temporalité du rp : juillet, 1955, quelques jours avant la pleine lune
personnages concernés :   @Dolores Abbott  & Cassiopeia Lestrange
trigger warnings : aucun pour l'instant
intervention autorisée du mj : [ ] oui [X] non
autre(s) : ///

IN FOR THE KILL - 2021-2022

Les lagunes ne s’étaient pas prises de fuite en direction de la voûte céleste qu’elle pouvait la sentir ramper sous la carne. Serpent insidieux à la morsure répandant son feu dans chaque parcelle de l’être, elle lui écartelait la raison en douce folie. Le crescendo sinistre n’éclaterait pas avant quelques jours. Prémices d’un mal à venir, d’une mutation abominable qui scinderait l’âme pour faire place à l’animal. Un sort devenu inévitable. Une fatalité à laquelle l’héritière se refusait, s’enlisant encore et toujours dans les expériences douteuses pour atténuer ses maux, pour s’affranchir du joug de la bête. Quête tue, secret bien gardé que les labres n’osaient formuler, encore moins à l’époux nouveau s’érigeant en origine de sa malédiction, les perles de pensées roulaient avec frénésie pour trouver la formule qui viendrait à bout de ses affres.

L’appétence pour l’art subtil des concoctions cultivée depuis le berceau de l’adolescence s’illustrait intérêt salvateur. Face aux vastes possibilités offertes, aux ingrédients à la pureté et l’excellence inégalées se dressant sur les étagères chaotiques du laboratoire ministériel, l’âme vibrait d’une exaltation rare. Seul le labeur offert à la pègre savait également ainsi éveiller l’être d’un brasier passionnel. Deux univers pas si éloignés, deux quêtes se rejoignant, se complétant. C’était bien au creux de l’alcôve intimiste du département des Mystères que la silhouette s’était échouée pour l’heure. Laboratoire gagné dans lequel l’héritière jouissait d’une intimité rare, la carcasse pouvait aisément se laisser aller à l’expression de l’affliction la rongeant. Les griffes férocement plantées dans le bois, elle y laissait sa marque, emprunte marquant la tendresse de l’essence, les raclements s’offraient en distraction de la fièvre montante. Quelques heures. Pas plus. Juste quelques heures avant de regagner la quiétude du chalet forestier.

Un profond grondement lugubre lui échappa de la gargue à l’échine redressée. Tout sur le masque du minois hurlait la détresse dans laquelle l’ascension d’Hécate la plongeait. Partagée entre exaltation et lutte interne, la chair perlait son inconfort. Teint diaphane, les griffes peinaient à offrir un brin de décence à la tignasse d’or. Ses fils rassemblés en un vulgaire chignon, le soupir lui écorchait les labres, chaque geste en supplice, en brûlure de cette viande qui hurlait d’une déchirure à venir. Quelques houles helléniques trébuchaient sur le palais asséché, timides protestations quand le cri de détresse se retrouvait muselé dans les entrailles. L’évidence brillait sous la caboche, le besoin devenu vorace, les talons s’élancèrent enfin hors de son antre. Masque de contenance affiché, la carne sirupeuse trahissait les affres éprouvés. Pourtant, la certitude que nul tiers n’oserait lui en faire la remarque confortait la cadence hâtive des pas. Une quête, une seule. Tentative un peu folle, vaine, de s’extirper l’espace de quelques heures du mal la rongeant lui fit passer le seuil de la réserve.

