temporalité du rp : février 1955
personnages concernés : @Dolores Abbott & @Mary Travers-Flint
trigger warnings : aucun, à part la fourberie de Mary.
intervention autorisée du mj : [] oui [X] non
autre(s) : /

IN FOR THE KILL - 2021-2022

La réunion fut levée et les représentants quittèrent un à un leur siège, certains poursuivant la discussion précédemment entamée dans un flot continu de messe-basses et commentaires mitigés tandis que d'autres se contentaient de quitter les lieux rapidement. A ce stade, il était difficile de déterminer quelles seraient les retombées de cette entrevue et ce, malgré tous les arguments qui y avaient été défendus. Une atmosphère en demi-teinte, où les tensions étaient palpables et où il avait été difficile de contenir les personnalités les plus imposantes. Je laissais échapper un profond soupir, désormais seule, abstraction faite de la plume à papote, qui continuait inlassablement d'inscrire chaque mot que je lui avais précédemment dicté, monologue quasi-continuel en l'absence d'assistant pour le faire à ma place. Les nerfs mis à rude épreuve sous la double charge de travail, je pris quelques instants pour souffler, au calme, sans doute les seuls qu'il me sera permis de prendre jusqu'à ce soir. Peut-être devrais-je réouvrir le poste ? Plusieurs mois s'étaient passés depuis ma dernière conférence de presse, et l'annonce que j'y avais faite pouvait sans doute être abrogée maintenant...car en vérité, je redoutais que cette cadence puisse encore durer. Et surtout, je redoutais de pouvoir la supporter encore longtemps, car il fallait bien avouer que tout ceci était épuisant et qu'il était facile de se laisser déborder par la situation...oui, sans doute était-il temps de reprendre un assistant. Rassemblant mes affaires, mon attention fut alors attirée par un petit bout de parchemin, coincé entre deux épais dossiers. "C'est un plaisir de travailler avec vous". Modeste note au filigrane discret qui tranchait avec les ribambelles de gnomes volants qui avaient subitement envahi les couloirs en récitant poèmes et déclarations à l'approche de la St-Valentin. Ici, il n'y avait que ces quelques mots, sobrement déposés sur mon bureau et qui aujourd'hui encore, parvenaient à me faire sourire malgré l'épuisement et la lassitude.

Quelque peu réconfortée, je rangeais soigneusement la note avant de quitter pour de bon la salle de réunion, la plume volant toujours dans mon sillage, retraçant les échanges et les commentaires à la syllabe près. Les bras chargés de dossiers et la tête encore encombrée des remarques vindicatives subies, je traversais le département de la justice magique ancien fief dont je connaissais encore chaque recoins par cœur, pour l'avoir administré un certain nombre d'années. Ailleurs, je croisais des employés sans vraiment les voir, trop occupée à ressasser en silence, mais répondant parfois machinalement lorsque l'on me saluait au vol.

Ainsi, je passais devant le bureau du Magenmagot dont les portes étaient restées grandes ouvertes, dévoilant ainsi la vue sur de nombreux bureaux et sur une effervescence moins vivace qu'à l'accoutumée. Je clignais alors des yeux et revins subitement sur mes pas à reculons, avant de passer la tête par l'encadrement de la porte.❝Miss Abbott, pourrais-je vous voir quelques minutes, je vous prie ?❞ lançais-je en posant le regard sur la fille de Ronald, me souciant guère de la déranger en plein travail. Immobile, j'attendis patiemment qu'elle me rejoigne -façon détournée de ne pas lui laisser le choix- avant de l'inviter à me suivre d'un geste de la main.❝Une chance que nous nous croisions aujourd'hui, n'est-ce pas ? Encore un peu, et j'aurai fini par penser que vous cherchiez à m'éviter...❞ fis-je d'un ton badin et innocent, tout en sachant pertinemment que je n'étais sans doute pas très loin de la vérité. C'était la meilleure amie de Meredith, après tout : aucune éloge ne pouvait être prononcée à mon égard lorsque c'était elle qui ouvrait la bouche. J'en étais bien consciente.

Sans frapper, je réquisitionnais un bureau du département au hasard, m'apprêtant à déloger ses occupants sans autre forme de cérémonie. Vide...tiens donc. Je lançais un rapide coup d'œil sur la plaque métallique qui indiquait @Georgie Weasley en lettres capitales.❝Evidemment, tout s'explique.❞ commentais-je pour moi-même. Encore sur une affaire urgente avec sa Greengrass, je suppose. Jamais à son poste, mais il faut dire que cela m'arrangeait présentement. Me délestant enfin des lourds dossiers que j'avais dans les bras, je fis signe à Dolores de fermer derrière elle.


^NB : pour la note reçue par Mary, il s'agit du gnome de l'animation de St-Valentin envoyé par Ronald

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Le grattement des plumes sur le papier était devenu une mélodie constante dans son quotidien, si bien qu’elle parvenait maintenant à en déceler les subtilités, les humeurs du propriétaire de la main qui la tenait. Mais nul répit pour rêvasser, elle relisait et validait divers formulaires. Relire, signer, tamponner. Un exercice difficile au début, qu’elle effectuait maintenant machinalement, capable d’apercevoir les manquements et les erreurs du premier coup d’oeil. C’est ainsi concentrée qu’elle finir pourtant par sentir qu’on l’observait alors qu’une ombre se dessinait sur le papier qu’elle était en train de parcourir du regard. Elle leva les yeux automatiquement, mi-agacée, mi-curieuse.

Si elle avait dû parier sur l’identité de la personne qui requerrait son attention, Mary Travers-Flint aurait sans l’ombre d’un doute été placée bonne dernière. Ses yeux écarquillés trahirent sa surprise l’espace d’un instant, avant qu’elle ait la présence d’esprit de se reprendre et d’afficher un sourire poli. Inutile d’être un génie pour comprendre que cette demande ne lui laissait en réalité pas le choix. « Bien sûr, Madame la Ministre. » Elle se leva donc et la suivit. Aux sous-entendus sur un évitement de sa part, elle choisit de ne pas répondre, jugeant qu’il aurait été absurde de nier cette évidence.

Tandis qu’elle marchait derrière elle, ses pensées allaient bon train. Elle connaissait Meredith depuis bien longtemps, et s’il y avait une recommandation faite par son amie et qu’elle avait toujours suivie, c’était de se débrouiller pour ne jamais croiser sa mère. Durant tout ce temps, elle y était parvenue, restant hors de portée et, elle le croyait, invisible à ses yeux. Apparemment, le jour tant redouté était arrivé. Mais ce n’était pas tant ce que Meredith en avait décrit, qui inquiétait Dolores. Les choses avaient changé. Mrs Travers-Flint n’était plus seulement la mère de sa meilleure amie et ancienne camarade d’école, elle était la Ministre de la Magie. Et Dolores, depuis un mois, n’était plus une employée comme une autre, mais une hors-le-loi. Cette femme avait tous les pouvoirs de l’interroger et de l’envoyer directement à Azkaban, pourquoi pas. Alors qu’elle gardait ce masque de politesse figé sur son visage, la jeune fille commençait à avoir des sueurs froides.

