temporalité du rp : août 1955
personnages concernés : RP LIBRE
trigger warnings : —
intervention autorisée du mj : [ ] oui [•••] non
autre(s) : Introduction de la nouvelle identité d'Erheÿbe Rowle, aka Camden Anderson.

IN FOR THE KILL - 2021-2022

La sorcière avait fait table rase, poussé d’un revers de main tout ce qui pouvait encore la relier à feu sa famille. Orpheline de parents, elle pouvait de même se considérer libérée de la tourmente indue par ses demi-frères, eux qui avaient disparu sans laisser la moindre indication de l’endroit où ils étaient allés se terrer. Sans doute le pater le savait-il, mais il n’était plus là pour le dire, et quand bien même, sans doute n’aurait-il pas daigné souffler l’information, peut-être pour observer de son tableau la suite des évènements. Toujours était-il que la cadette n’avait plus rien à craindre des hommes de sa famille, au moins pour le moment. Nul n’était là pour régir sa vie, lui imposer un rôle dans une organisation ou choisir sa profession sans prendre en considération ses propres passions. Elle n’avait pas mis bien longtemps à poser sa lettre de démission sur le bureau du chef de la brigade de police magique, en charge du réseau d’espionnage. Elle n’était pas non plus restée pour écouter ses doléances à ce sujet : perdre un métamorphomage était toujours un coup dur, tant ils étaient doués pour se faufiler ici et là, sans jamais se faire repérer. La ténébreuse toutefois, s’en moquait. Si elle devait espionner qui que ce soit, elle ne le ferait que parce qu’elle en avait décidé ainsi. Que Riddle aille se faire cuire un œuf de dragon, que le ministère s’écroule sous les fientes de hiboux, elle s’en lavait désormais les mains : elle ne laisserait plus personne utiliser son don contre son propre gré. Et pourtant, là, quelque part dans son esprit, il y avait cet écho persistant, ce timbre de voix avec quelques notes de reproches et de suppliques dans la même phrase, et qui la faisait ruminer depuis qu’elle avait décidé de tout envoyer paître dans les selles de veaudelune. Cette simple phrase en boucle, persistante, associée à un visage aimé, un nom adulé. Maudit soit EMILE ROSIER et son bon cœur, son empathie. Il avait fini par avoir raison d’elle, la poussant à s’interroger sur sa propre loyauté, sur ses propres désirs. Jusqu’alors, Caïn avait eu raison de sa volonté, lui imposant ses propres choix, sans jamais se soucier de ce qu’elle, elle pouvait vouloir. À bien y réfléchir, il n’avait pas eu à faire face à beaucoup de résistance : elle souffrait. Endurait la perte d’un fiancé qui aurait pu l’extirper de la décrépitude de sa vie, qui l’aurait arraché aux siens pour la faire sienne. Elle aurait été épouse et mère. Phalanges s’attardant un instant sur l’abdomen plat, souvenirs qu’elle avait jusqu’alors refoulé dans les tréfonds de son esprit, s’interdisant d’y songer, s’interdisant de faire un deuil qui aurait pu la pousser pourtant à aller de l’avant. Flirts nécessaire pour sa survie, sans jamais permettre au palpitant de s’accrocher à un espoir. Faux battements, cœur en berne. Elle avait depuis longtemps eu sa vengeance, sa vendetta avait déjà été menée, mais Caïn avait soufflé sur des braises vives, sans même le savoir : les moldus étaient dangereux lorsqu’ils craignaient ce qu’ils ne comprenaient pas, ce qu’ils ne pouvaient avoir. Ils avaient jugé la magie dangereuse, et les descendants de Merlin bien plus encore. C’était ainsi que l’un d’entre eux lui avait arraché l’espoir d’une vie meilleure. Elle pouvait bien accorder à Riddle la véracité de ses propos, de ses idées. Mais cette marque aujourd’hui… Elle ne représentait plus rien, sinon le regret et le dégoût de soi.

