre que Tasha, quelqu’un d’extérieur à toute cette affaire. C’est pas une explication, c’est un rapport, donné dans une voix désincarnée comme si c’était pas le premier. « En bas des escaliers, comme s’il était tombé. Mais il n’y avait pas de marques, rien. Lucy nous a dit qu’elle avait entendu des voix, une dispute… Mais elle ne savait pas dire qui, elle n’a rien vu. Quand elle est arrivée… »

« Il était déjà mort. Elle a rien pu faire. »

Personne n’a rien pu faire. Même appeler un médecin aurait été inutile. Je t’avais vu au fond du gouffre, pourtant, je sais que t’étais déjà revenu de loin - très loin. Mais là, t’étais dans le seul endroit dont on ne revient pas. Et où personne, jamais, ne pourra aller te chercher.

Même si j’ai foutrement envie d’essayer.
C’est con que tu joues pas de la flûte.
Tu m’as sérieusement prise pour Orphée ?

C’est cru. C’est sec et pourtant ça dégouline, c’est un poinçon au travers du cœur et un maillet en pleine tronche tout à la fois. Et moi, j’inflige tout ça à Nicole sans parvenir à me soucier des larmes qui continuent, ou pas, de couler. Je peux même pas la regarder. Si je le fais, cette fois c’est sûr, je vais pleurer.

« On savait pas… » Merde, c’est quoi ce truc salé ?

Faut croire qu’en fait, tu sais chialer.

« On savait pas… » Non.

Eh si.

« On savait pas quoi faire, alors… »

Sans déconner ? Là, maintenant, faut que je me mette à chouiner ?

« On l’a veillé… pendant deux jours. »

Parce qu’on espérait contre tout espoir. Parce que la première étape du deuil, c’est le déni. Parce qu’on est trop jeune, parce qu’on est trop paumés, parce qu’on est infiniment trop vivants pour mourir, alors comment tu voulais qu’on comprenne ? On a veillé, sans en placer une. Le silence s’est emparé de notre squat comme un premier linceul, et on a passé deux jours, chacun enfermé dans sa propre bulle. Rien n’était réel. Puis le silence a fini par crever comme un vieux ballon de baudruche. Je sais même pas qui a parlé en premier - Jake, sans doute. Ou Harry. Je ne sais plus qui a versé les premières larmes - Jules, peut-être. Lucy avait le regard trop hanté pour pleurer. Et moi, jusqu’à trente secondes plus tôt, j’avais pas réussi.

« Et puis… On a dispersé ses cendres le long de la côte.

Je crois qu’il aurait aimé. »


J’espère.

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