Elles approchèrent du bureau de Georgie Weasley et le soulagement qu’elle avait ressenti durant une seconde s’éteignit lorsqu’elle constata son absence. Obéissant à contre-coeur à l’ordre tacite, elle referma la porte derrière elle, s’enfermant avec cette femme qu’on lui avait appris à redouter.

Elle faisait de son mieux pour respirer le calme et la tranquillité, et espérait parvenir à faire illusion. Elle s’avança de quelques pas, joignant ses deux mains au niveau de ses cuisses. En l’absence d’invitation, elle préféra rester debout. Peut-être que cela aiderait à garder l’entretien bref, qui sait. « Que puis-je faire pour vous Madame la Ministre ? » Son coeur battait à tout rompre dans sa poitrine, si fort qu’elle craignait qu’il soit entendu. Elle tentait de se calmer, de se raisonner: il pouvait y avoir des milliers de raisons pour lesquels on la convoquait. Le travail notamment. Mais la Ministre en personne se déplacerait-elle pour parler à une simple assistante parjurante ? Souffla une voix désagréable dans sa tête. Le supplice de l’attente était insoutenable et elle aurait tout donné pour voir Georgie débarquer dans son bureau.

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Evidemment, la jeune sorcière me suivit sans faire d'histoires, m'emboîtant le pas dès que je lui en fit la demande. La pile de formulaires qu'elle était alors en train de relire attendra bien quelques minutes. Après tout, les tâches qui incombaient aux assistants parjurant étaient loin d'être d'une nécessité ou d'une urgence absolue ici, au Ministère, personne ne remarquera son absence. Non pas que la petite ne faisait pas bien son travail...à vrai dire je n'en avais pas la moindre idée, mais la vérité était que j'avais bien d'autres sombrals à fouetter que de m'intéresser aux insignifiantes et fastidieuses missions des gens de cet échelon bas-de-gamme.

Toujours est-il que je cherchais un endroit où nous aurions pu discuter tranquillement et c'est sur l'office inoccupé de Weasley que mon choix se porta. Une fois la porte refermée derrière nous, je m'installais naturellement derrière le bureau comme s'il m'avait toujours appartenu, repoussant les quelques affaires en désordre d'un large geste du bras pour m'assurer un peu d'espace. Pour une discussion telle que celle-là, on s'en contentera. Georgie n'était de toute façon pas réputé pour être l'auror le plus éclairé du couloir. Ni le plus ordonné songeais-je en portant un regard critique sur la pièce. Puis, je reportais mon attention sur Dolores, restée immobile et arborant un sourire de façade passablement figé et crispé. Ses mains étaient serrées l'une contre l'autre dans un marbre parfait, lui donnant l'air suspect de quelqu'un pris sur le fait, ou ne souhaitant rien d'autre que de se terrer sous terre. Un comble lorsque l'on travaillait déjà au niveau -2 du Ministère de la Magie. Mais que diable avait donc pu lui raconter Meredith à mon sujet ? Après ces quelques secondes d'inspection silencieuse, je finis par lâcher un petit soupir impatient :❝Allons Miss Abbott ce n'est pas la peine de vous mettre dans un état pareil, je ne vais pas vous manger. Approchez, et asseyez-vous là.❞ fis-je quelque peu désabusée, désignant l'un des sièges devant elle. Des bonnes manières, elle en avait sans aucun doute. Ronald avait bien rempli son rôle.

❝A vrai dire, il ne s'agit même pas de vous, si ça peut vous tranquilliser.❞ repris-je en croisant les mains devant moi. Raison de plus pour essayer de se calmer. Je n'avais aucune intention de la sanctionner ou de l'envoyer au bagne, ce qui à y bien penser, était quelque chose d'assez rare au vu de cette ribambelle d'incompétents avec qui il me fallait composer ici. J'eus finalement un fin sourire, certaine d'avoir toute son attention.❝Bien. Vous n'êtes pas sans savoir que dans quelques semaines aura lieu l'anniversaire de Meredith.❞ Dix-neuf ans déjà. Comme le temps passe vite, je la revois encore découvrant ses pouvoirs dans notre ancien manoir à Londres...❝Et puisque votre solide amitié n'est un secret pour personne, je pense que vous êtes la mieux placée pour m'aider à organiser les festivités. Il est vrai que la relation que j'entretiens avec ma fille n'est pas aussi sereine que je l'eus souhaité, vous en avez probablement déjà été avertie...c'est pourquoi votre avis me sera d'autant plus utile qu'il permettra de faire en sorte que cette journée se déroule selon ses préférences.❞ expliquais-je sans détour, m'appuyant sur la connivence des deux jeunes femmes et les nombreuses années de sympathie partagée.❝Qu'en dites-vous ?❞

Plus que tendue, les liens avec Meredith se faisaient de plus en plus distants, sinon chaotiques et c'est dans les reproches et accusations que nous évoluions toutes les deux depuis plusieurs années. Phénomène qui s'est encore dégradé depuis le retour de Conall et notre divorce, à tel point que je doutais de pouvoir rattraper le tir un jour. Mais au moins, on ne me reprocherait pas de vouloir essayer aujourd'hui et si Dolores Abbott pouvait me servir d'étrier pour y parvenir, alors je n'allais certainement pas me priver de cet atout qui finalement, avait bien plus à perdre en refusant mon offre qu'en ralliant ma proposition...

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Elle faisait de son mieux pour conserver une apparence aussi calme et posée que possible. Mais devant la Ministre de la Magie en personne la chose était loin d’être évidente, d’autant plus sans savoir pourquoi celle-ci l’avait convoquée. Et elle ne voyait aucune raison plausible qui n’inclue pas une situation où elle aurait de gros ennuis. Son état de préoccupation devait être plus visible qu’elle l’aurait voulu, mais elle obéit néanmoins et prit place face la sorcière.