Et la métamorphomage de relâcher le total contrôle de son don, laisse apparaitre sur sa peau nue toutes ces marques d’encre, ces tatouages qui font d’elle ce qu’elle est aujourd’hui. Et puis il y a cette erreur, qu’elle caresse du bout des doigts. Rien ne saurait effacer la marque gravée par la magie noire, elle s’est déjà renseignée. Elle ne peut que la faire disparaitre sous sa propre volonté, tout comme elle maintient les runes et autres textes protecteurs cachés du regard des autres. Le regard lagon ne manque pas d’observer le reflet dans le miroir, de détailler chaque gravure qui orne sa carne, de se remémorer chaque signification, toujours pour un but bien distinct, destiné à sa protection dans ces tombeaux maudits qui auraient bien mieux fait d’être oubliés. Était-ce seulement efficace ? Même elle ne pouvait l’affirmer avec certitude, se contentant de croire en l’ésotérisme de ces runes antiques. Jamais elle n’avait montré cela à quiconque, exception faite d’Ealric, dans un moment de pure faiblesse, dans l’abandon de sa volonté. Peut-être était-il temps que cela change. Les paumes ne manquent pas d’accrocher la vasque de porcelaine, alors que déjà, le regard se fait plus dur, et que sous son unique désir, elle commence à modeler son prochain personnage, détrône Athenaïs Gauthier de son piédestal. Il y avait bien trop de monde qui connaissait cette facette, savait à qui elle était associée et quelles informations sa charmante tête blonde détenaient. Il était temps de changer, de rééquilibrer la balance de son âme. Prunelles changeantes, traits évoluant, chevelure incertaine… la composition était encore floue, hypothétique. Il lui fallait s’extirper des sentiers déjà connus, inspiration entre chaque visage prenant forme, balayant d’un battement de cils les détails qui lui semblaient futiles, ou prédisposé à s’interroger. Puis le fil conducteur, qu’elle attrape métaphoriquement du bout des doigts, s’y accroche tandis que l’intuition semble faire le reste, fait naître une personnalité bien loin de l’idée de départ, traits masculins, entre la finesse et la dureté, le regard ténébreux et les lèvres moqueuses. Elle n’était pas tant surprise : prendre l’apparence d’un homme n’était pas nouveau, mais bien plus rare… Un défi qu’elle était pourtant prête à relever, inspirant une goulée d’air avant de reprendre la composition, effaçant les tatouages représentatif de qui elle était en réalité… pour mieux faire marche arrière. Elle était lasse de les cacher en permanence, choisissant soigneusement les runes chanceuses. Leur trouver une histoire ne serait pas aussi difficile que de composer celle du personnage.

Ainsi naquit Camden, identifié sous toutes les coutures pour être capable de revêtir sa peau sans le moindre effort, sans la moindre hésitation. Enfant du nouveau-monde, l’accent encore chantant sur la langue, travail de diction constant pour qu’il transparaisse sans qu’elle n’ait à réfléchir. Avec le temps, il disparaitrait, mais pas tout de suite. Et puis il y avait tous ces petits détails, qui paraissaient insignifiants, mais étaient pourtant d’une importance capitale, de sa démarche à sa garde-robe, de sa baguette à sa manière de boire une bière. Il n’y avait pas de place pour le hasard, et elle ne se serait jamais permise de s’aventurer hors de la demeure sous ce visage sans être certaine de connaitre les tenants et aboutissants de ce dernier sur le bout des doigts. Lorsqu’enfin elle put s’estimer prête, elle eut une dernière pensée pour le responsable de la naissance de cet intriguant, secouant la tête pour chasser tout songe distrayant. Il était temps d’envoyer Camden dans le monde.

Il était d’abord apparu à Londres, sur le Chemin-de-Traverse, valise en main et l’air de quelqu’un qui découvre un tout nouvel endroit. Candide espoir de mener une nouvelle vie. La sorcière déguisée avait mené les curieux en bateau, jouant de théâtralité naturelle, laissant sa nouvelle identité prendre le dessus sur la sienne propre. Puis, il s’était promené dans les rues de Godric’s Hollow, toujours valise en main, à la recherche d’un lieu où vivre, et d’un travail. Elle avait passé des entretiens rapides, insistant sur le fait qu’il était du genre à suivre le gré du vent. Un travail de quelques heures par semaines – pour ne pas prendre le pas sur le sien – de soir de préférence. Et c’était ainsi que Camden avait atterri au Red Lion Pub. Elle ne possédait aucune compétence dans le métier de serveur, mais par les temps qui courent… elle doutait de tomber sur un rush si important que Camden en ferait tomber son plateau. La plupart du temps, de toute manière, il était bien souvent derrière le comptoir, à servir directement au bar, à poursuivre une conversation avec un sorcier ou un moldu quelconque. Des conversations qui recelaient toujours d’informations qu’elle gardait en tête. Pas comme si elle avait le choix après tout. Sa mémoire était juste… bien trop bonne. Ce début de soirée, d’ailleurs, ne différait pas des précédentes : Camden derrière son bar, à essuyer un verre jusqu’à ce qu’il brille, le regard se baladant un peu partout dans la salle… Passionnant.

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