Il suffit d’une simple torsion du poignet pour que les fioles ne viennent à elle. Dernier joyaux à la mixture argent glissé dans la poche de sa blouse, offrande future pour le loup, son loup, en apaisement de leurs maux mutuels une fois l’intimité conjugale regagnée, la silhouette s’arrachait à nouveau de la pièce aux mille et une merveilles. « Innocent tant qu’on a pas prouvé qu’il est coupable, mon cher Nott. » Précisait une mélodie en écho dans le lointain, la déférence dans le ton laissait supposer d’une énième leçon de l’avocat guidant les pas hésitants de sa jeune recrue alors que leur chant s’éloignait en direction du tribunal. Leur conversation muée en vague cacophonie annonçait les hordes à venir, hâtant le pas, le squelette se heurta soudainement au détour d’un couloir à une masse plus légère. « Μα τα γένια του Μέρλιν... » Par la barbe de Merlin… Grondé sous les protestations de la bête, les lagunes contemplaient avec consternation les éclats parsemant le sol. Vagues scintillements des fioles qui s’étaient échappées de l’étreinte des phalanges, verre échoué dans la mer de mixtures aux mélanges hasardeux, elle voyait là le retardement de l’apaisement qu’hurlait la chair. Il suffit d’une fuite de ses eaux éternelles pour capter les contours du tiers importun pour que les alvéoles se contractent douloureusement. « Dolly. » Souffle lâché en vieux réflexe, les entrailles se creusaient en appel à rouler sous les côtelettes. La gêne s’ajoutait au chaos dans lequel l’enveloppe était plongé, souvenirs de cette rencontre inattendue à l’anniversaire du petit singe le mois précédant, la gargue demeurait interdite. L’héritière d’ordinaire exemple de froideur se muait en poupée fragile, la surprise peignant les traits du masque éprouvé par le joug d’Hécate. « Laisse-moi t’aider… » Faible murmure alors que les perles céruléennes captaient enfin la pile de dossiers échoués sur le carrelage ébène du département. L’instrument de magie agité dans une rotation élégante guida les parchemins et pochettes sombres entre ses griffes avant de les tendre à la jeune âme autrefois figure familière dans son cercle. Au saut de la justice magique reconnu sur l’un des documents, la curiosité ne put s’empêcher de percer la barrière des lippes. « Tu travailles au département de la Justice ? » Maigre tentative de l’amorce d’un dialogue, de capter quelques bribes de son existence quand elle était celle qui n’avait su demeurer à ses côtés, l’entente chaotique avec le père Abbott s’étant immiscée entre elles.

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TW: mentions de harcèlement au travail - deuil d'un parent

C’était arrivé un matin, l’un de ces matins qui ressemblait à tous les autres. Elle était entrée dans les bureaux assignés aux assistants parjurants, et l’attroupement formé si tôt l’avait alertée. Etait-elle donc en retard ? L’horloge murale lui indiquait bien que non, c’est donc que quelque chose s’était produit. Dolly s’était rapprochée de la mêlée, curieuse et quelque peu inquiète à la fois à l’idée de potentiellement entendre une sinistre nouvelle. C’était trop banal après tout: un décès, une mystérieuse disparition, un attentat de quelconque sorte. Au moins ça ne concernerait pas son père, car elle aurait été première au courant, n’est-ce pas ? Mais la pensée ne la quitta pas pour autant, s’agrippant, l’égratignant avant qu’enfin le pot-aux-roses ne lui fut révélé par l’une de ses collègues.

Il était parti.

On ne savait ni quand exactement, ni pourquoi, ni comment. Enfin, concernant les pourquoi, il y en avait des tas mis sur la table. Tant de suppositions qu’il était difficile de savoir ce qui était vrai et ce qui ne l’était pas. La petite brune avait senti le sang quitter son visage alors que son coeur s’accélérait. Elle avait reculé de quelques pas avant de se précipiter vers ce bureau où elle avait été diverses fois convoquée, chaque fois plus angoissée que la précédente, dans l’attente de ce qui pourrait ou non lui tomber dessus. La pièce avait été vidée, comme si personne ne l’avait jamais occupée.

C’était donc vrai. Le juge Rowle était parti. Elle s’était sentie incapable de bouger alors que cette information s’imprimait en elle, tandis qu’un poids immense avait peu à peu quitté ses épaules. Il était parti, vraisemblablement pour de bon.
Enfin, c’était ce qu’on racontait en tout cas. Il lui avait fallut quelques temps pour que son corps cesse de se tendre lorsqu’elle arrivait le matin, ou approchait le bureau, même de loin. Il lui en faudrait encore pour cesser d’entendre son pas dans les couloirs. Les derniers temps avant son départ, il l’avait pour ainsi dire ignorée et elle s’était demandée s’il ne s’agissait que du temps d’accalmie habituel avant qu’il revienne à la charge ou si Helen Umbridge avait eu quelque chose à y voir, après ce soir où Dolly avait été invitée chez elle. Difficile de le déterminer, mais au fond, était-ce si important ? Le résultat était le même, le juge Rowle n’était plus là, et sans lui les bureaux du département devenaient soudain un terrain bien moins hostile. Sans le poids de ces regards qui la jaugeaient, de cette silhouette sombre qui l’étouffait, même de loin, il ne fallut que quelques jours à peine pour que ses performances professionnelle redeviennent ce qu’elles avaient été avant toute cette histoire.