Les premières paroles la délivrèrent déjà d’un grand poids, et la suite la tranquillisa tout-à-fait, ou presque. Ça, elle n’y avait pas pensé: ce n’était pas en tant que sa supérieure que cette femme l’avait demandée, mais en tant que mère de sa meilleure amie. Dolores aurait difficilement être plus intriguée. Elle acquiesça d’un simple signe de tête. Bien sûr qu’elle le savait. Par une extraordinaire coïncidence, leurs anniversaires se trouvaient d’ailleurs séparés l’un de l’autre de quelques jours seulement. Une occasion de plus pour les deux jeunes filles de célébrer l’événement à leur manière. Mais Mrs Travers-Flint semblait avoir certains plans en tête. La jeune Abbott resta silencieuse, haussant les sourcils, quelque peu surprise de la demande. D’après tout ce qu’avait pu lui raconter Meredith, elle n’aurait jamais pensé que la Ministre soit du genre à organiser une fête d’anniversaire pour sa fille. Encore moins à évoquer devant elle la difficulté de leurs relations. Et c’était peut-être là le point sensible, ce qui était le plus susceptible de la toucher. Pour elle qui n’avait plus sa mère, entendre celle de sa meilleure amie exprimer du regret et l’envie d’améliorer la situation lui faisait quelque chose, c’était certain. Mais ce n’était pas suffisant pour qu’elle accepte d’apporter son aide.

« Meredith sait que vous comptez lui organiser quelque chose ? » Dolores n’osa lui dire qu’elle désapprouverait très certainement les préférences de Mere en matière de célébration. La vérité, c’est que la jeune fille était plus que mal à l’aise. Le simple fait d’écouter ce discours lui donnait l’impression de faire quelque chose dans le dos de son amie. Et puis, cette dernière l’avait bien avertie: ne jamais se retrouver en tête à tête avec sa mère, ne jamais lui faire confiance. Et si on pouvait accuser la jolie blonde de manquer d’objectivité, Dolly pouvait aussi s’appuyer sur les opinions d’Hestia en la matière, qui étaient plus que tranchées.

Elle resta silencieuse, quelques instants. Avant de décider d’opter pour l’honnêteté, joignant ses mains devant elle et usant du langage formel qu’elle réservait aux adultes ayant une quelconque supériorité sur elle. « Madame la Ministre, j’entends ce que vous me dites et il est tout à votre honneur de vouloir faire ce geste envers Meredith. Mais je pense qu’il serait malvenu de ma part de participer à l’organisation d’un événement sans être certaine que c’est là ce qu’elle souhaiterait. J’espère que vous me comprenez. »

Elle n’avait pas le fin mot de l’histoire, bien sûr, mais elle doutait fortement que son amie accepte de près ou de loin une fête d’anniversaire organisée par sa mère. Et malgré les sentiments conflictuels qu’elle pouvait éprouver à ce sujet, accepter aurait été ni plus ni moins qu’une trahison, aux yeux de Mere en tout cas. Dolores se leva, espérant ainsi mettre fin à l’entretien. « Si vous n’avez plus besoin de moi… »

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L'adolescente semblait nerveuse, probablement à juste titre. Après tout, c'était la première fois que nous nous retrouvions en tête-à-tête et cette rencontre avait d'ailleurs été décidée et appliquée de façon immédiate, sans aucun préavis. La petite n'avait donc eu aucun moyen de s'y préparer, de l'empêcher ou même de s'y soustraire. L'effet de surprise pour mieux s'assurer de la docilité de son interlocuteur, une méthode sournoise mais qui donnait de bons résultats. Avec Dolores comme avec les plus influents. Certes, elle m'avait suivi sans aucune résistance jusqu'au bureau de mon très peu estimé cousin, mais cela avait eu pour effet de la rendre anxieuse au possible. Or, pour la suite de mon projet, j'avais besoin d'une Dolores apaisée et détendue. Dans de bonnes dispositions, propice à partager mon point de vue et mes idées.

C'est pourquoi je fis en sorte de la rassurer, faisant taire les innombrables scénarios pernicieux qui visiblement, lui accaparaient l'esprit. Les reproches ne pleuvront pas aujourd'hui, Miss Abbott, mais il n'est pas exclu que cela arrive bien plus tôt que prévu si vous déclinez ma requête. M'immiscer dans les petites affaires de la Justice magique n'était pas dans mes préoccupations imminentes mais je pouvais tout à fait revoir mes plans et les prioriser comme bon me semble. Tout cela ne dépendait que de l'intéressée. Pensez-donc un peu à vous, jeune fille. Et à tout ce que vous avez à perdre en cas de refus.

Malgré cette tranquillité apportée, la méfiance n'avait apparemment pas quitté la jeune sorcière et cela ne semblait pas être suffisant pour m'assurer sa coopération. Qu'à cela ne tienne, d'autres cartes attendaient d'être sorties de ma manche et tout bien considéré, je n'avais fait qu'exposer ma demande jusqu'à présent. Pour certains, il n'en fallait guère plus : un claquement de doigts, un battement de cils et chaque formulation trouvait immédiatement écho. Les Abbott étaient un peu plus retors, le père comme la fille...les niffleurs ne font pas des chats. Dolores semblait être faite de la même étoffe que Ronald, je comprenais pourquoi elle avait obtenu l'amitié de Meredith durant toutes ces années. Ainsi, j'apprenais à connaître mon interlocutrice -qui était d'emblée une bien meilleure fréquentation que l'autre alcoolique débraillé chez qui ma fille avait un jour choisi de fuguer et d'habiter. Ce..Peter, Pete Glasmachin quelque chose- un épisode misérable et que je tentais déjà d'oublier pour ensuite pouvoir le lui pardonner.

❝A vrai dire, je comptais lui faire la surprise. Renseigner Meredith sur les détails de ce projet et les préparatifs qui en découlent n'était donc pas à l'ordre du jour.❞ annonçais-je en toute transparence. Allais-je vraiment devoir l'expliquer ? Non pas que Meredith désapprouvait les surprises, c'était une sorcière suffisamment spontanée et franche pour les apprécier...en tout cas pour celles qui ne me concernaient pas. Et c'était bien-là le fond du problème. Rien de ce que je pouvais entreprendre ne semblait la contenter, ou même simplement lui plaire. Comme si elle état munie d'une sorte de réflexe systématique consistant à défaire méticuleusement chacune de mes tentatives. D'où ces négociations avec la meilleure amie.

Elle l'ignorait, mais Dolores était sans doute l'une des dernières à pouvoir m'aider avec ma fille. Si nous n'étions plus très proche depuis le procès de Conall, les choses ne s'étaient guère améliorées à sa libération l'année dernière et encore moins depuis notre récent divorce. Estimant beaucoup son père -probablement avec raison- je craignais que le fossé qui s'était creusé entre nous ne devienne permanent alors que son chantage pour aller vivre chez lui devenait de plus en plus insistant. Si rien n'était fait, cette éventualité finirait par se réaliser et c'était bien la dernière chose que je souhaitais.
La sorcière croisa les mains, en proie à quelques réflexions dont je ne doutais pas qu'elles fussent complexes en cet instant. Puis elle déclina poliment, arguant le fait qu'elle ne pourrait s'engager dans une quelconque démarche sans l'aval de son amie. Cette démarche était louable, me donnant un aperçu de la solide amitié qui s'était établie entre les deux jeunes femmes.❝Bien-sûr Miss Abbott, je comprends.❞ fis-je sobrement, ne cherchant pas à masquer ma déception.❝Je ne peux que vous être reconnaissante de la prévenance dont vous faites preuve à l'égard de ma fille.❞ Une sollicitude qui se faisait rare de nos jours, je devais bien l'admettre, même si j'eus préféré que la jeune Abbott la fourre dans sa poche après l'avoir pliée en quatre.❝Peut-être pourriez-vous simplement lui demander ce qu'elle souhaiterait dans ce cas ?❞ insistais-je tout de même, baissant mon degré d'exigence quant à la participation de l'adolescente face à moi.

Elle s'était levée, espérant ainsi être libérée de cette entrevue qui continuait de la mettre dans une posture délicate. Immobile, je la suivis des yeux, faisant mine de ne pas m'en préoccuper : j'avais encore beaucoup de questions à lui poser, maintenant que je l'avais sous la main. Laissant échapper un discret soupir, je repris quelque peu songeuse :❝J'aurais aimé partager et célébrer ces moments privilégiés avec elle, mais vous avez probablement raison, certaines personnes apprécient moins l'agitation des fêtes. Comment Meredith aimait-elle profiter de son anniversaire lorsqu'elle était à Poudlard ?❞ demandais-je, révélant un fragment de l'immense vide de mes connaissances sur les préférences, les habitudes, les souvenirs de la scolarité de ma fille. Elle qui avait toujours demandé à rester au château, y avait-elle passé de bons moments ? Mettait-elle la salle commune dans un état d'effervescence digne d'un bal de Veaudelunes ? Était-elle noyée sous les lettres et les cadeaux sans pouvoir sortir de la Grande salle ? Autant de récits qui ne furent jamais relatés, ensevelis sous une épaisse couche de rancœur et de ressentiment.

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Etait-ce une simple impression ou l’air devenait-il de plus en plus suffoquant ? Probablement la première option, mais Dolores n’en avait pas moins envie de quitter les lieux au plus vite. Se trouver seule face à la Ministre de la Magie en personne, sans convocation ni quelconque annonce préalable était déjà déroutant en soi, mais se trouver face à la mère de Meredith l’était plus encore. Au moins n’avait-elle pas à craindre pour sa propre sécurité, du moins pour le moment. Ce n’étaient ni son travail, ni ses… activités annexes qui étaient ici l’objet de l’entretien, mais bel et bien la personne que toutes deux avaient en commun. Des années que son amie lui parlait de sa mère, encore et encore, en faisant un portrait des plus viles au point que la jeune Abbott en venait à craindre de dire un mot de trop susceptible de trahir la blonde.

Le terme de surprise lui fit hausser les sourcils. Quand bien même Mrs Travers aurait préparé le plus beau, le plus merveilleux des anniversaire, elle aurait été en tort. C’était bien là quelque chose que Dolly avait appris depuis qu’elle fréquentait l’ancienne Serdaigle. Et puis, elle doutait fortement du résultat: Mere avait toujours évité de partager ces moments avec sa génitrice, se voir offrir une fête impromptue risquait davantage de la mettre dans tous ses états, et pas ceux qu’on aurait pu espérer. L’assistante parjurante ne dit rien cependant, ignorant comment son interlocutrice pourrait le prendre. Elle était, après tout, face à sa grande patronne. Qu’elle la renvoie serait un moindre mal, mais la jeune fille ne doutait pas un instant qu’elle soit capable de bien pire… malgré le ton apparemment innocent de la conversation, Dolores restait sur ses gardes. Elle en avait trop entendu pour décider d’abaisser les murailles si facilement.

Non, rien de ce que dirait cette femme ne pourrait la faire changer d’avis. Y compris ses apparents compliments sur la loyauté dont elle faisait preuve. La voilà, de nouveau, qui insistait. Résister la mettait d’autant plus mal à l’aise, mais ne pas le faire eut été ni plus ni moins qu’une trahison. « Je ne pense pas être en mesure de vous aider, Madame. » Son ton était moins affirmé qu’elle l’aurait voulu. Difficile de faire montre de son habituel aplomb devant la Ministre en personne. Malgré tout, elle tenait à être inflexible. C’était là tout ce que la mère de sa meilleure amie obtiendrait d’elle. Mere l’avait suffisamment prévenue contre cette femme et elle n’était d’ailleurs pas la seule.

Un soupir, des mots dévoilant cette fois-ci quelque chose de plus… vulnérable, peut-être. Mais rien qui puisse venir à bout de la détermination de Dolores. Non, elle ne céderait pas. Elle refuserait une fois de plus de répondre et quitterait ce bureau. La voilà prête à s’exécuter, résolue, debout, le corps en biais, déjà prêt à se tourner vers la sortie.
Et pourtant… quelque chose l’en empêchait. Ses pieds refusaient de se soumettre à cette volonté, son regard de se détacher de la femme face à elle, qui venait bien malgré tout de toucher un point particulièrement sensible pour la jeune fille. C’était sa faiblesse, voir une mère se languir de son enfant et durant un instant elle se demanda si Mary Travers ne l’avait pas fait exprès, si elle n’était pas en train de la manipuler. Après tout, travaillant avec son père aussi souvent, elle devait connaitre leur passif, le deuil qui les avait tout deux traversés, anéantis. Ce deuil qui ne lui permettait pas de demeurer aussi indifférente qu’elle l’aurait souhaité, alors qu’elle voyait les fossés qui séparaient mère et fille. Lentement mais sûrement, un sentiment fit son chemin sous sa peau. Quelque chose que jamais oh grand jamais elle n’aurait voulu éprouver pour cette femme: de la compassion. Pas beaucoup, rien qu’un peu, mais assez pour l’empêcher de quitter cet endroit comme elle en avait eu l’intention.

Cette fois-ci, ce fut Dolores qui poussa un soupir et baissa un instant la tête, peu à l’aise sur ses jambes mais refusant de se rasseoir. Avant que son regard ne rencontre de nouveau celui de la Ministre, que ses lèvres se meuvent pour prononcer des paroles qu’elle allait très certainement regretter par la suite. « On faisait souvent une soirée avec quelques amis, ou une sortie à Pré-au-Lard par exemple. Quelque chose de simple, avec peu de monde. » Elle souhaitait rester vague mais craignait d’en avoir déjà trop dit. Si jamais la mère de Meredith utilisait ces informations pour préparer une fête surprise pour sa fille, son amie lui en voudrait. Elle n’allait pas avoir d’autre choix que la trouver pour lui répéter cette conversation dès qu’elle le pourrait. « Si je peux me permettre, je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée de lui organiser une surprise. » Correction, ce ne serait pas une bonne idée que Mrs Travers lui organise une surprise, et surtout s’il s’agissait de quelque chose de grandiose et guindé. Dolores ignorait en vérité si Meredith accepterait d’en discuter avec sa mère, mais si elle en croyait ce que sa meilleure amie lui rapportait depuis des années, elle en doutait.