Certes, ça ne résolvait pas tous ses problèmes, tous ses questionnements au sujet de son avenir professionnel, mais au moins elle respirait. Elle sentait qu’elle avait des restes, des doutes qui persistaient, une confiance réellement ébranlée mais la peur qu’elle n’avait même pas compris ressentir se dissipait peu à peu. Lorsqu’elle marchait dans les couloirs, elle ne prenait plus mille précautions de crainte de le croiser. Mais peut-être aurait-elle dû faire plus attention justement, car elle heurta subitement une silhouette non identifiée alors qu’elle parcourait distraitement les couloirs. L’esprit vagabondait un peu trop, résultat d’un coeur récemment bien rempli par des sentiments encore neufs et il était désormais trop tard pour s’en repentir. « Pardon, je ne vous avais pas vue ! » Excuses un peu superflues à présent, alors qu’elle contemplait le carnage: des fioles au contenu non identifié brisées et les propres dossiers étalés au sol. La petite brune leva les yeux et reconnut sans peine la victime de sa maladresse. Ou peut-être était-elle deux victimes, difficile de le déterminer. Ses yeux s’écarquillèrent sous l’effet de la surprise. « Cass… Mrs Lestrange. » se corrigea-t-elle juste à temps. Avait-elle seulement encore le droit de l’appeler par son prénom, surtout ici ? Elle ne savait pas, ne savait plus.

Elle ne dit plus rien, la regarda bêtement agiter sa baguette et récupérer entre ses mains tous les dossiers tombés avant de les lui tendre. Dolly lui adressa un sourire polie, parce qu’elle n’avait aucune raison d’agir autrement et les récupéra. « Merci. ». Quoiqu’il se soit passé, c’était loin maintenant. Les colères de petite fille l’avaient quittée depuis longtemps et la distance qui s’était creusée entre elles et bien… c’était comme ça, c’est tout. Alors elle se montrait aimable, un peu joviale même en répondant à sa question. « Oui. »

Tu le saurais si tu t’étais intéressée un peu à moi. 

Comme lors de leurs précédentes retrouvailles impromptues, une perfide petite voix s’insinua dans sa tête. Une voix qu’elle ne put chasser. « Depuis novembre dernier. » ajouta-t-elle, appuyant un peu sur ces mots. Huit mois, ça fait huit mois et tu n’en savais rien. Le fiel d’une rancoeur qu’elle ne savait même pas avoir, ne voulait pas avoir, s’insinuait partout et poussait pour sortir. Elle pensait à l’anniversaire, à Cassie qui s’était déplacée pour célébrer Hazel quand elle-même n’avait eu que de stupides cartes pour les siens. Cassie qui était là pour Ollie, pour Jules, pour d’autres peut-être, mais jamais pour elle.

Ce n’était pas comme si elle était seule, c’est vrai. Dolly avait des gens sur qui compter, une famille. Mais Cassiopeia avait été une amie de sa mère, peut-être la plus proche ici. La petite brune avait bien peu de contact avec sa famille maternelle, restée en France ou ailleurs sur le continent et d’autant qu’elle sache, Victoria avait eu relativement peu d’amis en Angleterre. Elle se souvenait l’avoir entendue traiter d’autres mères sang-purs de « mégères avec des idéaux datant du siècle dernier ». La blonde était un peu un lien qui la rattachait à celle qui n’était plus là. Mais elle l’avait laissée, au moment où la petite brune, alors seulement une enfant, avait eu le plus besoin d’elle.

Ca grondait, ça tonnait à l’intérieur, mais elle refusait de le laisser paraitre, sans être certaine de bien y arriver. Est-ce que son sourire sonnait juste ? Est-ce que sa voix ne la trahissait pas ? Elle ne pouvait que l’espérer. « Tu… vous voulez de l’aide ? » Elle désigna les restes des fioles, sans oser demander ce qu’elles contenaient - de toute façon, ça ne la regardait pas.  

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