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De nouveau, elle déclina. Qu’elle puisse émettre des réticences à participer directement à l’organisation de la soirée d’anniversaire était concevable, bien que légèrement indélicat de sa part. Je n’étais certes, pas habituée à ce que l’on me refuse quelque chose, mais au-delà de ça, je n’osais imaginer quelle était la teneur du discours de Meredith à mon sujet pour que sa meilleure amie puisse ainsi dédaigner une occasion de lui faire plaisir, ou de passer du temps avec elle. Peut-être était-il préférable de n’en rien savoir : certaines confidences font plus de mal que de bien et j’avais l’intime conviction que celles-ci en faisaient partie. Toute vérité n’était pas toujours bonne à entendre.
Aussi, j’avais abordé le problème sous un angle différent : si la jeune Abbott était-à ce point persuadée que mes idées ne seraient pas appréciées à leur juste valeur, alors sans doute serait-il plus pertinent de se renseigner sur les préférences de la principale intéressée, car il s’agirait d’éviter tout impair et de lui offrir quelque chose qu’elle serait plus à-même d’apprécier. Mais cette fois encore, je me heurtais à un refus. Silencieuse, je continuais de l’observer alors qu’elle restait debout face à moi. La jeune femme semblait résolument décidée à ne pas m’assister. Fort bien. Toutefois, je constatais qu’elle ne bougeait pas, malgré son intention manifeste de quitter les lieux. Était-il possible qu’il existât quelques fissures dans cette détermination qu’elle tendait à afficher face à moi ? Je restais impassible, ne cherchant pas à la retenir pour lui donner l’illusion d’avoir le choix. De ce fait, elle aurait le sentiment d’être restée de son plein gré. Mais en vérité, cette décision ne lui appartenait pas : cette entrevue prendrait fin lorsque je l’aurai acté comme tel. Autrement dit, lorsque j’aurai obtenu des réponses satisfaisantes. Et puisque la demoiselle rechignait à entreprendre quoique ce soit, ou à parler à Meredith, ce serait donc directement auprès d’elle que je prendrai mes informations.

Après quelques secondes de réflexion, il m’apparut que la meilleure solution dans ce cas précis était encore d’aller droit au but. Après un léger soupir que je n’avais pu empêcher, je la questionnais sans détour à propos des précédents anniversaires de ma fille, évènements auxquels je n’avais pu assister. Je joignis les mains, offrant alors à la sorcière une qualité d’écoute sans pareille. Dans cette institution, rares étaient ceux qui pouvaient se vanter d’y avoir eu accès un jour, mais ce qu’il fallait bien comprendre ici, c’était que parmi toutes les conversations dont on m'accablait chaque jour, aucune ne pourrait m’être aussi instructive que celle concernant ma fille. Chaque détail, chaque bribe m’était d’autant plus précieux qu’il contribuerait certainement à combler ce fossé qui existait entre nous depuis des années. Et cela comptait  beaucoup plus que cette histoire d’anniversaire, au final. L’espace d’un instant, la petite baissa la tête, et je sus alors que toute résistance était momentanément terminée. Elle n’avait aucune raison valable de m’interdire ce genre d’information, elle en était parfaitement consciente. Ses grands yeux noisette croisèrent brièvement l’acier, et je cillais, l'encourageant tacitement à parler.

Je n’eus aucune peine à imaginer les scènes qu’elle me décrivait : les images d’une Meredith souriante et enjouée s’imposaient à moi comme une évidence, voire même un soulagement. On me permettait enfin de remplacer ces nombreuses zones d’ombre par quelques mirages dressés à la hâte. De la Grande salle à l’auberge des Trois Balais, je m’imaginais mille scénarios allant d’une simple journée de détente à flâner à Pré-au-lard, s’arrêtant ça et là pour dévaliser les boutiques ou pour recevoir quelques articles emballés dans du papier doré, aux retrouvailles clandestines après le couvre-feu, armés d’une collection de friandises, de chocogrenouilles et peut-être même, d’un véritable gâteau et de quelques Bièraubeurres dérobées dans les cuisines à l’insu du corps professoral.
'Si je peux me permettre, je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée de lui organiser une surprise.’ La fragile petite bulle éclata en plein vol et les images s'estompèrent en un instant. Vague à l’âme. Amertume qui se loge au fond de la gorge. Je haussais les sourcils, peu convaincue par cette affirmation.
❝Et puis-je savoir pourquoi ?❞ demandais-je, de marbre. Apparemment Meredith n’avait pas été contre quelques festivités ces dernières années, même si cela s’était déroulé en toute simplicité, pour reprendre les termes exacts de son amie. Je pouvais contacter ces mêmes personnes, aller à Pré-au-Lard si elle en avait envie, recréer ces charmants tableaux et même plus encore si elle me le demandait. Ma position actuelle lui permettait la moindre fantaisie et ne souffrait aucune limite, tant que cela n’allait pas à l’encontre des lois de ce pays bien évidemment. Non dans tout cela, une pièce ne s’ajustait pas au puzzle. J’avais bien une vague idée de la nature de ce défaut, mais je voulais me l’entendre dire plutôt que d'accorder du crédit inutile à cette hypothèse.❝Dans ce cas, peut-être avez-vous d’autres suggestions à me proposer ? ❞ Je me penchais vers elle, la contraignant à prendre part au projet malgré elle. Une nouvelle fois, je changeais mon fusil d’épaule, comme tout bon politicien sait le faire. J'ai dit que je concevait le fait qu'elle ne veuille pas participer, non pas que je l'acceptais.
❝Selon vous, comment devrais-je procéder Miss Abbott ?❞

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Elle avait chaud la gamine, elle étouffait, prise à la gorge dans une situation absolument impossible. Habituellement, elle ne se serait pas embarrassée de courbette et faux semblants et aurait tout simplement dit la vérité. Que Meredith ne voudrait très certainement rien qui vienne de sa mère, et surtout pas si c’était par surprise. Que leur relation était, de ce qu’elle avait pu voir, bien trop abimée pour qu’une simple fête suffise à recoller les morceaux. Mais évidemment qu’elle ne pouvait pas dire ça. Parmi tous les adultes qu’elle côtoyait, s’il y en avait une à qui elle devait un respect tout particulier, c’était bien la Ministre de la Magie. Et sa patronne par-dessus le marché. Malgré l’opinion peu reluisante qu’elle avait d’elle, la petite brune ne savait que trop bien qu’elle ne pouvait pas dire n’importe quoi. Alors que dire justement ? Parce qu’elle ne pouvait quand même pas mentir non plus, raconter que Meredith serait absolument ra-vie d’avoir une fête surprise organisée pour son anniversaire. En plus, sa meilleure amie serait furieuse, et à raison. Alors, Dolly hésitait, animée d’un vif désir de transplaner hors de ce bureau. Mrs Travers lui avait promis que l’entretien était informel, mais elle se méfiait quand même. Est-ce qu’elle pouvait se faire renvoyer pour avoir dit quelque chose qui ne lui plairait pas ?

Elle avait fini par dévoiler le fond de sa pensée, avec autant de diplomatie qu’elle le pouvait vues les circonstances. Ça ne lui faisait pas plaisir tout ça, loin de là. Ça réveillait de vieilles plaies pas vraiment cicatrisées, de voir une mère et sa fille se déchirer de cette façon, surtout quand ladite fille était plus qu’une amie pour elle, une soeur. Elle ne le lui disait pas à Meredith parce qu’elle ne savait que trop bien que ça ne ferait que déclencher une dispute, mais Dolly en son for intérieur était persuadée que l’ancienne Serdaigle ne pourrait qu’aller mieux en se réconciliant avec sa mère. Elle avait conscience que c’était absurde, plus encore en grandissant, mais tout ça était plus fort qu’elle. Elle ne pouvait pas s’empêcher de penser à ce qu’elle ferait, elle, si elle avait eu la chance que sa propre mère soit toujours en vie. C’était injuste sans doute. Elle en avait suffisamment entendu pour savoir que les problèmes entre les Travers étaient graves, peut-être au-delà du réparable. Mais pourtant c’était comme ça, elle projetait malgré tout bon sens.

Elle n’eut pas de mal à comprendre que sa réponse avait déplu. Rien d’étonnant là-dedans, mais ce n’était pas pour autant que ça rassurait Dolly, qui se sentait de plus en plus prise au piège. Que répondre à une question pareille ? « Parce que c’est vous qui l’organiserez » ne serait sans doute pas une réponse très bien reçue. Elle fit de son mieux pour formuler sa pensée de manière moins brutale. « Euh… et bien… j’ai cru comprendre que les choses ne sont pas toujours faciles entre vous et… je pense qu’elle ne s’y attendrait pas… je suis pas certaine qu’une surprise, comme ça, ça lui fasse vraiment plaisir. » Le discours de la jeune fille est atrocement embrouillé. Beaucoup trop de mots pour tout simplement dire que jamais oh grand jamais Meredith n’accepterait ce genre de geste de la part de sa mère. Dolores pouvait déjà l’imaginer monter sur ses grands chevaux et très certainement penser que Mrs Travers aurait fait tout ça uniquement pour l’amadouer ou la manipuler. Des dires de son amie, la Ministre était incapable d’une quelconque forme d’empathie ou d’affection sincère. La petite brune n’avait jamais osé émettre de doute là-dessus à voix haute et elle avait envie de croire que les intentions de la sorcière étaient bonnes, mais à choisir elle serait toujours du côté de Mere.

Par Merlin, sa supérieure n’était apparemment pas décidée à la laisser tranquille. Voilà que maintenant Dolly devait lui donner des conseils. C’était d’une telle absurdité que la gamine aurait pu en rire, si elle n’avait pas tant l’impression de se liquéfier sur place. Il fallait à tout prix qu’elle la dissuade d’une quelconque surprise. Non seulement c’était la pire idée possible, mais en plus Meredith ne le lui pardonnerait sans doute jamais. Alors la jeune Abbott se redressa sur son siège, essayant autant que possible de reprendre contenance. « Peut-être que vous pourriez lui demander directement ? Essayer d’organiser quelque chose avec elle ? » Très franchement, elle doutait fortement que ça fonctionne. Ce n’était pas demain la veille que sa meilleure amie accepterait d’organiser un événement avec sa génitrice main dans la main. « Ce serait peut-être l’occasion de vous parler ? » La jeune assistante parjurante avait la très nette impression de mettre les pieds là où elle n’aurait pas dû. Elle n’avait aucune envie de se retrouver à faire le tampon entre les Travers. Que toutes deux aillent voir un psychomage et la laissent tranquille avec ça ! Mais évidemment, cette suggestion était exclue et la jeune fille ne voyait pas vraiment ce qu’elle pouvait ajouter de plus. Elle ne céderait pas, elle pensait l’avoir clairement fait comprendre. Elle reprit, après une pause. « Est-ce que je peux y aller ? »

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La balle était dans son camp désormais, alors que je l'avais mise au pied du mur en lui réclamant une solution directe et franche. Considérant qu'aucune de mes propositions ne semblait convenir, il me semblait pertinent que la jeune fille me fasse part de ses propres idées quant à la marche à suivre. Après tout, n'était-elle pas la plus proche amie -sinon la plus proche sorcière- de Meredith ? Visiblement, Abbott la connaissait mieux que quiconque et elle semblait en capacité de m'apprendre les rouages du fonctionnement de ma propre fille. C'était vexant pour une mère, mais les choses étant ce qu'elles sont, je m'en remettrai. Par cette démarche, je ne comptais pas me faire pardonner de toutes ces années de conflit. Ce n'était pas comme ça que les choses fonctionnaient et si j'avais réussi à inculquer une notion à Meredith, c'était que l'affection ne s'achetait pas, quand bien même on en avait les moyens. J'avais simplement espéré me rapprocher d'elle, faire le premier pas afin qu'elle comprenne que j'étais prête à fermer les yeux sur ses nombreuses impertinences et ses coups dans le dos pour revenir à quelque chose d'essentiel, quelque chose que nous avions perdu depuis de nombreuses années : un vrai lien de parenté.

Elle balbutia la petite, s'emmêlant les pinceaux en parsemant sa réponse d'une multitude d'arguments mal fagotés. Des bribes d'excuses choisies maladroitement, apposées les unes sur les autres pour dresser un tableau illusionniste de piètre facture. Je haussais un sourcil, loin d'être convaincue par cette tentative hasardeuse. Je n'étais pas née de la dernière pluie, et je savais reconnaître une esquive en règle lorsque j'en voyais une. Après tout, j'avais élevé une experte en la matière...s'il y avait bien une chose que mon rôle de mère m'avait appris, c'était la faculté de discerner les ruses, les artifices, ou n'importe quel moyen détourné qui ne saurait être authentique. Voilà maintenant dix-neuf ans que je me perfectionnais dans ce domaine, j'avais donc aujourd'hui suffisamment d'acquis pour comprendre que la jeune femme devant moi cherchait à noyer le strangulot.❝Je vois.❞ Je laissais quelques instants passer, faisant mon possible pour ne pas laisser le pincement d'amour-propre devenir visible. Oui, je voyais tout à fait quel était le véritable problème, malgré toutes la prévenance et les tentatives de l'adolescente pour me le cacher. La vérité, c'était que Meredith n'avait de cesse de mettre des barrières entre nous, et l'idée même que je puisse chercher à lui offrir quelque chose, même si cela prenait l'apparence d'une fête d'anniversaire, ou que je puisse tout simplement chercher à passer du temps avec elle sans aucune occasion particulière lui était impensable. 'Peut-être que vous pourriez lui demander directement ? Essayer d’organiser quelque chose avec elle ?' ❝Et que croyez-vous que j'essaie de faire exactement, Miss Abbott ?❞ fis-je d'un ton assez sec. Si je l'avais ainsi tiré de son travail sans préavis, ce n'était pas par plaisir ou pour la voir se tourner les pouces. 'Ce serait peut-être l’occasion de vous parler ?' Je laissais échapper un long soupir de frustration, renonçant à lui dissimuler mon agacement.
Les pincettes n'avaient eu aucun effet sur la jeune intrépide et elle avait déjà considérablement amenuisé mes réserves de patience. Pourquoi fallait-il qu'il y ait toujours des complications dans des affaires qui pourraient être si simples ? Chez n'importe qui d'autre, de bien pensant, de normalement constitué, la perspective de participer à une soirée de réjouissances à mes frais aurait créé l'unanimité ,et les négociations n'auraient guère duré plus de quelques minutes. Décidément, qu'est-ce qui clochait chez les jeunes de maintenant ?❝Ecoutez Dolores. Je vous remercie de la prévenance dont vous avez fait preuve jusqu'ici, mais il est inutile de tergiverser plus longtemps. Nous savons toutes les deux que le véritable problème ici n'est pas l'anniversaire de Meredith, il aurait pu s'agir du réveillon de Noël, de la Saint-Godric, de la finale de la Coupe de Quidditch; ou même d'aller acheter un manuel ou n'importe quelle autre babiole sur le Chemin de Traverse que cela n'aurait rien changé.❞ commençais-je en sentant ma tolérance s'envoler au fur et à mesure.❝Ne pensez-vous pas que si je vous ai fait venir, c'est justement parce que toutes les discussions entamées avec ma fille se sont révélées infructueuses ? Que l'idée d'échanger avec elle ne m'avait jamais traversé l'esprit avant que vous ne me le suggériez, hm ? ❞ Abbott se payait ma tête. Ou alors, elle avait la jugeotte d'un troll. Croyait-elle réellement que je me serais embarrassée à convoquer l'entourage de ma fille alors qu'il suffisait d'engager la conversation au déjeuner, entre le plat et le dessert par exemple ? Ou en ouvrant le courrier ? Par Merlin, en voilà une suggestion lumineuse ! Heureusement que vous êtes là, Abbott : qu'aurais-je fais sans vous, on se le demande !
Je laissais une pause, infime, de courtoisie, tant pour lui laisser ingérer convenablement l'aberration de ses propos que pour me laisser le temps de conserver mon sang-froid. M'en prendre à elle et la pousser dans ses retranchements ne parviendrait qu'à la braquer et cela n'était pas dans mon intérêt d'agir ainsi. Non seulement cela ne ferait pas aboutir mon projet, mais cela risquerait de mettre en péril la relation fragile qui se dessinait maladroitement avec Ronald. Non, une dispute frontale n'amènerait rien de probant. Et de toute façon, j'avais en ma possession de nombreuses autres méthodes pour obtenir des résultats. Certains plus honorables que d'autres, certes, mais non moins efficaces.

❝Je peux concevoir que vous ayez des réticences, ou que vous vous sentiez prise de court. La possibilité même que vous ayez des à-priori à mon égard ne m'étonne aucunement. Mais en revanche, je ne puis tolérer d'être prise pour une imbécile, ou que l'on me fasse perdre mon temps. Or, vous effleurez dangereusement les limites de l'un et l'autre.❞ lui fis-je savoir sans détour en me redressant pour mettre de la distance entre nous.❝Vous fréquentez Meredith depuis suffisamment longtemps pour appréhender notre situation familiale de manière adéquate et pertinente, c'est donc en toute connaissance de cause que vous avez franchi cette porte. Que vous avez entendu ma requête, avec tout ce que cela implique en terme de conciliation -pour ne pas dire réconciliation - et dans quelle mesure votre médiation nous était essentielle. Vous avez choisi de ne pas soutenir cette démarche, c'est votre droit. Mais ne me laissez pas sous-entendre que j'ai pu manquer de volonté, de cran ou de persévérance envers ma fille en décidant de m'adresser à vous. Qu'il me suffisait de provoquer le dialogue avec elle pour que tout s'arrange, ou même me faire croire que celui-ci puisse être le fruit d'une envie réciproque et que nous pourrions œuvrer ensemble main dans la main. Si tel avait été le cas, Meredith n'aurait pas attendu son dix-neuvième anniversaire pour m'en faire part, et vous le savez très bien ! Les choses sont déjà suffisamment difficiles pour me faire entrevoir des chimères, Dolores. A l'avenir, j'apprécierai que vous vous en absteniez.❞ Il est dangereux de jouer avec les espoirs des gens, en particuliers lorsque ceux-ci peinent déjà à le préserver. Peut-être avait-elle cru bien faire en agissant ainsi ? Qu'elle préférait me dire ce que je voulais entendre plutôt que de risquer une mésentente ? Mais le problème, c'est que je ne lui avais pas demandé de me plaire. Je lui avais demandé de m'aider. Et voilà qu'au final, aucune de ces deux cases n'était remplie. Pire encore, je l'enviais me surpris-je à penser. Elle qui m'avait mis de jolies images en tête, et qui s'apprêtait à repartir avec le reste de ses souvenirs heureux en compagnie de Meredith. Elle l'avait fait exprès. Parce qu'elle savait que je n'y avais pas accès et qu'en cela, elle était en position de supériorité. Je l'avais sous-estimée...m'appâter ainsi avec des miettes de douceur pour ensuite m'en priver était d'un niveau de malignité que je ne lui aurait pas envisagé de prime abord. On lui aurait donné le bon Dieu sans confession. Finalement, peut-être aurais-je dû ne rien demander. S'il fallait revenir en arrière, je préfèrerais ne rien savoir. Les choses étaient pires maintenant que j'y avais goûté car il y avait cette amertume qui restait au fond de la gorge.

Je l'observais quelques instants encore, faisant mon possible pour ne pas la haïr tout à fait. Mon mutisme soudain rendait l'atmosphère pesante et si j'avais conscience que les mots avaient été durs, je n'en regrettais aucun.❝Si vous n'avez rien à ajouter, vous pouvez partir.❞ déclarais-je, d'un ton sans appel malgré la formulation. Je glissais un regard vers la porte derrière elle, l'incitant tacitement à prendre congé. Je savais désormais à quoi m'en tenir avec elle. Meredith avait trouvé une amie à sa mesure, sournoise et intraitable certes, mais définitivement loyale. Parfois, l'amitié vaut plus que la parenté. Cela se vérifiait encore une fois...

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Elle était dans une situation impossible, nul besoin d’être un génie pour s’en apercevoir. Elle ne pouvait trop en dire sous peine de trahir Meredith, qui, elle s’en doutait, aurait eu du mal à comprendre que sa meilleure amie puisse parler d’elle à sa mère dans son dos. Mais elle voyait mal comment opposer un non frontal à la Ministre en personne et celle qui avait pouvoir de l’employer ou la congédier. Et puis, que dire pour résoudre une situation qui paraissait inextricable, insurmontable ? D’aussi loin qu’elle ait pu la connaitre, Mere lui avait toujours dit du mal de sa mère, tout en lui conseillant fortement de s’en méfier le plus possible, de l’éviter. Dolly lui avait jusqu’alors obéi, mais il y avait des limites à cet évitement, et se trouver sur le même lieu de travail en était une. Alors elle fit de son mieux pour contrer le malaise. Elle ne savait pas comment aider, ne voyait bien ce qu’elle pourrait apporter, trouvait la requête même totalement absurde, presque risible. Mais c’est vrai, l’espace d’un instant, elle eut de la peine en regardant cette mère tenter désespérément d’entrer en contact avec sa fille. Est-ce que, si Victoria avait été encore en vie, ça aurait pu être elles ? La petite brune refusait de le croire, la perspective l’attristait beaucoup trop.

Elle avait soudain l’impression qu’on lui faisait porter un poids trop lourd pour ses épaules et bredouilla ce qu’elle pouvait, les solutions qui lui venaient en tête, mais même du haut de ses presque dix-neuf ans, elle se rendait bien compte qu’elle ne s’en sortait pas très bien. Elle ne trouvait aucun conseil profond ou significatif et ne s’imaginait toujours pas donner un quelconque accord pour organiser une fête. A la place, elle tenta de faire comprendre à Mrs Travers-Flint, du mieux qu’elle pouvait, que tout ceci n’était peut-être pas une bonne idée. Bien sûr, elle n’était pas dans la tête de Mere mais elle avait du mal à imaginer une situation où cette dernière serait heureuse de découvrir une surprise préparée par sa mère tant cette dernière semblait avoir tord à ses yeux, tout le temps.

Il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre que sa réponse n’était pas la bonne et elle pâlit un peu, tout en étant prise de l’envie de se fondre dans sa chaise alors que la Ministre faisait montre d’un agacement des plus évidents. Dolly aurait mieux fait de se taire en réalité, de refuser directement, mais il avait fallu qu’elle laisse son histoire personnelle interférer, comme elle le faisait un peu trop souvent. Elle se tut, n’étant pas assez idiote pour essayer de la contredire alors que son interlocutrice citait une évidence: Mary Travers aurait pu offrir la plus belle fête d’anniversaire qu’on ait jamais vue que sa fille l’aurait rejetée malgré tout. Le problème était plus profond, trop pour que Dolores puisse en saisir la totalité. Mais ce qu’elle en savait suffisait pour qu’elle comprenne que tout ça ne se résoudrait pas si facilement.

Si elle était mal à l’aise, la suite fut pire encore, alors que la Ministre semblait avoir particulièrement mal pris les dires de la jeune fille. Dolly pâlit d’autant plus, consciente qu’elle s’était sans le vouloir mise dans une situation très compliquée. « Mais ce n’est pas… » Pas du tout ce qu’elle avait voulu dire, seulement sa phrase mourut alors que Mrs Travers-Flint lâchait tout son ressentiment, laissant la petite brune complètement pantoise de constater à quel point ses paroles avaient été mal interprétées. Les accusations qui en découlèrent cependant furent loin, très loin de lui plaire. La prendre pour une imbécile ? Lui faire perdre son temps ? De ce qu’elle sache, c’était bien elle qui avait été tirée de son travail pour répondre à une demande personnelle. Qu’aurait-elle dû faire, refuser et risquer une possible sanction alors qu’elle n’était employée que depuis quelques mois ? Elle ne répondit rien, serra les dents, tandis que les accusations pleuvaient. Voilà qu’elle était apparemment responsable de l’échec des réconciliations entre une mère et sa fille, et également de donner de faux espoirs (et elle avait bien du mal à comprendre ce qui dans son attitude ou dans ses mots avait pu faire espérer cette femme).

Dolores n’avait jamais eu pour habitude de laisser les adultes lui parler de cette façon, à moins qu’elle ait fait quelque chose de mal. Ce qu’ici elle considérait ne pas être le cas. Elle aurait pu simplement se lever et partir comme elle était invitée à le faire, elle qui rêvait de la sortie depuis qu’elle avait mis le pied dans ce bureau. Mais non, hors de question de se laisser accuser de cette façon, de mille mots qui n’avaient pour elle ni queue ni tête et elle sentit le peu de sympathie qu’elle avait pu avoir fondre comme neige au soleil. Elle se redressa, prit une voix plus posée alors que son regard se durcissait. Elle adopta ce qu’elle avait appelé dans l’enfance son « ton de grande personne », celui qu’elle prenait lorsqu’elle avait quelque chose d’important à dire aux adultes et qu’elle avait perfectionné avec le temps. « Madame la Ministre, je suis désolée que mes paroles vous aient offensées, croyez bien que ce n’était pas mon intention. Mais avec tout le respect que je vous dois, j’avoue avoir du mal à comprendre ce que vous attendiez de moi exactement. Meredith est-elle d’accord pour une médiation ? Parce qu’à moins qu’elle le soit, je ne vois pas vraiment ce que je peux faire. A moins que vous souhaitiez la forcer, mais je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée. De ce que je sache, il ne peut pas y avoir conciliation si seulement une des deux parties le veut bien. » Quelque chose qu’elle avait pu apprendre durant ses premiers mois au sein du Département de Justice Magique. « Mais si un jour elle est d’accord, je serais ravie de jouer ce rôle. En attendant, j’en suis désolée mais je ne peux rien faire de plus. »

Puisque la Ministre l’avait congédiée, elle prit la liberté de se lever. « Bonne journée Madame. » conclut-elle avant de sortir.

Une fois à l’extérieur du bureau, elle eut l’impression de respirer, sans être soulagée pour autant, car il était clair qu’elle avait perdu une excellente occasion de garder le silence. Elle reprit le chemin de son poste de travail tout en se demandant si elle ne venait pas d’enterrer sa carrière avant même que celle-ci ait commencé.

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